Sujet: Janvier 2011 fin de vie échec d'une loi 01.02.12 16:54
N° 1960 (rectifié)
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
TREIZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 7 octobre 2009.
PROPOSITION DE LOI
relative au droit de finir sa vie dans la dignité,
(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée par Mesdames et Messieurs
Jean-Marc AYRAULT, Manuel VALLS, Laurent FABIUS, Danièle HOFFMAN-RISPAL, Germinal PEIRO, Jean-Paul DUPRÉ, Marie-Odile BOUILLÉ, Jean-Louis TOURAINE, Christiane TAUBIRA, Marylise LEBRANCHU, Pierre BOURGUIGNON, Patricia ADAM, Sylvie ANDRIEUX, Dominique BAERT, Jean-Pierre BALLIGAND, Gérard BAPT, Jacques BASCOU, Christian BATAILLE, Delphine BATHO, Jean-Louis BIANCO, Gisèle BIEMOURET, Patrick BLOCHE, Daniel BOISSERIE, Maxime BONO, Jean-Michel BOUCHERON, Christophe BOUILLON, Danielle BOUSQUET, Alain CACHEUX, Jérôme CAHUZAC, Thierry CARCENAC, Bernard CAZENEUVE, Alain CLAEYS, Catherine COUTELLE, Claude DARCIAUX, Pascal DEGUILHEM, Guy DELCOURT, François DELUGA, Bernard DEROSIER, Tony DREYFUS, Jean-Pierre DUFAU, Laurence DUMONT, Yves DURAND, Olivier DUSSOPT, Christian ECKERT, Henri EMMANUELLI, Martine FAURE, Hervé FÉRON, Geneviève FIORASO, Michel FRANÇAIX, Jean-Claude FRUTEAU, Geneviève GAILLARD, Guillaume GAROT, Jean GAUBERT, Jean-Patrick GILLE, Annick GIRARDIN, Jean GLAVANY, Daniel GOLDBERG, Marc GOUA, Jean GRELLIER, David HABIB, Monique IBORRA, Françoise IMBERT, Michel ISSINDOU, Serge JANQUIN, Henri JIBRAYEL, Marietta KARAMANLI, Jean-Pierre KUCHEIDA, Conchita LACUEY, Colette LANGLADE, Jean LAUNAY, Jean-Yves LE BOUILLONNEC, Gilbert LE BRIS, Jean-Yves LE DÉAUT, Annick LE LOCH, Bruno LE ROUX, Patrick LEMASLE, Catherine LEMORTON, Annick LEPETIT, Bernard LESTERLIN, Martine LIGNIÈRES-CASSOU, François LONCLE, Jean MALLOT, Louis-Joseph MANSCOUR, Jacqueline MAQUET, Marie-Lou MARCEL, Jean-René MARSAC, Martine MARTINEL, Frédérique MASSAT, Kléber MESQUIDA, Jean MICHEL, Didier MIGAUD, Arnaud MONTEBOURG, Pierre MOSCOVICI, Philippe NAUCHE, Alain NÉRI, Marie-Renée OGET, Françoise OLIVIER-COUPEAU, George PAU-LANGEVIN, Marie-Françoise PÉROL-DUMONT, Martine PINVILLE, Philippe PLISSON, François PUPPONI, Marie-Line REYNAUD, Chantal ROBIN-RODRIGO, Alain RODET, Marcel ROGEMONT, René ROUQUET, Patrick ROY, Michel SAINTE-MARIE, Michel SAPIN, Christophe SIRUGUE, Pascal TERRASSE, Marisol TOURAINE, Philippe TOURTELIER, Daniel VAILLANT, Jacques VALAX, Michel VERGNIER, André VÉZINHET, Jean-Michel VILLAUMÉ et Philippe VUILQUE,
députés.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Notre pays est prêt à autoriser que l’on accède à la demande des personnes dont les souffrances sont telles qu’elles souhaitent, de la part des personnes qui les soignent, une aide active pour mettre fin à leur vie.
Nous, représentants de la Nation, devons prendre nos responsabilités et tenir compte d’un débat de société important, qui nous amène à proposer une réponse légale, en créant un droit de mourir dans la dignité, afin que chaque citoyen puisse aborder la fin de sa vie dans le respect des principes d'égalité et de liberté.
Nous souhaitons proposer une loi qui ne soit pas une réponse à des cas individuels et médiatisés, aussi dramatiques qu’ils puissent être. L’émotion ne doit pas être le moteur du législateur.
Le développement des soins palliatifs doit constituer une priorité nationale, en cela les pouvoirs publics doivent prendre leur responsabilité et donner les moyens nécessaires pour faire connaître et développer les soins palliatifs par les professionnels et les usagers du système de santé.
Mais ces soins palliatifs ne doivent pas être opposés au fait que toute personne, arrivée à un certain stade de sa maladie et soulagée de ses souffrances du mieux possible, doit pouvoir choisir la mort, si elle le souhaite, et recevoir pour cela l’aide dont elle a besoin.
Il faut rappeler que la loi n° 2005-370 du 22 avril 2005 a été adoptée à l’unanimité à la suite d’un travail important. Elle a constitué une avancée considérable dans le débat sur la fin de vie des personnes en légalisant la possibilité d'arrêter l'acharnement thérapeutique. Mais il convient de franchir un nouveau pas au regard des souffrances subies par certains malades, et au nom de l’égalité. Il s’agit en quelque sorte de créer un nouveau droit pour les malades en phase terminale.
La loi de 2005 avait aussi créé un droit, car le malade peut demander l’arrêt des soins. Elle prend en compte la quasi-totalité des situations, mais il reste toutefois la question des personnes dont l’arrêt du traitement ne suffit pas à les soulager et qui ne souhaite pas être plongée dans le coma. Confrontés à des demandes réitérées de mourir, les médecins sont alors laissés seuls face à la détresse de leur patient, de leur famille et à leur conscience.
Considérant que le législateur ne peut se défaire de ses compétences et laisser la jurisprudence dire le droit au cas par cas, il convient donc qu'il assume sa responsabilité en, ajoutant une étape dans le processus que constitue la législation concernant la fin de la vie, en proposant un encadrement strict de l'aide active à mourir.
Tel est l’objet de cette proposition de loi qui, tout en considérant la gravité de cet acte dont les conséquences sont importantes en termes d’éthique et de responsabilité, apportera une solution à l’inégalité devant la fin de la vie et des réponses juridiques appropriées pour les tribunaux.
PROPOSITION DE LOI
Article 1er
L’article L. 1110-9 du code de la santé publique est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Toute personne majeure, en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable, infligeant une souffrance physique ou psychique qui ne peut être apaisée et qu’elle juge insupportable, peut demander à bénéficier, dans les conditions strictes prévues au présent titre, d’une assistance médicalisée pour mourir dans la dignité. »
Article 2
Après l’article L-1111-10 du même code, il est inséré un article L. 1111-10-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 1111-10-1. – Lorsqu’une personne majeure, en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable, infligeant une souffrance physique ou psychique qui ne peut être apaisée et qu’elle juge insupportable, demande à son médecin traitant le bénéfice d’une aide active à mourir, celui-ci doit saisir sans délai au moins trois autres praticiens pour s'assurer de la réalité de la situation dans laquelle se trouve la personne concernée. Il peut également faire appel à tout autre membre du corps médical susceptible de les éclairer, dans les conditions définies par voie réglementaire.
« Le collège ainsi formé vérifie le caractère libre, éclairé et réfléchi de la demande présentée, lors d'un entretien au cours duquel ils informent l'intéressé des possibilités qui lui sont offertes par les soins palliatifs et l'accompagnement de fin de vie. Les médecins rendent leurs conclusions sur l'état de l'intéressé dans un délai maximum de huit jours.
« Lorsque les médecins constatent la situation d'impasse dans laquelle se trouve la personne, et le caractère libre, éclairé et réfléchi de sa demande, l'intéressé doit, s'il persiste, confirmer sa volonté en présence de sa personne de confiance.
« Le médecin traitant respecte cette volonté. L'acte d'aide active à mourir pratiqué sous son contrôle ne peut avoir lieu avant l'expiration d'un délai de deux jours à compter de la date de confirmation de la demande. Toutefois, ce délai peut être abrégé à la demande de l'intéressé si les médecins précités estiment que cela est de nature à préserver la dignité de celui-ci.
« L’intéressé peut à tout moment révoquer sa demande.
« Les conclusions médicales et la confirmation de la demande sont versées au dossier médical. Dans un délai de quatre jours ouvrables à compter du décès, le médecin qui a apporté son concours à l’aide active à mourir, adresse à la commission régionale de contrôle prévue à l’article L. 1111-14 un rapport exposant les conditions du décès. À ce rapport sont annexés les documents qui ont été versés au dossier médical en application du présent article. »
Article 3
L’article L-1111-11 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 1111-11. – Toute personne majeure peut rédiger des directives anticipées pour le cas où elle serait un jour hors d’état d’exprimer sa volonté. Ces directives anticipées indiquent les souhaits de la personne relatifs à sa fin de vie. Elles sont révocables à tout moment. À condition qu’elles aient été établies moins de trois ans avant l’état d’inconscience de la personne, le médecin doit en tenir compte pour toute décision la concernant. Dans ces directives, la personne indique ses souhaits en matière de limitation ou d’arrêt de traitement. Elle peut également indiquer dans quelles circonstances elle désire bénéficier d’une aide active à mourir telle que régie par le présent code. Elle désigne dans ce document la personne de confiance chargée de la représenter le moment venu. Les directives anticipées sont inscrites sur un registre national automatisé tenu par la Commission nationale de contrôle des pratiques relatives au droit de mourir dans la dignité, instituée par l’article L. 1111-14 du présent code. Toutefois, cet enregistrement ne constitue pas une condition de validité du document. Les modalités de gestion du registre et la procédure de communication des directives anticipées à la commission susvisée ou au médecin traitant qui en fait la demande sont définies par décret en Conseil d’État. »
Article 4
Après l’article L. 1111-13 du même code, il est inséré un article L. 1111-13-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 1111-13-1. – Lorsqu’une personne, en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable, se trouve de manière définitive dans l’incapacité d’exprimer une demande libre et éclairée, elle peut néanmoins bénéficier d’une aide active à mourir à la condition que cette volonté résulte de ses directives anticipées établies dans les conditions mentionnées à l’article L. 1111-11. La personne de confiance saisit de la demande le médecin traitant qui la transmet à trois autres praticiens au moins. Après avoir consulté l’équipe médicale et les personnes qui assistent au quotidien l’intéressé, et tout autre membre du corps médical susceptible de les éclairer dans les conditions définies par voie réglementaire, les médecins établissent, dans un délai de huit jours au plus, un rapport déterminant si l’état de la personne concernée justifie qu’il soit mis fin à ses jours.
« Lorsque le rapport conclut à la possibilité d’une aide active à mourir, la personne de confiance doit confirmer sa demande en présence de deux témoins n’ayant aucun intérêt matériel ou moral au décès de la personne concernée. Le médecin traitant respecte cette volonté. L’acte d’aide active à mourir ne peut intervenir avant l’expiration d’un délai de deux jours à compter de la date de confirmation de la demande.
« Le rapport mentionné des médecins est versé au dossier médical de l’intéressé. Dans un délai de quatre jours ouvrables à compter du décès, le médecin qui a apporté son concours à l’aide active à mourir adresse à la commission régionale de contrôle prévue à l’article L. 1111-14 un rapport exposant les conditions dans lesquelles celui-ci s’est déroulé.
« À ce rapport sont annexés les documents qui ont été versés au dossier médical en application du présent article, ainsi que les directives anticipées. »
Article 5
Après l’article L. 1111-13 du même code, il est inséré un article L. 1111-14 ainsi rédigé :
« Art. L.1111-14. – Il est institué auprès du garde des sceaux, ministre de la justice, et du ministre chargé de la santé, un organisme dénommé “Commission nationale de contrôle des pratiques relatives au droit de finir sa vie dans la dignité”. Il est institué dans chaque région une commission régionale présidée par le préfet de région ou son représentant. Elle est chargée de contrôler, chaque fois qu’elle est rendue destinataire d’un rapport d’aide active à mourir, si les exigences légales ont été respectées.
« Lorsqu’elle estime que ces exigences n’ont pas été respectées ou en cas de doute, elle transmet le dossier à la commission susvisée qui, après examen, dispose de la faculté de le transmettre au Procureur de la République. Les règles relatives à la composition ainsi qu’à l’organisation et au fonctionnement des commissions susvisées sont définies par décret en Conseil d’État. »
Article 6
Le dernier alinéa de l’article 1110-5 du même code est complété par deux phrases ainsi rédigées :
« Les professionnels de santé ne sont pas tenus d’apporter leur concours à la mise en œuvre d’une aide active à mourir ni de suivre la formation dispensée par l’établissement en application de l’article L. 1112-4. Le refus du médecin, ou de tout membre de l’équipe soignante, de prêter son assistance à une aide active à mourir est notifié à l’auteur de la demande. Dans ce cas, le médecin est tenu de l’orienter immédiatement vers un autre praticien susceptible de déférer à cette demande. »
Article 7
Après l’article L. 1111-13 du même code, il est inséré un article L. 1111-15 ainsi rédigé :
« Art. L.1111-15. – Est réputée décédée de mort naturelle en ce qui concerne les contrats où elle était partie la personne dont la mort résulte d’une aide active à mourir mise en œuvre selon les conditions et procédures prescrites par le code de la santé publique. Toute clause contraire est réputée non écrite. »
Article 8
Le deuxième alinéa de l’article L-1112-4 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Ils assurent également, dans le cadre de la formation initiale et continue des professionnels de santé, une formation sur les conditions de réalisation d’une euthanasie. »
Article 9
Les charges éventuelles qui résulteraient pour l’État de l’application de la présente loi sont compensées, à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés par les articles 575 et 575 A du code général des impôts.
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Sujet: Janvier 2011, échec d'une loi 20.02.12 17:24
N° 659
SÉNAT
SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2009-2010
Enregistré à la Présidence du Sénat le 12 juillet 2010
PROPOSITION DE LOI
relative à l'aide active à mourir,
PRÉSENTÉE
Par M. Jean-Pierre GODEFROY, Mmes Patricia SCHILLINGER, Raymonde LE TEXIER, Annie JARRAUD-VERGNOLLE, MM. Serge ANDREONI, Jean-Etienne ANTOINETTE, Mme Marie-Christine BLANDIN, M. Yannick BODIN, Mme Nicole BONNEFOY, M. Didier BOULAUD, Mmes Bernadette BOURZAI, Nicole BRICQ, Claire-Lise CAMPION, Françoise CARTRON, Monique CERISIER-ben GUIGA, MM. Yves CHASTAN, Yves DAUDIGNY, Jean-Pierre DEMERLIAT, Mme Christiane DEMONTÈS, M. Jean DESESSARD, Mme Josette DURRIEU, MM. Bernard FRIMAT, Charles GAUTIER, Didier GUILLAUME, Ronan KERDRAON, Serge LAGAUCHE, Serge LARCHER, Mme Françoise LAURENT-PERRIGOT, M. Jacky LE MENN, Mme Claudine LEPAGE, MM. Roger MADEC, Jacques MAHÉAS, Rachel MAZUIR, Jean-Pierre MICHEL, Gérard MIQUEL, Jean-Jacques MIRASSOU, Jean-Marc PASTOR, Bernard PIRAS, Mme Gisèle PRINTZ, MM. Daniel RAOUL, François REBSAMEN, Daniel REINER, Michel SERGENT, Simon SUTOUR, Mme Catherine TASCA, MM. Bernard ANGELS, Jacques BERTHOU, Yannick BOTREL, Jean-Noël GUÉRINI, Robert NAVARRO, Mme Michèle ANDRÉ, MM. Jacques GILLOT et Jean-Pierre BEL,
Sénateurs
(Envoyée à la commission des affaires sociales, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Depuis quelques années et grâce à quelques évènements médiatiques, notamment l'histoire de Vincent HUMBERT qui a ému la France entière, la question de la fin de vie a pris une ampleur particulière et a provoqué de nombreux débats chargés d'émotion. Ces débats ont permis des évolutions positives. Ils ont notamment conduit notre société à s'interroger sur la place qu'elle fait aux personnes malades et aux mourants alors que pendant longtemps, en France, comme dans d'autres pays essentiellement latins, on constatait un très grand déficit de la réflexion et de l'action sur la façon de développer la qualité de vie des malades et de répondre à la multiplicité des besoins des patients, souvent dépossédés d'eux-mêmes.
Ces débats ont également permis, grâce à la loi du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie, de consacrer le principe de l'obstination déraisonnable et le droit au refus d'un traitement ; et depuis peu, grâce à la loi du 2 mars 2010 créant une allocation journalière d'accompagnement d'une personne en fin de vie, de faire bénéficier d'un congé rémunéré les personnes qui souhaitent accompagner, à domicile, un proche en fin de vie. Ils ont encore permis le développement des soins palliatifs, même si trop peu de personne y ont encore accès aujourd'hui et même si cela ne modifie en rien les tendances lourdes de notre système de santé et de son financement qui privilégie la réduction des durées d'hospitalisation et la réalisation d'actes lourds - tout le contraire des soins palliatifs !
Aujourd'hui, notre législation permet donc de « laisser mourir », mais elle refuse toujours que l'on provoque délibérément la mort, même à la demande du malade.
Même si aujourd'hui, la loi prend un compte la plupart des situations, il reste toutefois la question des personnes dont l'arrêt du traitement ne suffit pas à les soulager, qui ne souhaitent pas être plongées dans le coma et demandent lucidement une aide active à mourir. Nous ne pouvons pas laisser aux médecins ni aux proches des malades le poids d'une telle responsabilité ; au contraire, nous devons l'assumer collectivement. Dans un Etat de droit, la seule solution est celle de la loi : une loi visant non pas à dépénaliser purement et simplement l'euthanasie mais à reconnaître une exception d'euthanasie strictement encadrée par le code de la santé publique. Les exemples étrangers, notamment belges et néerlandais, nous montrent qu'il n'y pas à craindre de dérives si l'aide active à mourir est bien encadrée.
Tel est l'objet de cette proposition de loi qui, tout en considérant la gravité de cet acte dont les conséquences sont importantes en termes d'éthique et de responsabilité, reconnaît à chacun le droit d'aborder la fin de vie dans le respect des principes d'égalité et de liberté qui sont le fondement de notre République.
PROPOSITION DE LOI
Article 1er
L'article L. 1110-9 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toute personne majeure, en phase avancée ou terminale d'une affection accidentelle ou pathologique grave et incurable, infligeant une souffrance physique ou psychique qui ne peut être apaisée et qu'elle juge insupportable, peut demander à bénéficier, dans les conditions strictes prévues au présent titre, d'une assistance médicalisée pour mourir. »
Article 2
Après l'article L-1111-10 du même code, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. .... - Lorsqu'une personne majeure, en phase avancée ou terminale d'une affection accidentelle ou pathologique grave et incurable, infligeant une souffrance physique ou psychique qui ne peut être apaisée et qu'elle juge insupportable, demande à son médecin traitant le bénéfice d'une aide active à mourir, celui-ci doit consulter l'équipe soignante et saisir sans délai au moins deux autres praticiens pour s'assurer de la réalité de la situation dans laquelle se trouve la personne concernée. Il peut également faire appel à tout autre membre du corps médical susceptible de les éclairer, dans les conditions définies par voie réglementaire.
« Le collège ainsi formé vérifie le caractère libre, éclairé et réfléchi de la demande présentée, lors d'un entretien au cours duquel ils informent l'intéressé des possibilités qui lui sont offertes par les soins palliatifs et l'accompagnement de fin de vie. Les médecins rendent leurs conclusions sur l'état de l'intéressé dans un délai maximum de huit jours.
« Lorsque les médecins constatent la situation d'impasse dans laquelle se trouve la personne, et le caractère libre, éclairé et réfléchi de sa demande, l'intéressé doit, s'il persiste, confirmer sa volonté en présence de la ou les personnes de confiance qu'il a désignées.
« Le médecin traitant respecte cette volonté. L'acte d'aide active à mourir pratiqué sous son contrôle ne peut avoir lieu avant l'expiration d'un délai de deux jours à compter de la date de confirmation de la demande. Toutefois, ce délai peut être abrégé à la demande de l'intéressé si les médecins précités estiment que cela est de nature à préserver la dignité de celui-ci.
« L'intéressé peut à tout moment révoquer sa demande.
« Les conclusions médicales et la confirmation de la demande sont versées au dossier médical. Dans un délai de quatre jours ouvrables à compter du décès, le médecin qui a apporté son concours à l'aide active à mourir adresse à la commission régionale de contrôle prévue à la présente section un rapport exposant les conditions du décès. À ce rapport sont annexés les documents qui ont été versés au dossier médical en application du présent article. »
Article 3
L'article L-1111-11 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 1111-11. - Toute personne majeure peut rédiger des directives anticipées pour le cas où elle serait un jour hors d'état d'exprimer sa volonté. Ces directives anticipées indiquent les souhaits de la personne relatifs à sa fin de vie. Elles sont révocables à tout moment.
« À condition qu'elles aient été établies moins de cinq ans avant l'état d'inconscience de la personne, le médecin doit en tenir compte pour toute décision la concernant.
« Dans ces directives, la personne indique ses souhaits en matière de limitation ou d'arrêt de traitement. Elle peut également indiquer dans quelles circonstances elle désire bénéficier d'une aide active à mourir telle que régie par le présent code. Elle désigne dans ce document la ou les personnes de confiance chargées de la représenter le moment venu. Les directives anticipées sont inscrites sur un registre national automatisé tenu par la Commission nationale de contrôle des pratiques relatives au droit de mourir dans la dignité, instituée par l'article L. 1111-14 du présent code. Toutefois, cet enregistrement ne constitue pas une condition de validité du document.
« Les modalités de gestion du registre et la procédure de communication des directives anticipées à la commission susvisée ou au médecin traitant qui en fait la demande sont définies par décret en Conseil d'État. »
Article 4
Après l'article L. 1111-13 du même code, sont insérés trois articles ainsi rédigés :
« Art. L. .... - Lorsqu'une personne, en phase avancée ou terminale d'une affection accidentelle ou pathologique grave et incurable, se trouve de manière définitive dans l'incapacité d'exprimer une demande libre et éclairée, elle peut néanmoins bénéficier d'une aide active à mourir à la condition que cette volonté résulte de ses directives anticipées établies dans les conditions mentionnées à l'article L. 1111-11. La ou les personnes de confiance saisissent de la demande le médecin traitant qui la transmet à deux autres praticiens au moins. Après avoir consulté l'équipe médicale et les personnes qui assistent au quotidien l'intéressé, et tout autre membre du corps médical susceptible de les éclairer dans les conditions définies par voie réglementaire, les médecins établissent, dans un délai de huit jours au plus, un rapport déterminant si l'état de la personne concernée justifie qu'il soit mis fin à ses jours.
« Lorsque le rapport conclut à la possibilité d'une aide active à mourir, la ou les personnes de confiance doivent confirmer sa demande en présence de deux témoins n'ayant aucun intérêt matériel ou moral au décès de la personne concernée. Le médecin traitant respecte cette volonté. L'acte d'aide active à mourir ne peut intervenir avant l'expiration d'un délai de deux jours à compter de la date de confirmation de la demande.
« Le rapport mentionné des médecins est versé au dossier médical de l'intéressé. Dans un délai de quatre jours ouvrables à compter du décès, le médecin qui a apporté son concours à l'aide active à mourir adresse à la commission régionale de contrôle prévue à la présente section un rapport exposant les conditions dans lesquelles celui-ci s'est déroulé.
« À ce rapport sont annexés les documents qui ont été versés au dossier médical en application du présent article, ainsi que les directives anticipées.
« Art. L. .... - Il est institué auprès du garde des sceaux, ministre de la justice, et du ministre chargé de la santé, un organisme dénommé «Commission nationale de contrôle des pratiques relatives aux demandes d'aide active à mourir». Il est institué dans chaque région une commission régionale présidée par le représentant de l'État. Elle est chargée de contrôler, chaque fois qu'elle est rendue destinataire d'un rapport d'aide active à mourir, si les exigences légales ont été respectées.
« Lorsqu'elle estime que ces exigences n'ont pas été respectées ou en cas de doute, elle transmet le dossier à la commission susvisée qui, après examen, dispose de la faculté de le transmettre au Procureur de la République. Les règles relatives à la composition ainsi qu'à l'organisation et au fonctionnement des commissions susvisées sont définies par décret en Conseil d'État.
« Art. L. .... - Est réputée décédée de mort naturelle en ce qui concerne les contrats où elle était partie la personne dont la mort résulte d'une aide active à mourir mise en oeuvre selon les conditions et procédures prescrites par le code de la santé publique. Toute clause contraire est réputée non écrite. »
Article 5
Le dernier alinéa de l'article L. 1110-5 du même code est complété par deux phrases ainsi rédigées :
« Les professionnels de santé ne sont pas tenus d'apporter leur concours à la mise en oeuvre d'une aide active à mourir ni de suivre la formation dispensée par l'établissement en application de l'article L. 1112-4. Le refus du médecin, ou de tout membre de l'équipe soignante, de prêter son assistance à une aide active à mourir est notifié à l'auteur de la demande. Dans ce cas, le médecin est tenu de l'orienter immédiatement vers un autre praticien susceptible de déférer à cette demande. »
Article 6
Le deuxième alinéa de l'article L. 1112-4 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Ils assurent également, dans le cadre de la formation initiale et continue des professionnels de santé, une formation sur les conditions de réalisation d'une aide active à mourir. »
Article 7
Les charges éventuelles qui résulteraient pour l'État de l'application de la présente loi sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés par les articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Sujet: Janvier 2011, échec d'une loi 06.03.12 10:24
PROPOSITION DE LOI
Aide active à mourir dans le respect des consciences et des volontés
Alain FOUCHÉ, Sénateur
Renvoyée à la commission des Affaires sociales
N° 65
2008-2009
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Ces dernières années, les cas de Vincent HUMBERT ou de Chantal SÉBIRE, pour ne citer que ceux-là parmi bien d'autres, ont ravivé le débat sur l'euthanasie.
Il est, en effet, manifeste qu'aujourd'hui, et malgré les avancées de la loi relative aux droits des malades et à la fin de vie, le droit français n'est pas adapté aux cas des personnes qui demandent lucidement une aide active à mourir. Le moment est donc venu de préciser le champ des droits de chacun sur sa fin de vie.
Quels que soient le lieu, les circonstances, les croyances philosophiques ou religieuses, mourir est une épreuve difficile pour la plupart des êtres humains, à plus forte raison, lorsque la mort s'accompagne de souffrances qui atteignent un degré tel qu'elles détruisent celui qui les subit au point d'enlever tout sens à sa fin de vie.
Alors que l'homme conduit sa vie dans la liberté, on est surpris de constater que, parvenu aux limites du supportable, il n'a pas le droit d'obtenir une réponse légale à sa demande de délivrance.
Contrairement aux dispositions pénales comme celles de l'Espagne et de la Suisse, contrairement aux législations néerlandaise et belge, le code pénal français ne fait aucune distinction entre la mort donnée à autrui par compassion et celle infligée dans la plus noire intention, qualifiée à juste titre d'assassinat et punie de la réclusion criminelle à perpétuité.
La loi n° 2005-370 du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie, permet de prendre en charge une partie des situations de souffrances et de détresse. Le droit de demander l'arrêt des soins ou de refuser les soins est un droit acquis, même s'il n'est pas toujours respecté. Cependant des situations d'extrême souffrance n'entrent pas dans le champ d'application de la loi.
Par ailleurs, il est incontestable que les soins palliatifs apportent dans l'accompagnement des mourants une solution appréciable et humaine. Cependant, même en espérant qu'ils puissent atteindre dans les années à venir un développement suffisant pour répondre aux besoins du plus grand nombre des malades, ils ne peuvent pas répondre à toutes les situations et n'apportent pas de solution à ceux qui, atteints de maladies incurables et invalidantes ou en situation pathologique irréversible, formulent le souhait de voir s'arrêter une vie jugée par eux vide de sens.
Entre les soins palliatifs et la possibilité de fixer le terme d'une vie devenue insupportable, il y a non pas contradiction mais souvent complémentarité : tel qui accepte avec reconnaissance des soins palliatifs peut bien, à partir d'un certain moment, souhaiter hâter une fin de vie qu'il ne peut provoquer seul.
De très nombreuses voix ne cessent de s'élever pour demander que soit reconnu un droit impossible à exercer dans les conditions actuelles de la législation française, celui d'une aide active à mourir.
Pourtant, et cela a été dit plus haut, l'exemple de certains pays, parmi nos voisins les plus proches, mérite d'être suivi. Même plus éloigné, le cas de l'Oregon est tout aussi exemplaire. En 1997, l'Oregon a été le premier Etat américain à autoriser les médecins à prendre des mesures actives pour abréger la vie de leurs patients. La loi de l'Oregon sur la mort dans la dignité permet à un patient atteint d'une maladie en phase terminale, c'est-à-dire dont l'espérance de vie est inférieure à six mois, d'obtenir que des médecins l'aident à mourir à condition :
- que ce patient soit un résident de l'Oregon âgé de 18 ans au moins ;
- qu'un médecin accepte de l'aider ;
- que ce médecin et un médecin consultant confirment le diagnostic de maladie en phase terminale ;
- qu'ils estiment que le patient est psychologiquement capable de formuler une telle demande ;
- que le patient soit informé de toutes les situations alternatives, telles que les soins palliatifs.
Aussi, la dépénalisation voulue par 9 Français sur 10 et 7 médecins sur 10 aurait, d'une part, le mérite de consacrer un droit individuel, un impératif de liberté, et d'autre part, permettrait de protéger les tiers intervenants.
Elle condamnerait, dès lors, tout acte d'aide à mourir qui ne serait pas pratiqué à la demande exclusive et réitérée d'un patient, ni réalisé dans le respect de conditions rigoureuses.
La présente proposition de loi ne vise en aucun cas à banaliser un acte qui engagera toujours l'éthique et la responsabilité de ses acteurs. Elle a pour but de remédier aux inégalités devant la mort et de fournir aux tribunaux les outils juridiques appropriés.
Elle permet, enfin, de reconnaître à chacun le droit d'aborder la fin de vie dans le respect des principes d'égalité et de liberté qui sont le fondement de notre République.
Tel est le sens de la présente proposition de loi que nous vous demandons, Mesdames, Messieurs, de bien vouloir adopter.
PROPOSITION DE LOI
Article 1er
L'article L. 1110-2 du code de la santé publique est ainsi rédigé :
« Art. L. 1110-2. - La personne malade a droit au respect de sa liberté et de sa dignité. Elle peut bénéficier, dans les conditions prévues au présent code, d'une aide active à mourir ».
Article 2
L'article L. 1110-9 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toute personne capable, en phase avancée ou terminale d'une affection reconnue grave et incurable ou placée dans un état de dépendance qu'elle estime incompatible avec sa dignité, peut demander à bénéficier, dans les conditions prévues au présent titre, d'une assistance médicalisée pour mourir. »
Article 3
Après l'article L. 1111-4-1 du même code, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. 1111-4-1. - Les professionnels de santé ne sont pas tenus d'apporter leur concours à la mise en oeuvre d'une aide active à mourir. Le refus du médecin de prêter son assistance à une aide active à mourir est notifié sans délai à l'auteur de la demande. Dans ce cas, le médecin est tenu de l'orienter immédiatement vers un autre praticien susceptible de déférer à cette demande. »
Article 4
Après l'article L. 1111-10-1 du même code, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. 1111-10-1. - Lorsqu'une personne, en phase avancée ou terminale d'une affection grave et incurable, ou placée du fait de son état de santé dans un état de dépendance qu'elle estime incompatible avec sa dignité, demande à son médecin traitant le bénéfice d'une aide active à mourir, celui-ci saisit sans délai un confrère indépendant pour s'assurer de la réalité de la situation dans laquelle se trouve la personne concernée.
« Les médecins ont la faculté de faire appel à tout autre membre du corps médical susceptible de les éclairer, dans les conditions définies par voie réglementaire. Ils vérifient le caractère libre, éclairé et réfléchi de la demande présentée, lors d'un entretien au cours duquel ils informent l'intéressé des possibilités qui lui sont offertes par les soins palliatifs et l'accompagnement de fin de vie. Les médecins rendent leurs conclusions sur l'état de l'intéressé dans un délai maximum de huit jours.
« Lorsque les médecins constatent la situation d'impasse dans laquelle se trouve la personne, et le caractère libre, éclairé et réfléchi de sa demande, l'intéressé doit, s'il persiste, confirmer sa volonté en présence de sa personne de confiance.
« Le médecin traitant respecte cette volonté. L'acte d'aide active à mourir pratiqué sous son contrôle ne peut avoir lieu avant l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de la date de confirmation de la demande. Toutefois, ce délai peut être abrégé à la demande de l'intéressé si les médecins précités estiment que cela est de nature à préserver la dignité de celui-ci.
« L'intéressé peut à tout moment révoquer sa demande.
« Les conclusions médicales et la confirmation de la demande sont versées au dossier médical. Dans un délai de quatre jours ouvrables à compter du décès, le médecin qui a apporté son concours à l'aide active à mourir, adresse à la commission régionale de contrôle prévue à l'article L. 1111-14 un rapport exposant les conditions du décès. À ce rapport sont annexés les documents qui ont été versés au dossier médical en application du présent article. »
Article 5
L'article L. 1111-11 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 1111-11. - Toute personne majeure peut rédiger des directives anticipées pour le cas où elle serait un jour hors d'état d'exprimer sa volonté. Ces directives anticipées indiquent les souhaits de la personne relatifs à sa fin de vie. Elles sont révocables à tout moment. À condition qu'elles aient été établies moins de trois ans avant l'état d'inconscience de la personne, le médecin doit en tenir compte pour toute décision la concernant.
« Dans ces directives, la personne indique ses souhaits en matière de limitation ou d'arrêt de traitement. Elle peut également indiquer dans quelles circonstances elle désire bénéficier d'une aide active à mourir telle que régie par le présent code. Elle désigne dans ce document la personne de confiance chargée de la représenter le moment venu.
« Les directives anticipées sont inscrites sur un registre national automatisé tenu par la Commission nationale de contrôle des pratiques en matière d'aide active à mourir. Toutefois, cet enregistrement ne constitue pas une condition de validité du document.
« Les modalités de gestion du registre et la procédure de communication des directives anticipées à la Commission susvisée ou au médecin traitant qui en fait la demande sont définies par décret en Conseil d'État. »
Article 6
Après l'article L. 1111-13-1 du même code, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. 1111-13-1. - Lorsqu'une personne, en phase avancée ou terminale d'une affection grave et incurable, se trouve dans l'incapacité d'exprimer une demande libre et éclairée, elle peut néanmoins bénéficier d'une aide active à mourir à la condition que cette volonté résulte de ses directives anticipées établies dans les conditions mentionnées à l'article L. 1111-11.
« La personne de confiance saisit de la demande le médecin traitant qui la transmet sans délai à un confrère indépendant. Après avoir consulté l'équipe médicale et les personnes qui assistent au quotidien l'intéressé, et tout autre membre du corps médical susceptible de les éclairer dans les conditions définies par voie réglementaire, les médecins établissent, dans un délai de quinze jours au plus, un rapport déterminant si l'état de la personne concernée justifie qu'il soit mis fin à ses jours.
« Lorsque le rapport conclut à la possibilité d'une aide active à mourir, la personne de confiance doit confirmer sa demande en présence de deux témoins n'ayant aucun intérêt matériel ou moral au décès de la personne concernée. Le médecin traitant respecte cette volonté. L'acte d'aide active à mourir ne peut intervenir avant l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de la date de confirmation de la demande. Toutefois, ce délai peut être abrégé à la demande de la personne de confiance si les médecins précités estiment que cela est de nature à préserver la dignité de la personne.
« Le rapport mentionné des médecins est versé au dossier médical de l'intéressé.
« Dans un délai de quatre jours ouvrables à compter du décès, le médecin qui a apporté son concours à l'aide active à mourir adresse à la commission régionale de contrôle prévue à l'article L. 1111-14 un rapport exposant les conditions dans lesquelles celui-ci s'est déroulé. À ce rapport sont annexés les documents qui ont été versés au dossier médical en application du présent article, ainsi que les directives anticipées. »
Article 7
Après l'article L. 1111-13 du même code, il est inséré un article ainsi rédigé : « Art. L. 1111-14. - Il est institué auprès du garde des Sceaux, ministre de la justice, et du ministre chargé de la santé, un organisme dénommé « Commission nationale de contrôle des pratiques en matière d'aide active à mourir ».
« Il est institué dans chaque région une commission régionale présidée par le préfet de région ou son représentant. Elle est chargée de contrôler, chaque fois qu'elle est rendue destinataire d'un rapport d'aide active à mourir, si les exigences légales ont été respectées. Lorsqu'elle estime que ces exigences n'ont pas été respectées ou en cas de doute, elle transmet le dossier à la Commission susvisée qui, après examen, dispose de la faculté de le transmettre au Procureur de la République.
« Les règles relatives à la composition ainsi qu'à l'organisation et au fonctionnement des Commissions susvisées sont définies par décret en Conseil d'État. »
Article 8
Après l'article L. 1111-13 du même code, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. 1111-15. - Est réputée décédée de mort naturelle en ce qui concerne les contrats où elle était partie la personne dont la mort résulte d'une aide active à mourir mise en oeuvre selon les conditions et procédures prescrites par le code de la santé publique. Toute clause contraire est réputée non écrite. »
Sujet: JANVIER 2011 échec d'une loi 27.03.12 13:13
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2010-2011
Enregistré à la Présidence du sénat le 13 octobre 2010
PROPOSITION DE LOI relative à l'euthanasie volontaire,
PRÉSENTÉE
Par MM. Guy FISCHER, François AUTAIN, Mmes Annie DAVID, Odette TERRADE, Marie-Agnès LABARRE, MM. Bernard VERA, Michel BILLOUT, Jack RALITE, Ivan RENAR, Gérard LE CAM, Mmes Mireille SCHURCH, Brigitte GONTHIER-MAURIN, Isabelle PASQUET, Marie-France BEAUFILS, M. Robert HUE, Mme Josiane MATHON-POINAT et M. Jean-François VOGUET,
Sénateurs
(Envoyée à la commission des affaires sociales, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
L'éthique et la pratique médicales ont connu en France, au cours des quatre dernières décennies, de profondes évolutions offrant à nos concitoyens toujours plus d'autonomie et de liberté. Ainsi, aujourd'hui, plus personne ne conteste sérieusement les bienfaits de la contraception, de l'interruption volontaire de grossesse, du prélèvement d'organes sur les êtres vivants, de la procréation médicalement assistée, de la stérilisation à caractère non thérapeutique par ligature des trompes ou par vasectomie...
Il reste pourtant une dernière liberté à conquérir : la liberté pour les personne atteintes d'une maladie incurable de recourir une euthanasie volontaire. On entend par ce terme l'acte médical visant à accélérer la mort d'un malade qui en a fait la demande, dans le but d'abréger ses souffrances.
Les législateurs ont progressivement pris conscience de l'importance de cette question. À cet égard la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des patients, en reconnaissant à ces derniers le droit de refuser toute investigation sur leur personne ou toute thérapeutique alors même que leur refus pourrait mettre leur vie en danger, a constitué une réelle avancée. Elle ne règle pas, hélas, toutes les situations ; les cas de Vincent HUMBERT et Chantale SEBIRE sont malheureusement là pour nous le rappeler.
Elle a à tout le moins permis au patient de passer du rôle de spectateur à celui d'acteur de sa maladie en lui reconnaissant ce que l'on pourrait qualifier de droit à l'euthanasie passive, laquelle vise à le laisser mourir en interrompant le traitement en cours pourtant nécessaire à son maintien en vie.
La réitération de ce principe par la loi du 22 avril 2005 et son application n'ont pas donné pour autant aux patients la liberté d'être les acteurs de leur propre mort.
La sédation terminale, qui est la technique la plus pratiquée dans les unités de soins intensifs, est loin d'être satisfaisante : cette méthode, qui consiste à « faire dormir le patient », n'est en fait qu'une euthanasie active que le médecin refuse d'assumer au plus grand préjudice de la personne concernée. De surcroît, la mort désirée par la personne malade ne survient qu'après une période qui peut être plus ou moins longue selon son état au moment de sa mise en sommeil, l'arrêt ou non de l'hydratation et les complications éventuelles. Certes, cette solution satisfait à la demande du patient de ne plus vivre ; elle ne satisfait pourtant pas à celle, légitime, d'une fin de vie calme, rapide et digne.
Enfin, il est flagrant de constater que, dans les pays s'étant dotés d'une législation autorisant l'euthanasie volontaire, son entrée en vigueur, loin de limiter la création de centres de soins palliatifs, a tout au contraire favoriser le développement de ces derniers. Dans le nôtre, en dépit de la législation existante en matière d'accès aux soins palliatifs, trop peu de personnes peuvent dans les faits en bénéficier.
Si nous comprenons que des professionnels de santé se refusent à pratiquer un acte d'euthanasie, nous considérons que ce refus, d'ordre personnel, ne doit pas avoir pour conséquence de priver le patient atteint d'une maladie incurable du droit fondamental de choisir le moment et les conditions de sa propre mort.
Plus largement, ceux qui sont opposés à l'euthanasie considèrent que cette dernière n'entrerait pas dans la catégorie des soins car elle ne vise pas à rendre « la santé au malade ».
Une telle objection n'est pas sans contradictions : s'interroger sur la portée de l'acte réalisé par le médecin pour le limiter à la seule amélioration de l'état de santé du patient remet en effet en question l'existence même des soins palliatifs qui, eux non plus, n'ont pas de visées curatives.
Pour notre part, nous considérons que la mort est inhérente à la vie et qu'elle n'est pas toujours la conséquence d'un dysfonctionnement physiologique. Ainsi le rapport du médecin à la mort est-il double : s'il est de son devoir d'éviter à son patient de succomber aux conséquences d'une affection curable, il lui revient aussi de l'aider dans cette phase naturelle et normale de la vie qu'est la mort.
Aussi nous estimons que l'euthanasie ne contrevient pas au serment d'Hippocrate, bien au contraire : il place, jusqu'à la limite ultime, le patient au coeur des actes médicaux réalisés par le médecin.
La volonté de placer la dignité des personnes malades au coeur des pratiques médicales nous conduit à déposer cette proposition de loi visant à la création, à l'instar de ce qui existe en Belgique et aux Pays-Bas, d'un droit à l'euthanasie volontaire. Encadré par une législation la protégeant des dérives, ce nouveau droit permettra de garantir à toute personne malade le respect en toute circonstance de son humanité et de sa dignité.
PROPOSITION DE LOI
Article 1er
L'article L. 1110-2 du code de la santé publique est ainsi rédigé :
« La personne malade a droit au respect de sa dignité et des choix qu'elle opère librement.
« À ce titre, elle peut bénéficier, dans les conditions définies dans le présent code, d'une aide active médicalisée à mourir, appelée euthanasie volontaire. »
Article 2
L'article L. 1110-9 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toute personne capable, en phase avancée ou terminale d'une affection reconnue grave et incurable quelle qu'en soit la cause ou placée dans un état de dépendance qu'elle estime incompatible avec sa dignité, peut demander à bénéficier d'une euthanasie volontaire. »
Article 3
Après l'article L. 1111-4 du même code, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. .... - Les professionnels de santé ne sont pas tenus d'apporter leur concours à la mise en oeuvre d'un acte d'euthanasie volontaire.
« Le refus du professionnel de santé est notifié sans délai à l'auteur de cette demande ou, le cas échéant, à sa personne de confiance. Afin d'éviter que son refus n'ait pour conséquence de priver d'effet cette demande, il est tenu de l'orienter immédiatement vers un autre praticien susceptible d'y déférer. »
Article 4
Après l'article L. 1111-10 du même code, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L... . - Une personne, en phase avancée ou terminale d'une affection grave et incurable, ou placée du fait de son état de santé dans un état de dépendance qu'elle estime incompatible avec sa dignité peut demander à son médecin traitant ou à tout médecin de premier recours le bénéfice d'une euthanasie.
« Le médecin, saisi de cette demande, saisit sans délai un confrère indépendant pour s'assurer de la réalité de la situation médicale dans laquelle se trouve la personne concernée. Ils vérifient, à l'occasion d'un entretien avec la personne malade, le caractère libre, éclairé et réfléchi de sa demande.
« Ils informent la personne malade des possibilités qui lui sont offertes de bénéficier des dispositifs de soins palliatifs compatibles avec sa situation.
« Dans un délai maximum de huit jours suivant la première rencontre commune de la personne malade, les médecins lui remettent, en présence de sa personne de confiance, un rapport faisant état de leurs conclusions sur l'état de santé de l'intéressé.
« Si les conclusions des médecins attestent au regard des données acquises de la science que l'état de santé de la personne malade est incurable ; que sa demande est libre, éclairée et réfléchie et qu'ils constatent à l'occasion de la remise de leurs conclusions que l'intéressé persiste, en présence da sa personne de confiance, dans sa demande, alors, le médecin traitant doit respecter la volonté de la personne malade.
« L'intéressé peut à tout moment révoquer sa demande.
« L'acte d'euthanasie est réalisée sous le contrôle du médecin traitant ou de premier recours qui a reçu la demande de l'intéressé et a accepté de l'accompagner dans sa démarche et ne peut avoir lieu avant l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de la date de confirmation de sa demande.
« Toutefois, si la personne malade en fait la demande, et que les médecins précités estiment que la dégradation de l'état de santé de la personne intéressée le justifie, ce délai peut être abrégé ; la personne peut à tout moment révoquer sa demande.
« Les conclusions médicales et la confirmation de la demande sont versées au dossier médical de la personne. Dans un délai de quatre jours ouvrables à compter du décès, le médecin qui a apporté son concours à l'acte d'euthanasie, adresse à la commission régionale de contrôle prévue dans le présent code, un rapport exposant les conditions du décès. À ce rapport sont annexés les documents qui ont été versés au dossier médical en application du présent article. »
Article 5
L'article L. 1111-11 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 1111-11. - Toute personne majeure peut rédiger des directives anticipées, appelées « testament de vie » pour le cas où elle serait un jour hors d'état d'exprimer sa volonté. Ces directives anticipées indiquent les souhaits de la personne relatifs à sa fin de vie. Elles sont révocables à tout moment.
« Le testament de vie établi moins de trois ans avant la situation d'inconscience de son auteur s'impose aux médecins.
« La personne y indique ses souhaits en matière de limitation ou d'arrêt de traitement. Elle doit désigner également dans quelles circonstances elle désire bénéficier d'une euthanasie telle que définie dans le présent code. Elle précise également dans son testament de vie la personne qu'elle considère être sa personne de confiance au sens de l'article L. 1111-6 afin qu'elle la représente pour le cas où elle ne serait plus en capacité de faire valoir elle-même ses propres volontés.
« Les testaments de vie sont inscrits sur un registre national automatisé dont la gestion est confiée à la Commission Nationale de Contrôle des Pratiques en matière d'euthanasie volontaire. Toutefois, cette condition de forme ne peut être opposée à la recevabilité du document visé à cet article.
« Les modalités de gestion du registre et la procédure de communications des testaments de vie à la commission visée à cet article ou au médecin traitant qui en fait la demande sont définies par décret. »
Article 6
Après l'article L. 1111-13 du même code sont insérés trois articles ainsi rédigés :
« Art. L. ... - Une personne en phase avancée ou terminale d'une affection grave et incurable, qui se trouve dans l'incapacité physique d'exprimer une demande libre et éclairée peut bénéficier d'une euthanasie dès lors qu'elle a expressément, et par écrit, fait part de cette volonté dans un testament de vie visé à l'article L. 1111-11.
« La personne de confiance désignée dans ce document saisit de la demande le médecin traitant qui la transmet sans délai à un confrère indépendant. Après avoir consulté l'équipe médicale et les personnes qui assistent quotidiennement l'intéressé et tout autre membre du corps médical susceptible de les éclairer, les médecins établissent dans un délai de quinze jours au plus, un rapport dont les conclusions précisent si l'état de la personne auteur du testament de vie justifie, conformément à sa volonté, le bénéfice d'une euthanasie.
« Lorsque le rapport conclut à l'adéquation entre la demande d'euthanasie exprimée par la personne dans son testament de vie et sa situation médicale, la personne de confiance doit confirmer cette demande, en présence de deux témoins n'ayant aucun intérêt matériel ou moral au décès de la personne concernée.
« L'euthanasie ne peut intervenir avant l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de la date de confirmation de la demande.
« Toutefois, ce délai peut être abrégé à la demande de la personne de confiance si les médecins précités dans cet article estiment que cela est de nature à préserver la dignité de la personne et dans le respect de son testament de vie.
« Le rapport mentionné est versé au dossier médical de l'intéressé.
« Dans un délai de quatre jours ouvrables à compter du décès, le médecin qui a apporté son concours à l'euthanasie de la personne malade adresse à la commission régionale de contrôle prévue au présent code, un rapport exposant les conditions dans lesquelles cette euthanasie s'est déroulée. À ce rapport sont annexés les documents qui ont été versés au dossier médical en application du présent article, ainsi que le testament de vie de la personne malade.
« Art. L. ... - Il est institué auprès du garde des Sceaux, ministre de la justice, et du ministre chargé de la santé, un organisme dénommé « Commission nationale de contrôle des pratiques en matière d'euthanasie volontaire ».
« Il est institué dans chaque région une commission régionale présidée par le préfet de région ou son représentant. Elle est chargée de contrôler, chaque fois qu'elle est rendue destinataire d'un rapport d'euthanasie volontaire, si les exigences légales ont été respectées. Lorsqu'elle estime que ces exigences n'ont pas été respectées ou en cas de doute, elle transmet le dossier à la Commission susvisée qui, après examen, dispose de la faculté de le transmettre au Procureur de la République.
« Les règles relatives à la composition ainsi qu'à l'organisation et au fonctionnement des Commissions susvisées sont définies par décret en Conseil d'État.
« Art. L. ... - Est réputée décédée de mort naturelle en ce qui concerne les contrats où elle était partie la personne dont la mort résulte d'une euthanasie volontaire mise en oeuvre selon les conditions et procédures prescrites par le code de la santé publique. Toute clause contraire est réputée non écrite.
Sujet: Re: Janvier 2011 fin de vie échec d'une loi 27.03.12 14:04
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Sujet: Re: Janvier 2011 fin de vie échec d'une loi 27.03.12 15:22
Le texte légalisant l'euthanasie retoqué au Sénat
La fin de vie en débat. Les sénateurs examinent ce mardi une proposition de loi très controversée légalisant l'euthanasie. Un sujet de société qui dépasse les clivages politiques, puisque le texte est proposé par des élus de tous bords. Un texte dont les chances d'aboutir sont désormais minces, puisque déjà vidé de son contenu : selon plusieurs participants, la commission des Affaires sociales du Sénat a adopté dans la matinée deux amendements qui suppriment l'article premier du texte visant à légaliser cette pratique. Le gouvernement, par la voix de François Fillon, s'était dit opposé à une telle législation. Légalement, à ce jour, c'est la Loi Leonetti qui prévaut ; en date de 2005, elle a instauré un droit au "laisser mourir", qui favorise les soins palliatifs et envisage la limitation du traitement du malade en fin de vie.
Anne Le Henaff Anne Le Henaff et Vincent Parizot publié le 25/01/2011 à 18:16
Le texte examiné par le Sénat stipule, dans son premier article, que "toute personne capable majeure, en phase avancée ou terminale d'une affection accidentelle ou pathologique grave et incurable, lui infligeant une souffrance physique ou psychique qui ne peut être apaisée ou qu'elle juge insupportable, peut demander à bénéficier (...) d'une assistance médicalisée permettant, par un acte délibéré, une mort rapide et sans douleur". Deux amendements identiques, qui suppriment cet article instaurant le principe de la légalisation de l'euthanasie, présentés par la sénatrice UMP de Paris Marie-Thérèse Hermange et par le sénateur RDSE (à majorité Radicaux de gauche) Gilbert Barbier, ont d'abord été adoptés.
Ensuite six autres amendements de suppression des six autres articles de la proposition de loi, présentés par Gilbert Barbier ont reçu un avis favorable de la commission. La présidente centriste de la commission, Muguette Dini, et le rapporteur du texte, Jean-Pierre Godefroy qui étaient contre ces amendements ont été mis en minorité. Ces amendements dit "extérieurs" - c'est-à-dire présentés après l'adoption du texte en commission - doivent toutefois être représentés et revotés lors de l'examen du texte en séance publique dans la soirée. Mais ils seront assortis d'un avis favorable de la commission et d'un appui de la majorité de l'UMP ce qui leur donne une grande chance d'être adoptés.
Cette même commission des Affaires sociales avait adopté le 18 janvier par 25 voix, 19 contre, et deux abstentions, une proposition de loi droite-gauche visant à légaliser l'euthanasie, suscitant un large débat dans la classe politique.
Un texte qui dépasse les clivages politiques
La proposition de loi examinée ce mardi par le Sénat a été adoptée le 18 janvier par la commission des Affaires sociales du Sénat (25 voix pour, 19 contre et 2 abstentions). Elle est le résultat de la fusion de trois textes allant dans le même sens, émanant l'un de Jean-Pierre Godefroy (PS), l'autre d'Alain Fouché (UMP) et le troisième des sénateurs CRC-SPG (communistes et Parti de Gauche) François Autain et Guy Fischer. Elle ne devrait pas être voté par la Chambre haute, compte tenu de l'opposition d'une majorité du groupe UMP. L'Alliance pour les droits de la vie a prévu de manifester mardi devant le Sénat contre la proposition de loi.
A l'initiative du député UMP Jean-Marc Nesme, des parlementaires ont constitué une "Entente parlementaire visant à refuser l'euthanasie et à développer un accès aux soins palliatifs". A l'inverse, Jean-Luc Romero, président de l'Association pour le droit à mourir dans la dignité (ADMD) et conseiller régional PS d'Ile-de-France, a applaudi ce texte. "Pour la première fois de l'histoire de notre pays, une première étape parlementaire est franchie en faveur d'une loi de légalisation d'une aide active à mourir", a renchéri l'ADMD dans un communiqué, parlant de "première victoire de la liberté face à l'obscurantisme".
Les adversaires de la légalisation de l'euthanasie ont mis en outre l'accent sur le risque "d'une judiciarisation toujours plus accrue à l'encontre du corps médical", et d'une coupure du lien "de confiance nécessaire entre le médecin et son patient".
Fillon dit "non" à l'euthanasie
Pour l'occasion, le Premier ministre s'est exprimé dans une tribune au "Monde" (daté 25 janvier 2011). "La question est de savoir si la société est en mesure de légiférer pour s'accorder le droit de donner la mort. J'estime que cette limite ne doit pas être franchie", écrit François Fillon, pour qui cependant dans ce débat "aucune conviction n'est indigne". Mais, poursuit-il, ce débat "doit être abordé en tenant compte des efforts entrepris" depuis 2008 lorsque Nicolas Sarkozy "a fait de la prise en charge des personnes en fin de vie une priorité absolue".
Jeudi dernier, le président du Sénat, Gérard Larcher (UMP), a affirmé qu'à titre personnel, il ne voterait pas la proposition de loi. Ce débat sur l'euthanasie "doit nous permettre d'accentuer l'évaluation de la loi", a-t-il ajouté, en regrettant que "l'on ait tendance à changer la loi avant même d'évaluer l'impact" de la précédente. Il a fait valoir en outre que, sur l'objectif de 3.000 lits dévolus aux soins palliatifs fixé par la loi Leonetti, "on en était encore à un peu moins d'un tiers".
Sujet: Re: Janvier 2011 fin de vie échec d'une loi 18.06.12 10:04
Fin de vie : plaidoyer pour un dialogue serein et un débat responsable
Légaliser l'aide active à mourir serait une erreur, estime le premier ministre.
Le Monde.fr | 24.01.2011 à 10h55 • Mis à jour le 25.01.2011 à 10h12 | Par François Fillon, premier ministre
Je n'ai jamais été confronté personnellement à l'épreuve terrible de devoir accompagner la fin de vie d'un être aimé, réduit à une souffrance insupportable et dont le diagnostic médical est sans appel. Je me souviens avoir été bouleversé par le témoignage douloureux de Marie Humbert. Je mesure les arguments de ceux qui, ayant traversé cette épreuve, s'interrogent sur la nécessité d'écourter la vie. Mais la question est de savoir si la société est en mesure de légiférer pour s'accorder le droit de donner la mort. J'estime que cette limite ne doit pas être franchie! Pour autant, je sais que c'est un débat où aucune conviction n'est indigne.
Ce débat, si vif il y a quelques années au regard de nos retards en matière de soins palliatifs et de lutte contre la souffrance, doit aujourd'hui être abordé en tenant compte des efforts entrepris.
En juin 2008, le président de la République a fait de la prise en charge des personnes en fin de vie une "priorité absolue". Ce choix a donné lieu à un programme de développement des soins palliatifs dont le pilotage a été confié au docteur Régis Aubry, spécialiste reconnu dans la prise en charge palliative. Il prévoit, en particulier, le passage en quatre ans de 100 000 à 200 000 du nombre de patients en fin de vie pris en charge et la création de 1200nouveaux lits de soins palliatifs dans les hôpitaux. Le gouvernement s'est également engagé à appliquer les recommandations issues du rapport de Jean Leonetti de décembre 2008 sur la fin de vie. Ici encore, les engagements sont tenus. J'en prendrai deux exemples.
Le code de déontologie médicale a été modifié pour préciser, d'une part, les contours de la procédure collégiale encadrant les décisions d'arrêt des traitements en fin de vie et, d'autre part, les modalités de mise en œuvre de la sédation palliative sur les personnes ne pouvant exprimer leur souffrance.
Une allocation d'accompagnement d'une personne en fin de vie a été instituée par la loi du 2mars 2010. Cette allocation, d'un montant de 53 euros par jour pendant vingt et un jours, concerne l'ensemble des salariés bénéficiant d'un congé de solidarité familiale ou qui l'ont transformé en période d'activité à temps partiel.
Notre stratégie est donc claire : c'est celle du développement résolu des soins palliatifs et du refus de l'acharnement thérapeutique! Je n'oublie pas d'ailleurs que cette volonté prolonge celle qui avait présidé à l'institution, en France, du droit d'accéder à des soins palliatifs et à un accompagnement par la loi du 9 juin 1999 sous le gouvernement de Lionel Jospin.
La question de la légalisation en France de l'euthanasie est revenue ces derniers jours dans le débat public, à l'occasion de l'adoption d'une proposition de loi par la commission des affaires sociales du Sénat. La Haute Assemblée sera amenée à se prononcer sur ce texte cette semaine. Dissipons tout de suite un malentendu. "Aide active à mourir", "assistance médicalisée pour mourir" : derrière les formules, c'est bien la question de l'euthanasie, c'est-à-dire celle de l'acte consistant à mettre fin à la vie d'une personne, qui est posée, et il appartient à chacun, en conscience, d'en mesurer toutes les conséquences.
Le dispositif prévu par ce texte n'offre pas les garanties nécessaires. La multiplication des définitions données de la fin de vie ainsi que des procédures applicables introduit des ambiguïtés, sources d'insécurité juridique. La mise en œuvre de l'acte d'euthanasie n'est elle-même entourée que de conditions imprécises. La proposition de loi ne prévoit aucune obligation explicite de consultation, ni même d'information de la famille du malade.
Mais surtout, un tel dispositif me paraît être très dangereux. Dans la proposition de loi, le contrôle des actes ne serait effectué qu'a posteriori par une commission. Un tel mécanisme ne manquerait pas de créer une hétérogénéité des pratiques, d'une région, voire d'un territoire, à l'autre. Dangereux pour les droits des personnes en fin de vie, le dispositif prévu le serait également pour les soignants. Ceux-ci se retrouveraient, en effet, seuls face à l'incertitude d'un risque pénal lourd. Le Conseil national de l'ordre des médecins a d'ailleurs exprimé son rejet de cette proposition de loi.
Face à ces risques majeurs, nous avons à faire preuve de responsabilité. Sur un sujet qui touche au sens profond que nous donnons au désir de vivre ou à la volonté de mourir, il n'y a pas de débat interdit, au contraire, car le débat sur la fin de vie est un débat de nature politique, au sens le plus noble du terme. A titre personnel, je suis hostile à la légalisation d'une aide active à mourir ; ce n'est pas ma conception du respect de la vie humaine et des valeurs qui fondent notre société. Mais je sais aussi combien la question de la souffrance en fin de vie est complexe et ne peut se résumer à quelques idées simples. Il ne s'agit pas de s'envoyer des anathèmes ou de se crisper sur des positions ou des tabous, de part et d'autre. Nous devons dialoguer en confiance et entendre, avec respect, les arguments de chacun. Mais il y a une méthode à proscrire, c'est celle de la précipitation.
Sur ces questions si profondes, aux résonances éthiques si larges, aux conséquences sociales et médicales si lourdes, ce ne sont pas les sondages ou les humeurs de l'instant qui doivent nous guider. C'est bien de vie et de mort qu'il s'agit. C'est bien du prix de ces derniers instants, profondément humains même quand l'espoir d'une guérison a disparu, qu'il est question. La France avait un retard immense sur la prise en charge de la fin de la vie que nous sommes en train de combler dans un esprit constructif et consensuel. Et ce consensus est d'autant plus remarquable que l'émotion peut être forte et légitime à l'égard de drames humains et familiaux qui heurtent la sensibilité des Français.
Nous devons aborder ces sujets avec toute la gravité qu'ils exigent. L'Observatoire national de la fin de vie, créé en février 2010, a pour mission de renforcer les connaissances sur les conditions de la fin de vie et sur les pratiques médicales qui s'y rattachent. Ses travaux s'appuieront notamment sur les leçons à tirer des expériences étrangères. Celles-ci doivent d'ailleurs être analysées attentivement : depuis 2002, la Belgique enregistre une croissance du nombre de cas d'euthanasie, passant de 24 à 822 en 2009. Chacun doit donc mesurer les risques en cause au moment de se prononcer sur l'adoption en France d'un dispositif qui serait moins précis et circonscrit que celui en vigueur en Belgique.
Je veux d'ailleurs souligner que la loi relative aux droits des malades et à la fin de vie du 22 avril 2005 donne un cadre permettant d'apporter des réponses adaptées aux situations de fin de vie en proscrivant l'obstination déraisonnable de soins, en autorisant la limitation ou l'arrêt de traitement ainsi que l'usage des antalgiques. Cette loi a également reconnu le droit du malade à demander une limitation ou un arrêt de traitement. Et lorsque le malade est inconscient, sa volonté exprimée préalablement dans des directives anticipées et à travers le témoignage de sa personne de confiance, de sa famille et de ses proches doit être respectée.
Plutôt que de légiférer dans la précipitation, plutôt que de trancher sans prudence et sans recul une question fondamentale, nous devons poursuivre le renforcement de la culture palliative en France, mettre en œuvre scrupuleusement le programme de développement des soins palliatifs et approfondir le débat sur la prise en charge de la fin de vie. Ce débat pourrait avoir lieu dans les prochains mois dans le cadre de l'Observatoire national de la fin de vie. C'est ainsi que nous répondrons de façon la plus juste au digne et difficile débat de la fin de vie
Sujet: JANVIER 2011 échec d'une loi 09.07.12 19:00
La bataille sur l'euthanasie fait rage autour d'un texte du Sénat
La commission des affaires sociales du Sénat a adopté, mardi matin, un amendement qui supprime l'article premier du texte visant à légaliser l'euthanasie. La proposition doit être examinée par le Sénat mardi soir.
Le Monde.fr avec AFP | 25.01.2011 à 11h07 • Mis à jour le 25.01.2011 à 20h54
image: http://s2.lemde.fr/image2x/2011/01/25/534x267/1470494_3_6881_des-personnes-participent-a-un-rassemblement.jpg Des personnes participent à un rassemblement pour s'opposer à un texte légalisant l'euthanasie, mardi 25 janvier à Paris, près du Sénat. La proposition de loi pour légaliser l'euthanasie est au centre d'une bataille acharnée. Le groupe UMP tente de la vider de sa substance, alors que la proposition doit être examinée mardi 25 janvier, dans la soirée, au Sénat.
Mardi matin, coup de théâtre. Après avoir adopté la proposition de loi, la commission des affaires sociales fait volte-face : elle donne un avis favorable à des amendements de suppression présentés par deux sénateurs UMP et RDSE, à majorité Radicaux de gauche.
Ces amendements dit "extérieurs" – c'est-à-dire présentés après l'adoption du texte en commission – doivent toutefois encore être approuvés en séance publique. Ils seront assortis d'un avis favorable de la commission et d'un appui de la grande majorité de l'UMP, ce qui leur donne une grande chance d'être adoptés.
Mais ce sont les centristes qui seront les arbitres de la majorité, laissant une inconnue planer sur l'issue du vote, car une très grande majorité du PS, du CRC-SPG – communiste et Parti de gauche – et du RDSE votera pour.
Lundi, c'est le premier ministre, François Fillon, qui s'était clairement opposé au texte dans une tribune au Monde, appuyé par plusieurs ministres.
UNE PROPOSITION ADOPTÉE AUPARAVANT
Pourtant, le 18 janvier, cette même commission des affaires sociales avait adopté par 25 voix contre 19 (deux abstentions) la proposition de loi destinée à légaliser l'euthanasie. Ce texte est le résultat de la fusion de trois textes allant dans le même sens, émanant l'un de Jean-Pierre Godefroy (PS), l'autre d'Alain Fouché (UMP) et le troisième des sénateurs Guy Fischer et François Autain (CRC-SPG).
L'article premier de ce texte, considéré comme l'article-clé, indique que "toute personne capable majeure, en phase avancée ou terminale d'une affection accidentelle ou pathologique grave et incurable, lui infligeant une souffrance physique ou psychique qui ne peut être apaisée ou qu'elle juge insupportable, peut demander à bénéficier (...) d'une assistance médicalisée permettant, par un acte délibéré, une mort rapide et sans douleur".
"DANS LA PRÉCIPITATION"
Marie-Thérèse Hermange, la sénatrice UMP qui a présenté les amendements vidant le texte de sa substance, a estimé que la proposition de loi avait été adoptée en commission, le 18 janvier, "dans la précipitation". "Comment par exemple définit-on la souffrance, notamment psychique, pour le parent qui a un enfant autiste, schizophrène ou maniaco-dépressif ?", s'est-elle interrogée.
Pour les auteurs de la proposition de loi, il s'agit de compléter la loi Leonetti de 2005 sur la fin de vie qui autorise les médecins à une forme de "laisser mourir" en soulageant la douleur d'un patient, quitte à abréger sa vie. Leur texte stipule que c'est au patient lui-même de décider du moment de sa mort.
On ne peut plus réservé, M. Leonetti a plaidé "pour une culture du doute collectif" sur la fin de vie. "Il n'y a pas des pays en avance et la France en retard", a-t-il encore argumenté.
PAS D'UNANIMITÉ À GAUCHE
Mais à gauche non plus, la proposition ne fait pas l'unanimité. Le sénateur et ex-garde des sceaux Robert Badinter a exprimé sa réserve, tout comme la candidate à la primaire socialiste, Ségolène Royal. La première secrétaire du PS, Martine Aubry, a prôné le vote du texte, comme le chef de file des sénateurs PS, Jean-Pierre Bel ou Manuel Valls, auteur d'une proposition de loi similaire rejetée fin 2009 à l'Assemblée.
Opposés au texte, quelques centaines de membres de l'Alliance pour les droits de la vie, enveloppés dans des "linceuls" de tulle blanc, ont organisé un happening à la mi-journée devant le Sénat pour manifester leur opposition. De son côté, l'Association pour le droit à mourir dans la dignité a regretté que "le pouvoir exécutif, premier ministre en tête, prive les Français d'un véritable débat parlementaire, ouvert, respectueux" sur la légalisation de l'aide active à mourir.
Sujet: Re: Janvier 2011 fin de vie échec d'une loi 14.09.12 18:25
Le débat sur la légalisation de l’euthanasie en cours de discussion devant le Sénat 07.09.10 Mise à jour le 12.06.13
Régulièrement, il est déposé un projet de loi cherchant à faire légaliser le fait de provoquer délibérément le décès d’une personne en fin de vie. Le présent projet plaide en faveur d’un droit à une aide active à mourir. Comme à l’accoutumé, les arguments mis en avant pour motiver le vote de ce projet sont le droit de ne pas mourir dans la souffrance et le respect de la dignité. Or, ces principes sont posés et expliqués dans la loi du 22 avril 2005 relative aux droits des patients en fin de vie.
Le débat est relancé sur l’opportunité de légiférer sur la question. Est invoquée la nécessité de reconnaître au patient le droit d’être aidé à mourir selon les volontés qu’il aurait exprimées dans un acte et au moment qu’il le souhaite.1 Les discussions oublient très souvent la loi du 22 avril 20052 relative au droits des patients en fin de vie, dont les maîtres mots sont le respect de la dignité de la personne et la prise en charge de ses souffrances.
Le récent rapport d’évaluation remis par M. Léonetti3 démontre que le milieu de la santé est encore peu formé et informé sur les conditions d’application et ses apports pour les professionnels de santé et les patients.
1. La légalisation de l’euthanasie écartée des projets : priorité à la prise en charge de la douleur
Le principal argument mis en avant pour que soit votée une modification du code pénal est la nécessité de prendre en compte des circonstances qualifiées de particulières et justifiant le droit « de donner la mort », de « provoquer la mort d’une personne en fin de vie et en proie à des souffrances extrêmes ».
Légaliser l’euthanasie, la seule réponse aux souffrances ?
Lorsque des sondages sont réalisés sur la question de savoir s’il faut ou non légaliser l’euthanasie, il est important de s’interroger sur la façon dont est formulée la question posée. La souffrance, la déchéance physique et/ou psychologique sont souvent mises en avant, mais les progrès réalisés dans la prise en charge de la douleur sont rarement abordés. L’euthanasie est présentée comme la « solution miracle » pour mettre un terme aux souffrances.
Voici quelques questions posées lors des nombreuses enquêtes grand public : « Faut-il laisser aux personnes très malades la possibilité de mourir si elles le désirent ? » (SOFRES 1990) ; « si vous étiez atteint d’une maladie incurable et en proie à d’extrêmes souffrances, souhaiteriez-vous que l’on vous aide à mourir ? » (IPSOS, 1999) ; « faut-il autoriser les médecins à mettre fin sans souffrance à la vie de ces personnes atteintes de maladies insupportables et incurables, si elles le demandent ? » (IFOP, 2002).
Quelle personne accepterait de mourir dans d’extrêmes souffrances ? Quelle société démocratique et respectueuse des droits de l’Homme accepterait que la mort soit une terrible et longue agonie ?
Par manque de formation sur les techniques de prises en charge de la douleur, la signification et l’intérêt des soins palliatifs, la mort est trop souvent considérée comme un échec, comme le montrent des études menées auprès de médecins. Le malaise quasi insupportable qu’ils éprouvent devant la mort de leurs patients les pousse à fuir ou, au contraire, à s’engager à outrance. Les malades, eux, racontent la solitude qu’ils éprouvent devant la fuite en avant ou la démission des professionnel de santé médecins, et craignent de faire l’objet d’une obstination déraisonnable alors que les professionnels de santé le médecin craignent d’être poursuivis pénalement s’ils prennent la décision de cesser les traitements.
Proche de la mort, les patients ne leur demandent pas au médecin l’impossible guérison, mais de « prendre soin » d’eux, de ne pas les laisser souffrir.
L’angoisse des personnes en fin de vie est proportionnelle au déni de la mort qui les entoure, au malaise des médecins professionnels de santé qui évitent trop souvent la confrontation avec les questions qui les tourmentent.
L’euthanasie comme « fait justificatif »
Il a été proposé d’introduire dans le code pénal un fait justificatif permettant d’écarter la qualification d’homicide volontaire et de rendre l’euthanasie non imputable à son auteur.
R. Badinter et G. Canivet ont esquissé les contours du régime d’irresponsabilité pénale susceptibles de s’appliquer aux médecins : • « si nous considérons qu’il y a eu en ce domaine une source d’irresponsabilité pénale, nous rejoignons les cas de la contrainte, de la force majeure irrésistible ou plus communément de la légitime défense dans les limites que la loi lui assigne. On maintient alors le principe et on pose la cause d’irresponsabilité. […] La cause d’irresponsabilité serait le fait d’abréger les souffrances, à sa demande, d’un être humain en proie à des souffrances insupportables et voué à une fin certaine prochaine » ;
« il s’agirait de prévoir, par la loi, la suppression de l’infraction pénale existant actuellement, qui interdit au médecin de donner la mort et qui refuse de faire du consentement du malade, un fait justificatif de l’homicide volontaire ». G. Canivet a rappelé qu’une telle démarche ne pouvait être engagée que si elle était « l’expression d’un consensus général ».
Le fait justificatif devrait être précisé « dans la mesure où, dans la loi pénale actuelle, le consentement du malade ne peut en aucun cas être considéré comme un fait justificatif de l’homicide. Il faut que vous précisiez d’une manière quelconque que l’homicide est justifié par un fait à définir, soit le consentement du malade recueilli dans des conditions particulières, soit la décision du médecin prise dans des conditions particulières et que vous précisiez, dans chacun des cas, ce qui doit être considéré comme un fait justificatif. Si c’est sur la loi pénale que l’on veut agir, il faut partir de cette dernière et avoir une action explicite sur la qualification et les faits justificatifs de l’infraction »4.
La modification du code de procédure pénale n’a pas été retenue car elle ne correspondait pas aux attentes des professionnels de santé. Ils souhaitent avant tout que leur pratique soit reconnue et que des moyens de prendre en charge la douleur soient développés, notamment par un meilleur accès aux soins palliatifs, une maîtrise des traitements de prise en charge de la douleur. Ils espèrent que la crainte du procès dans l’hypothèse de prescription de traitement de la douleur ne devienne pas une obsession. Une prescription de morphinique, dans les règles de l’art, ne doit pas conduire au procès. En revanche, un surdosage volontaire dans le but de provoquer le décès constitue un crime. Quant à définir le fait pouvant justifier l’homicide, la mission est loin d’être évidente. Une rédaction trop large peut être source d’interprétations diverses et donc de dérives.
La principale crainte porte sur l’évolution du sens donné au « fait » justifiant l’acte. Initialement, seraient associées des notions de souffrances et fin de vie, puis d’autres notions pourraient se greffer à la définition initiale, comme l’handicap, les souffrances morales. Or, le principe même d’une loi réside dans son champ d’application général. Dès que des dérogations particulières sont envisagées, le risque de dérive est trop important et les conséquences irrémédiables, tout particulièrement pour tout ce qui a trait à la fin de vie, au « droit de mourir ».
2. Histoire de l’élaboration de la loi du 22 avril 2005 relative aux droits des patients en fin de vie
Le grand mérite de cette loi est d’avoir été votée après une étude approfondie sur la situation des patients en fin de vie et sur les pratiques professionnelles pour apporter des réponses aux professionnels de santé et aux patients. Ainsi, entre 2003 et 2005, de nombreux rapports d’une grande qualité ont été remis au ministère de la Santé : le rapport de Marie de Hennezel, « Fin de vie et accompagnement » en octobre 2003 ; la conférence de consensus « L’accompagnement des personnes en fin de vie et de leurs proches » en janvier 2004 et le rapport Léonetti, « L’accompagnement en fin de vie » (t. I et II, juin 2004).
Préalablement à tout vote de loi, la question posée était : « Quelles sont les réponses possibles aux attentes de notre société ? » Les juristes consultés ont répondu qu’il était préférable de s’adapter à l’arsenal juridique existant et qu’il n’était pas opportun de voter une loi spécifique. « L’apport de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé a été également invoqué. Le droit reconnu aux malades d’accéder aux soins palliatifs et en même temps de refuser un traitement, le devoir imparti au médecin par l’article R.4127-37 CSP de ne pas pratiquer d’obstination déraisonnable et de soulager les souffrances, l’obligation parallèle d’accompagnement de la personne malade et de sa famille, constitueraient autant de réponses fournies par le droit en vigueur pour résoudre en grande partie les questions posées dans le cadre du débat sur l’euthanasie ».
Pour G. Mémeteau, « il faut laisser, au cas par cas, le ministère public exercer son pouvoir d’appréciation de l’opportunité des poursuites, après une enquête sur les véritables mobiles parce que les mobiles ostensibles ne sont pas toujours les vrais mobiles de l’acte litigieux ». Dès lors, comme l’observe D. Vigneau, « le débat peut à la fois conduire à la sévérité, lorsqu’il le faut, [il] pense notamment à l’affaire M., et à la clémence lorsque celle-ci est parfaitement justifiée »5.
Cependant, n’est-ce pas risquer de déplacer le problème en laissant le juge se prononcer au cas par cas ? Ne craint-on pas de laisser des professionnels dans la peur d’une éventuelle judiciarisation de l’activité médicale ? L’ensemble des discussions et travaux a permis le vote de la loi du 22 avril 2005 en raison même de la spécificité de la situation des patients en fin de vie. Cette loi complète celle du 4 mars 2002, relative aux droits des usagers de la santé, et écarte la légalisation de l’euthanasie sous toutes ces formes.
Laisser mourir sans faire mourir
La loi du 22 d’avril 2005 pose le principe selon lequel les actes médicaux ne doivent pas être poursuivis par une obstination déraisonnable, unanimement réprouvée.
Deux critères la caractérisent : disproportion et inutilité du traitement. Quel est l’intérêt de pratiquer une énième chimiothérapie alors que le médecin sait pertinemment qu’elle n’améliorera pas l’état de santé du patient ? Il faut savoir ou apprendre à passer du curatif au palliatif sans sentiment d’échec et de culpabilité. La médecine n’a pas pour mission de guérir mais de soigner. Prendre soin ne veut pas dire qu’il faut entreprendre un traitement à tout prix. Faire primer la qualité de vie est essentiel. Poser dans une loi l’obstination déraisonnable comme un interdit et admettre de devoir s’arrêter doit encourager le passage d’une logique curative à une logique palliative.
En codifiant les bonnes pratiques médicales, le législateur a eu le souci de faire cesser tout arbitraire de décision d’arrêt des traitements. Il a pris en considération l’intérêt du patient et des soignants. Le patient se voit reconnaître un droit d’exprimer sa volonté en rédigeant des directives anticipées et en désignant « une personne de confiance ». Les professionnels de santé trouvent une réponse à la crainte d’une judiciarisation de la pratique médicale : l’arrêt des traitements ou leur abstention répond à une procédure définie et ôte le poids de la décision sur une seule et même personne. Le patient est complètement associé à la prise de décision s’il est conscient ou après consultation des directives anticipées ou de la personne de confiance lorsqu’il est inconscient. « Collégialité » et « traçabilité » sont les maîtres mots de la loi d’avril 2005.
3. Une nouvelle proposition de loi : Faire mourir
A nouveau la question du droit de faire mourir va être débattue au Sénat suite à une proposition de loi récemment déposée. Ce projet tend à légaliser le suicide médicalement assisté.
Le suicide n’est pas répréhensible pénalement, toute personne est en droit de se donner la mort. En revanche, dès lors que le suicide est réalisé par l’intervention ou l’aide d’une personne pour mettre délibérément fin à la vie de quelqu’un dans l’intention de mettre un terme à une situation jugée insupportable, la répression pénale est de rigueur.
L’assistance au suicide est illégale en France, qu’elle soit active (qualification pénale d’homicide) ou passive (qualification de non assistance à personne en danger).
Par une décision du 29 avril 2002, la Cour Européenne des Droits de l’Homme a refusé d’autoriser un droit au suicide assisté d’une patiente en fin de vie. Diane PRETTY, gravement malade, souhaitait que l’on puisse l’aider à mourir pour mettre un terme à une vie devenue insupportable par l’importance de ses souffrances. Cependant, les Tribunaux du Royaume Unis et la Cour Européenne des Droits de l’Homme ont refusé de lui accorder le droit de se faire aider à mourir. 6
La proposition de loi déposée au Sénat estime que la législation actuelle concernant les droits des patients en fin de vie doit être modifiée au motif même que si la loi prend certes en compte la plupart des situations, « il reste toutefois la question des personnes dont l’arrêt du traitement ne suffit pas à les soulager, qui ne souhaitent pas être plongées dans le coma et demandent lucidement une aide active à mourir ». Le texte suivant est proposé : « Toute personne majeure, en phase avancée ou terminale d’une affection accidentelle ou pathologique grave et incurable, infligeant une souffrance physique ou psychique qui ne peut être apaisée et qu’elle juge insupportable, peut demander à bénéficier, dans les conditions strictes prévues au présent titre, d’une assistance médicalisée pour mourir. »
Dans le corps du texte, il est en fait demandé de reconnaître aux professionnels de santé un droit de vie et de mort sur les patients. En effet, l’aide active à mourir est en fait une assistance médicalisée pour mourir. Il est alors prévu une procédure collégiale calquée sur le modèle de la loi du 22 avril 2005 (médecin traitant, équipe médicale suivant le patient), à la différence notable qu’elle doit statuer sur le fait de provoquer le décès d’un patient. Un collège d’experts pourrait être constitué pour « rendre leurs conclusions sur l’état de l’intéressé dans un délai maximum de huit jours. »
« Lorsque les médecins constatent la situation d’impasse dans laquelle se trouve la personne, et le caractère libre, éclairé et réfléchi de sa demande, l’intéressé doit, s’il persiste, confirmer sa volonté en présence de la ou les personnes de confiance qu’il a désignées. » La personne de confiance est également impliquée dans la décision. Il convient de rappeler que la personne de confiance a été mise en place par la loi du 4 mars 2002. Actuellement, l’ensemble des professionnels de santé éprouve des difficultés à expliquer l’intérêt et les missions de la personne de confiance. Avec une telle proposition, il conviendra d’attirer toute l’attention du patient sur la notion de confiance ! Indirectement, cette loi reconnaîtrait à la personne de confiance un droit de vie ou de mort.
Un contrôle a posteriori est prévu par une commission médicale régionale : « Les conclusions médicales et la confirmation de la demande sont versées au dossier médical. Dans un délai de quatre jours ouvrables à compter du décès, le médecin qui a apporté son concours à l’aide active à mourir adresse à la commission régionale de contrôle prévue à la présente section un rapport exposant les conditions du décès. À ce rapport sont annexés les documents qui ont été versés au dossier médical en application du présent article. »
Il est également prévu : « Il est institué auprès du garde des sceaux, ministre de la justice, et du ministre chargé de la santé, un organisme dénommé “Commission nationale de contrôle des pratiques relatives aux demandes d’aide active à mourir”. »
La proposition de loi reprend la pratique des directives anticipées, créées par la loi du 22 avril 2005 comme outils d’expression de la volonté du patient. Elles répondent aux inquiétudes des patients et des professionnels de santé puisque leur rédaction peut favoriser une discussion au cours de laquelle le patient fait part de ses craintes et angoisses. De plus, en lieu et place de se trouver devant le fait accompli, patients, familles et proches ont la possibilité de discuter avec l’équipe des limites à apporter aux traitements.
Toute la problématique en France est l’accessibilité aux directives anticipées déjà formulées, du fait qu’il n’existe aucun registre national les regroupant. Leur gestion exige la mise en place d’un système organisant leur conservation et leur consultation : faut-il les conserver en mairie ? créer un registre national ? inscrire sur la carte d’identité des informations non pas médicales, mais permettant d’accéder à un serveur informatique afin de connaître l’existence de directives et le contenu des déclarations anticipées ?
L' Espagne a opté pour un acte notarié et la création d’un fichier national les regroupant. Il a été proposé de les archiver sur le fichier national où sont inscrites les personnes refusant tous prélèvements d’organes. Cependant cette proposition répond partiellement au problème puisque la consultation de ce fichier se fait dans la seule hypothèse où un prélèvement est envisagé.
Il a été suggéré l’idée de les inscrire dans la future carte vitale contenant le dossier médical du patient, mais le patient est en droit de les changer à tout instant. Comment seront gérées les modifications à apporter aux directives ?
La présente proposition de loi n’apporte pas d’élément de réponse puisque « Les modalités de gestion du registre et la procédure de communication des directives anticipées à la commission susvisée ou au médecin traitant qui en fait la demande sont définies par décret en Conseil d’État. ». Il est prévu que dans ces directives, le patient serait en droit de demander un aide à mourir.
Les professionnels de santé ne sont pas tenus d’apporter leur concours à la mise en œuvre d’une aide active à mourir, ni de suivre la formation dispensée par l’établissement en application de l’article L. 1112-4. Le refus du médecin, ou de tout membre de l’équipe soignante, de prêter son assistance à une aide active à mourir est notifié à l’auteur de la demande. Dans ce cas, le médecin est tenu de l’orienter immédiatement vers un autre praticien susceptible de déférer à cette demande. »
Conclusion : Cette nouvelle proposition de loi atteste que la loi du 22 avril 2005 est méconnue.
Pourtant, elle répond à la crainte qu’ont les patients de ne pas être écoutés et d’être en proie à la technique médicale. Le respect de la volonté du patient et de sa dignité sont les priorités de la loi. Arrêter un traitement n’est pas une euthanasie et laisser mourir non plus. Il faudra du temps pour que la loi relative aux droits des patients en fin de vie soit comprise, assimilée et appliquée.
Son dessein n’est pas de provoquer volontairement le décès de la personne, mais de laisser mourir un patient dans le respect de sa volonté et dans le respect de sa dignité après une concertation en collégialité.
Notes 1. Proposition de loi n°659 relative à l’aide active à mourir enregistré à la Présidence du Sénat le 12 juillet 2010 ; http://www.senat.fr/leg/ppl09-659.pdf 2. Loi n°n° 2005-370 du 22 avril 2005 relative aux droits des patients en fin de vie 3. Assemblée nationale, Rapport d'information au nom de la mission d'évaluation de la loi n° 2005-370 du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie, n° 1287, décembre 2008. 4. J. Léonetti, Rapport « L’accompagnement en fin de vie » t. I et II ; juin 2004. 5. J. Léonetti, Rapport « L’accompagnement en fin de vie » t. I et II ; juin 2004. 6. Cour Européenne Des droits de l’Homme, Affaire Pretty c. Royaume-Uni (requête 2346/02), 29 avril 2002
Sujet: JANVIER 2011, ECHEC D'UNE LOI 20.09.12 13:48
Tribune du cardinal Vingt-Trois dans Le Figaro à propos de la bioéthique et la fin de vie
Le Figaro – 14 janvier 2011
Alors que le Parlement s’apprête à se pencher sur les deux projets de loi, le cardinal André Vingt-Trois, archevêque de Paris qui préside la Conférence des évêques de France, s’inquiète de la façon dont notre société traite les plus vulnérables.
La cohérence du principe d’humanité
Bioéthique et fin de vie
Cette année, la joie de Noël, partagée par beaucoup, chrétiens ou non, a été obscurcie par les violences dont sont victimes les chrétiens du Moyen Orient en particulier. Ces violences ont suscité de nombreuses et sincères réactions. Mais au-delà de l’émotion, qui pourrait être sans lendemain, il convient d’affirmer avec vigueur que la liberté religieuse est la fine pointe de la liberté humaine. Quand elle est bafouée, c’est le principe d’humanité lui-même qui est gravement remis en cause.
Au-delà de la liberté religieuse comme telle, ces violences homicides ont eu un retentissement particulièrement brutal mais aussi, en un sens, salutaire. Depuis quelques jours, les réactions à l’assassinat de Vincent Delory et Antoine de Léocour montrent que nous ne saurons jamais nous habituer aux forces de mort qui ensanglantent notre monde jour après jour. L’horreur du mal réveille notre attention au principe d’humanité, qui devrait être sans compromis. C’est ce même principe d’humanité qui est en jeu dans les débats éthiques qui s’engagent dans notre pays. Après le long processus des « états généraux », qui, à bien des égards, a mis en lumière le sens des responsabilités de nos concitoyens, la phase législative de la révision des lois de bioéthique commence. Par ailleurs, le Sénat va devoir se prononcer à nouveau dans quelques jours sur plusieurs propositions de loi visant à délivrer ce qu’il faut bien appeler un « permis de tuer. »
L’humanité d’une société, la qualité de sa civilisation, se mesure à la manière dont elle traite les plus vulnérables : les enfants, les exclus de toute sorte mais aussi les malades en fin de vie ou les êtres humains au tout début de leur histoire.
La recherche sur l’embryon n’est pas seulement une question scientifique. Le « diagnostic préimplantatoire » n’est pas la chasse gardée de quelques spécialistes. De même, l’accompagnement des grands malades concerne toute la société. Ce qui est en jeu, c’est le respect imprescriptible de la dignité humaine. Ne pas reconnaître cette dignité, par un manque de lucidité ou de sérieux, c’est immanquablement faire le jeu destructeur de la violence. Dire cela, ce n’est pas s’opposer à la démarche scientifique. C’est au contraire affirmer, par respect pour la science elle-même, qu’elle peut et qu’elle doit intégrer le principe d’humanité. C’est aussi demander que l’effort scientifique authentiquement humain soit plus vigoureux et mieux organisé. Des résultats sérieux semblent montrer que la recherche sur les cellules souches adultes ou reprogrammées est la voie des véritables découvertes thérapeutiques : notre pays ne devrait-il pas concentrer ses énergies sur ces recherches et devenir davantage une terre d’excellence dans ce domaine ? De même, la prise en charge médicale de la douleur a beaucoup progressé depuis quelques années et les soins palliatifs ont inauguré une nouvelle forme de rapport aux malades et à leur environnement : quels sont les moyens à mettre en œuvre aujourd’hui pour progresser aussi bien dans le traitement de la souffrance que dans l’accompagnement social des pathologies les plus lourdes et de la dépendance ?
Se laisser aller à la tentation de l’eugénisme, en stigmatisant qui plus est la population déjà fragile des personnes trisomiques et de leurs familles, considérer la recherche sur l’embryon, avec les destructions qui l’accompagnent, comme normale, voire nécessaire, céder aux pressions financières et commerciales qui se cachent parfois sous le masque d’un scientisme naïf, ne rien offrir d’autre que la mort aux malades qui attendent de l’aide, serait à proprement parler suicidaire pour notre société. Pour nous catholiques, qui avons tenu à participer dans un esprit de dialogue au débat pluraliste qui s’est engagé depuis plusieurs années sur ces sujets, mais qui sommes aussi sensibilisés par notre foi et par la tradition biblique à la dignité de l’homme et de la femme « créés à l’image de Dieu », ne pas dénoncer cette tentation suicidaire serait de la non assistance à société en danger. Des responsables politiques et des intellectuels d’inspirations variées ont d’ailleurs exprimé la même préoccupation il y a quelques semaines en dénonçant la « gestation pour autrui » comme « extension du domaine de l’aliénation ». Pas de liberté sans respect du principe d’humanité. C’est parce que l’homme n’est pas seulement une réalité biologique qu’il est libre. S’autoriser à bafouer sa dignité au nom d’une prétendue liberté constituerait une contradiction meurtrière.
La culture de notre pays, son histoire, sa responsabilité vis-à-vis de l’Europe et du reste du monde, sa fragilité actuelle aussi, nous engagent à faire preuve d’ambition éthique, avec courage et enthousiasme. Il serait illusoire de confondre plus petit commun dénominateur éthique et cohésion sociale. Car seule une haute vision de l’homme permet de construire la paix. Le consensus qui prétendrait se fonder sur le moins disant éthique serait en fait une caricature sans lendemain.
Il y a un message universel de Noël, que tous peuvent accepter : la solidarité et la paix proviennent du respect inconditionnel de toute vie humaine, dans sa plénitude et dans sa beauté comme dans sa fragilité et sa part de souffrance.
Cardinal André Vingt-Trois Archevêque de Paris Président de la Conférence des évêques de France
Sujet: Re: Janvier 2011 fin de vie échec d'une loi 20.09.12 13:56
L’euthanasie, les lobbies et la loi Henrik Lindell25 Novembre 2010
Régulièrement, des situations personnelles médiatisées relancent le débat sur l’euthanasie, interdite en France. Ces dernières années, les Français ont été sensibilisés à cette problématique par le décès de Vincent Humbert, un jeune tétraplégique euthanasié en 2003 par son médecin avec la complicité de sa mère, et par Chantal Sébire, atteinte d’un cancer, qui s’est suicidée en 2008 grâce à l’aide d’un médecin. L’utilisation par différents groupes de pression de ces drames individuels a contribué à populariser la cause des défenseurs de « l’aide active à mourir ». Le débat est de nouveau d’actualité avec une proposition de loi de plusieurs dizaines de sénateurs qui souhaitent autoriser l’aide active à mourir . Des associations catholiques dont l’Alliance pour les droits de la vie ont lancé une pétition pour défendre un principe : « ni euthanasie, ni acharnement thérapeutique ». Un principe qui correspond pour certains à une conviction religieuse et pour d’autres à l’esprit d’une des lois les plus consensuelles jamais adoptées dans ce pays : la loi Leonetti, votée en 2005. REVOLUTION Un débat au Sénat devait avoir lieu le 16 novembre, mais il a été repoussé au mois de janvier 2011. Seront alors discutés des amendements provenant de la proposition « relative à l’aide à mourir » faite le 12 juillet par les sénateurs socialistes Jean-Pierre Godefroy, Patricia Schillinger, Raymonde Le Texier et Annie Jarraud-Vergnolle, rejoints par 46 autres dont François Rebsamen (PS), Catherine Tasca (PS) et Marie-Christine Blandin ( Europe Écologie – Les Verts ). Des élus qui veulent changer la loi Leonetti pour qu’elle intègre notamment cet article : « Toute personne majeure, en phase avancée ou terminale d’une affection accidentelle ou pathologique grave et incurable, infligeant une souffrance physique ou psychique qui ne peut être apaisée et qu’elle juge insupportable, peut demander à bénéficier, dans les conditions strictes prévues au présent titre, d’une assistance médicalisée pour mourir. » Cet article, s’il était voté, correspondrait à une révolution en matière de soins donnés aux mourants en France. Des médecins obtiendraient le droit de mettre fin à la vie d’une personne. Les auteurs s’inspirent directement d’une loi en vigueur depuis 2001 aux Pays-Bas autorisant l’euthanasie. Cette proposition s’inscrit dans une série du même type soumise depuis plusieurs années au Sénat. La dernière proposition date du 13 octobre. Elle porte sur « l’euthanasie volontaire ». Elle a été élaborée par les sénateurs Guy Fischer, François Autain et Annie David, membres du groupe Communiste, républicain et citoyen soutenus par 14 autres dont Robert Hue. Ils proposent d’introduire cet article dans le droit français : « Toute personne capable, en phase avancée ou terminale d’une affection reconnue grave et incurable quelle qu’en soit la cause ou placée dans un état de dépendance qu’elle estime incompatible avec sa dignité, peut demander à bénéficier d’une euthanasie volontaire. » L’originalité de cette proposition est sa relative imprécision ( qu’est-ce qu’une personne « capable » ? ) et la combinaison des termes « dignité » et « euthanasie ». Le terme de « dignité », dans ce contexte où on ne l’attendait pas forcément, est utilisé avec insistance par l’Association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD). Avec ses 47 700 membres, c’est une puissante organisation de lobbying. Elle a le soutien de dizaines de députés et sénateurs, de gauche comme de droite, de journalistes et d’intellectuels de renom. Son président Jean-Luc Romero, ex-UMP, est conseiller régional d’Île-de-France apparenté PS. Son vice-président Alain Fouché est sénateur UMP et auteur d’une proposition de loi pour l’aide active à mourir déposée en 2009. Le nombre d’adhérents « augmente d’une façon constante depuis trente ans », déclare son délégué général Philippe Lohéac. Les bénévoles ont une moyenne d’âge de 72 ans. L’objectif de l’association est de faire en sorte que l’euthanasie soit autorisée par la loi, comme c’est le cas dans les pays du Benelux. LOI LEONETTI Cette cause serait extraordinairement populaire, à en croire tous les sondages faits sur la question. Comme l’a rapporté l’AFP le 2 novembre dernier, « 94 % des Français sont favorables à une loi autorisant l’euthanasie ». Et puis : « Ce chiffre est en hausse par rapport aux résultats d’un sondage similaire publié en mai 2009 (86,9 %). » Une cause peut-être un peu plus complexe que l’image compassionnelle qui l’accompagne souvent. Commençons par un simple rappel : l’actuelle loi relative aux droits des malades à la fin de vie, du 22 avril 2005, a été adoptée par les parlementaires à la quasi-unanimité ( trois abstentions seulement ). Avant le vote, son rapporteur, Jean Leonetti, cardiologue, député-maire (UMP) d’Antibes (06), avait mené une large consultation, en organisant 80 auditions pendant neuf mois. Selon ce texte, toute forme d’euthanasie ( suicide assisté, aide active à mourir… ) reste interdite, mais la loi permet de suspendre des actes médicaux qui ont pour effet de maintenir artificiellement la vie et qui apparaissent inutiles et disproportionnés (« acharnement thérapeutique »). La loi autorise aussi des traitements qui pourraient avoir pour effet secondaire d’abréger la vie si (et seulement « si ») ces derniers permettent de soulager la souffrance, si la procédure est inscrite dans le dossier médical et si la famille du patient a été informée. Le patient a aussi le droit de refuser des soins, par exemple certaines opérations lorsqu’il est en phase terminale d’un cancer. Cette volonté doit figurer dans le dossier médical. Le médecin doit aussi – toujours – proposer aux patients des soins palliatifs. Les Français connaissent-ils vraiment tous la portée réelle de cette loi ? Et le champs large d’actions qu’elle permet auprès des mourants ? Il est permis d’en douter. SONDAGES CONTRADICTOIRES De même peut-on douter de la signification des sondages qui, dans ce domaine comme dans d’autres, peuvent dire tout et son contraire (la vie politique française nous en donne des exemples quasi-quotidiens). Prenons le dernier du genre, effectué par l’Ifop du 21 au 22 octobre 2010 pour Sud-Ouest Dimanche. L’échantillon était de 956 personnes représentatives âgées de 18 ans et plus. La conclusion des sondeurs paraissait claire : 94 % de ces personnes ont dit « oui à l’euthanasie ». Et à quelle question précise ont-elles répondu « oui »? Celle-ci : « Certaines personnes souffrant de maladies insupportables et incurables demandent parfois aux médecins une euthanasie, c’est-à-dire qu’on mette fin à leur vie, sans souffrance. Selon vous, la loi française devrait-elle autoriser les médecins à mettre fin, sans souffrance, à la vie de ces personnes atteintes de maladies insupportables et incurables si elles le demandent ? » Une question légèrement orientée… Jean Leonetti, qui est résolument opposé à l’euthanasie, a déclaré lui-même qu’il aurait répondu « oui » à la question… Répondre « non » revient à dire qu’on est favorable à la souffrance des personnes mourantes. Quand on se penche en détail sur ce sondage, on découvre que 58 % des sondés considèrent que la loi devrait permettre l’euthanasie seulement « dans certains cas ». Et 36 % jugeraient qu’elle devrait être appliquée à toutes les personnes atteintes de maladies insupportables et incurables. Bref, on passe donc des 94 % annoncés triomphalement par certains lobbies à 36 % de personnes vraiment convaincues… Quant à l’argumentation précise des sénateurs cités plus haut et de l’ADMD, qui se réfèrent abondamment aux quelques situations individuelles ultra-médiatisées, elle mérite aussi d’être étudiée attentivement. MINISTRES ET JOURNALISTES PRO-EUTHANASIE Revenons par exemple sur ce qu’a vécu Chantal Sébire, défigurée et handicapée par une tumeur inopérable, morte à 52 ans le 19 mars 2008. Elle souffrait atrocement. Pour elle, sa vie n’avait plus de sens, si ce n’était sa lutte pour qu’on l’aide à mourir en toute conscience. Le 17 mars, deux jours avant sa mort, la justice française lui avait refusé le droit de se faire prescrire un produit létal. Elle avait alors dit qu’elle pouvait l’acheter dans un autre pays. Elle est décédée après l’absorption d’un barbiturique. Sa situation avait suscité une vague d’émotion, relayée dans les médias. Chantal Sébire communiquait elle-même beaucoup avec des journalistes, dont plusieurs ont tenu à défendre sa cause. Tous les jours, à la radio et à la télé, pendant une dizaine de jours nous avons assisté à des « débats » où chacun défendait en réalité l’euthanasie. Même les enfants de Chantal Sébire souhaitaient sa mort, car sa vie leur paraissait effectivement insupportable. Elle était soutenue par l’ADMD. Son avocat, Gilles Antonowicz, était alors vice-président de l’association. Deux ministres du gouvernement Fillon et une grande partie de l’opposition avaient pris position en faveur d’une forme « d’exception d’euthanasie ». Difficile, dans un tel contexte, de trouver des arguments pour un débat contradictoire. Essayons justement d’étudier les principaux éléments avancés par les défenseurs de l’euthanasie. Et notamment les trois principaux critères qui permettraient, selon eux, d’y avoir recours. D’une part, la demande explicite et réitérée de mourir. Ce seul critère paraît évident, mais ne l’est pas. On sait maintenant que même Vincent Humbert, qui paraissait si déterminé à mourir, était pourtant ambivalent. Certains jours, il avait envie de vivre, d’après son kinésithérapeute. Chantal Sébire, elle, paraissait plus cohérente. Mais avait-elle vraiment bénéficié d’une aide professionnelle pour sortir de son désir de mourir ? En réalité, elle ne se soignait plus. Son dossier médical reste un mystère. Or, on sait que certaines personnes qui se savent condamnées s’enferment dans leur volonté de mourir. Mais des professionnels des soins palliatifs arrivent dans l’immense majorité de ces cas-là – 95 % – à aider la personne à trouver à nouveau goût à la vie. D’autre part, le critère de la souffrance physique. La médecine progresse énormément dans ce domaine. On peut aujourd’hui calmer la plupart des douleurs physiques et même, dans les cas extrêmes, plonger des patients dans un coma artificiel. C’est tout l’enjeu du développement des soins palliatifs. À ce titre, il convient de rappeler que l’on trouve très peu de personnel travaillant dans ce domaine de soins parmi les militants de l’ADMD. Une information confirmée par Philippe Lohéac, délégué général de l’ADMD. Enfin, pour permettre l’euthanasie, il faudrait certifier le caractère « incurable » de la maladie. Or depuis que la médecine existe, elle guérit des maladies considérées auparavant comme incurables. Il s’agit d’une notion relative. L’étude de ces trois critères permet de comprendre, qu’en réalité, toute décision d’autoriser l’euthanasie est forcément subjective. Alors que les soins palliatifs se révèlent toujours, très objectivement, utiles. Et ils ne s’apparentent pas à l’acharnement thérapeutique, pratique que même l’Église catholique conteste. Ils permettent en revanche de rendre la vie aussi supportable, voire agréable, que possible. Soins palliatifs - L’objectif des soins palliatifs est de « soulager les douleurs physiques ainsi que les autres symptômes et de prendre en compte la souffrance psychologique, sociale et spirituelle » d’une personne « atteinte d’une malade grave évolutive ou terminale ». Ces principes, ainsi que le dispositif légal sur la question, la formation des bénévoles, des témoignages, des conseils pratiques, des adresses permettant de contacter des organismes, un livre qui vient de sortir les recense : Vivre et mourir comme un homme (1). Préfacé par le député Jean Leonetti, il est écrit par Cécile B. Loupan, accompagnatrice bénévole auprès de handicapés lourds et de personnes en fin de vie. Outil d’aide et de soutien pour les personnes concernées, le livre peut aussi servir d’argumentaire contre l’aide active à mourir. Pour Cécile B. Loupan, rencontrée à Paris, il n’y a aucun doute : « l’euthanasie s’oppose aux soins palliatifs ». Dont acte. 1. Publié aux éditions de l’Œuvre, ouvrage écrit en collaboration avec l’Association d’accompagnement bénévole en soins palliatifs (ASP), 190 p., 15 € Source :http://temoignagechretien.fr/articles/leuthanasie-les-lobbies-et-la-loi
Sujet: Re: Janvier 2011 fin de vie échec d'une loi 20.09.12 14:32
Légalisation de l'euthanasie? Débat passionné au Sénat
Modifié le 25/01/2011 à 10:12 - Publié le 25/01/2011 à 10:11 | AFP
Le Sénat examine mardi une proposition de loi très controversée légalisant l'euthanasie, qui devrait donner lieu à des débats passionnés dépassant le clivage traditionnel droite/gauche. Ce texte stipule, dans son premier article, que "toute personne capable majeure, en phase avancée ou terminale d'une affection accidentelle ou pathologique grave et incurable, lui infligeant une souffrance physique ou psychique qui ne peut être apaisée ou qu'elle juge insupportable, peut demander à bénéficier (...) d'une assistance médicalisée permettant, par un acte délibéré, une mort rapide et sans douleur".
Cette proposition de loi, adoptée le 18 janvier par la commission des Affaires sociales du Sénat (25 voix pour, 19 contre et 2 abstentions), est le résultat de la fusion de trois textes allant dans le même sens, émanant l'un de Jean-Pierre Godefroy (PS), l'autre d'Alain Fouché (UMP) et le troisième des sénateurs CRC-SPG (communistes et Parti de Gauche) François Autain et Guy Fischer. Mais, mardi, le texte ne devrait pas être voté par le Sénat, compte tenu de l'opposition d'une majorité du groupe UMP. L'Alliance pour les droits de la vie a prévu de manifester mardi devant le Sénat contre la proposition de loi. Son adoption en commission avait déclenché aussitôt une levée de boucliers. Au groupe UMP du Sénat, on a affirmé ainsi qu'une majorité y était opposée. Certains sénateurs du parti présidentiel ont en outre pris la plume pour dénoncer un texte qui va "à l'encontre de notre droit qui vise à protéger les plus faibles, les plus vulnérables et à porter assistance à celles et ceux qui sont en situation de danger". Ils ont rappelé à cet égard que la loi Leonetti de 2005 sur la fin de vie, "développant une politique de soins palliatifs, répondait largement à la problématique posée et doit trouver son application dans l'ensemble des services médicaux concernés". A l'initiative du député UMP Jean-Marc Nesme, des parlementaires ont constitué une "Entente parlementaire visant à refuser l'euthanasie et à développer un accès aux soins palliatifs". A l'inverse, Jean-Luc Romero, président de l'Association pour le droit à mourir dans la dignité (ADMD) et conseiller régional PS d'Ile-de-France, a applaudi ce texte. "Pour la première fois de l'histoire de notre pays, une première étape parlementaire est franchie en faveur d'une loi de légalisation d'une aide active à mourir", a renchéri l'ADMD dans un communiqué, parlant de "première victoire de la liberté face à l'obscurantisme". Les adversaires de la légalisation de l'euthanasie ont mis en outre l'accent sur le risque "d'une judiciarisation toujours plus accrue à l'encontre du corps médical", et d'une coupure du lien "de confiance nécessaire entre le médecin et son patient". Jeudi, le président du Sénat, Gérard Larcher (UMP), a affirmé qu'à titre personnel, il ne voterait pas la proposition de loi. Ce débat sur l'euthanasie "doit nous permettre d'accentuer l'évaluation de la loi", a-t-il ajouté, en regrettant que "l'on ait tendance à changer la loi avant même d'évaluer l'impact" de la précédente. Il a fait valoir en outre que, sur l'objectif de 3.000 lits dévolus aux soins palliatifs fixé par la loi Leonetti, "on en était encore à un peu moins d'un tiers". En novembre, à l'initiative des socialistes, une proposition de loi sur la fin de vie avait été présentée à l'Assemblée nationale. Elle avait été rejetée par 326 voix contre 202. http://www.lepoint.fr/societe/legalisation-de-l-euthanasie-debat-passionne-au-senat-25-01-2011-131489_23.php
Sujet: Re: Janvier 2011 fin de vie échec d'une loi 16.12.12 14:08
Le Sénat écarte l'euthanasie après un débat "pas comme les autres"
Le Sénat écarte l'euthanasie après un débat Plusieurs dizaines de personnes ont participé à une manifestation contre la légalisation de l'euthanasie, hier près du Sénat à Pari. Photo AFP
Par charentelibre.fr (avec AFP), publié le 26 janvier 2011 à 0h00.
Les sénateurs ont voté contre la légalisation de l'euthanasie dans la nuit après un débat intense et "pas comme les autres" sur une proposition de loi qui voulait instaurer "une assistance médicalisée pour mourir".
Une majorité de sénateurs (170/142) a supprimé l'ensemble des articles du texte trans-partisan présenté par leur collègue Jean-Pierre Godefroy (PS), Alain Fouché (UMP) et Guy Fischer (PCF).
La veille du débat, le Premier ministre François Fillon s'était opposé à l'euthanasie, invitant de facto sa majorité au Sénat à en faire de même.
L'essentiel de la proposition de loi tenait dans son article premier, supprimé: "toute personne capable majeure, en phase avancée ou terminale d'une affection accidentelle ou pathologique grave et incurable, lui infligeant une souffrance physique ou psychique qui ne peut être apaisée ou qu'elle juge insupportable, peut demander à bénéficier (...) d'une assistance médicalisée permettant, par un acte délibéré, une mort rapide et sans douleur".
Dans l'hémicycle, définition du Larousse à l'appui, le ministre de la Santé, Xavier Bertrand, a parlé "d'euthanasie", qui "va à l'encontre de nos fondements juridiques".
Le ministre a invoqué "les malades d'Alzheimer qui ne pourraient plus exprimer leur volonté libre et éclairée".
Saluant "un débat pas comme les autres", il a plaidé pour le développement des soins palliatifs.
Au cours du long débat, des orateurs ont fait référence à Vincent Humbert, jeune tétraplégique que sa mère avait aidé à mourir en 2003.
"Parce que je ne veux plus vivre des situations comme cela, je veux une loi pour que la société vienne en assistance à la personne qui en a fait la demande", a déclaré le rapporteur Jean-Pierre Godefroy (PS).
"Ne vous arrogez pas le droit de décider à la place de ceux qui, lucidement, ont choisi le moment de mettre fin à leur souffrance. Ne leur volez pas leur ultime liberté", a plaidé la centriste Muguette Dini, présidente de la commission des Affaires sociales, mais qui parlait en son nom propre.
"Le mérite de ce texte est d'avoir attiré l'attention du gouvernement sur l'insuffisance des soins palliatifs en France", a ajouté Alain Fouché (UMP), l'un des rares à droite à soutenir la proposition.
La sénatrice centriste et ex-secrétaire d'Etat Valérie Létard a indiqué qu'elle allait voter l'article 1 "pour que l'on ouvre le débat et qu'on le continue".
"Honte pour le Sénat"
Jean-Marie Bockel (Gauche moderne, ex-PS) s'est déclaré contre: "Je considère que la loi Leonetti nous suffit. Elle offre des espaces de liberté".
Datant de 2005, la loi Leonetti "relative aux droits des patients en fin de vie" empêche l'acharnement thérapeutique.
"J'ai honte pour le Sénat", a lancé Jean-Louis Lorrain (UMP), farouchement hostile, et qui avait dénoncé dans un communiqué "la toute puissance de la technique et du médical pour gérer notre vie".
Présent dans les tribunes, le président de l'Association pour le droit à mourir dans la dignité (ADMD), Jean-Luc Romero, s'est déclaré "optimiste pour la suite".
"Je pense que François Fillon a fait la plus grande erreur de sa vie en mettant tous les moyens de l'Etat contre un vote de conscience (des sénateurs)", a dit M. Romero, en dénonçant "la pression de l'église avec des tribunes des évêques partout".
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Sujet: Re: Janvier 2011 fin de vie échec d'une loi 26.01.13 17:34
Mardi 18 janvier 2011 à 19:56
Euthanasie : les sénateurs s’emparent du débat
Le Sénat s’empare du débat sur l’euthanasie. Contre toute attente, la commission des Affaires sociales a adopté mardi par 25 voix contre 19 une proposition de loi visant à légaliser cette pratique. Verdict le 25 janvier prochain lors de la discussion en séance, mais à l’UMP on indique déjà que la majorité du groupe est hostile au texte.
Par Laurent Berbon
Les sénateurs franchiront-ils le pas ? Alors que les politiques ont toujours refusé toute légalisation de l’euthanasie, le Sénat vient de mettre le débat sur la table. Par 25 voix contre 19 la commission des Affaires sociales a adopté une proposition loi visant à légaliser l’euthanasie. Un texte qui est le fruit de la fusion de trois propositions de loi déposées par Jean-Pierre Godefroy (PS), Alain Fouché (UMP), Guy Fischer et François Autain (CRC-SPG). A l’issue de l’article premier du texte, « toute personne capable majeure, en phase avancée ou terminale d’une affection accidentelle ou pathologique grave et incurable, lui infligeant une souffrance physique ou psychique qui ne peut être apaisée ou qu’elle juge insupportable, peut demander à bénéficier(…) d’une assistance médicalisée permettant, par un acte délibéré, une mort rapide et sans douleur ». Un texte qui aurait reçu l’appui de la présidente de la commission des Affaires sociales Muguette Dini (Union centriste).
« Un signal important », se félicite Jean-Luc Roméro. « Je suis satisfait car jamais une commission n’avait passé cette étape », explique le conseiller régional d’Ile-de-France (PS) également président de l’ADMD (Association pour le droit de mourir dans la dignité). « On sent qu’un certain nombre de parlementaires entendent les Français sur ces questions-là », explique cet ex-UMP qui s’appuie notamment sur les sondages démontrant que beaucoup de Français demandent cette légalisation. Mais pour le sénateur UMP Paul Blanc, membre de la commission des Affaires sociales, l’argument ne tient pas. « Si les Français devaient eux-mêmes pratiquer l’euthanasie, je ne suis pas sûr que les réactions seraient identiques », rétorque-t-il.
« Ce n’est pas encore gagné »
Car le vote en séance est loin d’être acquis, même si un UMP- Alain Fouché- est l'un des sénateurs à l’origine de la proposition de loi. Dans un communiqué, les sénateurs UMP ont dit « regretter » le vote de la commission. « Ce n’est pas encore gagné, c’est dans l’hémicycle que ça se jouera », admet Patricia Schillinger, qui a voté pour le texte en commission. La sénatrice socialiste du Haut-Rhin, qui confie ne pas trop aimer le terme « euthanasie », voit pourtant dans ce texte « un cadre », avec des « médecins bien définis » et une loi qui « met aussi des interdits ». « Il y a vraiment jusqu’à la fin quelqu’un de professionnel qui encadre », ajoute-t-elle. « Moi qui ai travaillé dans le milieu hospitalier, je sais comment ça se passe. Parfois, c’est le choix des patients de partir avant l’heure », observe la sénatrice, mettant en avant le fait qu’ « il n’y a pas des milliers de personnes qui vont demander l’aide à mourir ».
Mais pour Paul Blanc, « le médecin qui a prêté le serment d’Hippocrate ne peut être pour l’euthanasie ». Le sénateur UMP s’appuie sur la loi Léonetti de 2005 sur la fin de vie. « Le médecin que je suis pense qu’avec la loi Léonetti on a déjà le droit de mourir dans la dignité », explique-t-il. Alors pourquoi cette réticence des sénateurs UMP ? « Certains sénateurs n’osent pas s’exprimer parce qu’ils ont peur des grands électeurs », estime Patricia Schillinger. Pour Jean-Luc Roméro, il faut y voir là « les pressions faites par l’Eglise catholique ». « J’ai été surpris d’entendre des arguments religieux donnés par des élus », rapporte celui qui a été auditionné la semaine dernière par le Sénat. Pourtant, « c’est même une garantie pour ceux qui s’y sont opposés », insiste Jean-Luc Roméro pour qui ce texte est un moyen d’éviter « l’euthanasie illégale ».
Le débat est en tout cas lancé et pourra se poursuivre dans l’hémicycle mardi prochain. Et vous qu’en pensez-vous ?
Sujet: JANVIER 2011 échec d'une loi 26.02.13 11:24
Un texte légalisant l'euthanasie adopté en commission au Sénat
18 janvier 2011 à 18:09
Un texte légalisant l'euthanasie adopté en commission au Sénat
La commission des Affaires sociales du Sénat a adopté mardi une proposition de loi visant à légaliser l’euthanasie, ont indiqué à l’AFP plusieurs participants à la réunion.
L’article premier de ce texte indique que «toute personne capable majeure, en phase avancée ou terminale d’une affection accidentelle ou pathologique grave et incurable, lui infligeant une souffrance physique ou psychique qui ne peut être apaisée ou qu’elle juge insupportable, peut demander à bénéficier (…) d’une assistance médicalisée permettant, par un acte délibéré, une mort rapide et sans douleur».
La proposition a été adopté par 25 voix contre 19 et 2 abstentions, a précisé le rapporteur, Jean-Pierre Godefroy (PS).
La commission a décidé de fusionner en un seul texte trois propositions de loi très proches qui lui étaient soumises, avec l’accord de leurs auteurs. L’une était déposée par Jean-Pierre Godefroy (PS), l’autre par Alain Fouché (UMP) et la troisième par les sénateurs CRC-SPG (communistes et Parti de Gauche) François Autain et Guy Fischer.
La présidente de la commission, Muguette Dini (Union centriste), a voté pour, a-t-on indiqué de source parlementaire.
La proposition de loi sera discutée en séance le 25 janvier. D’ores et déjà, à l’UMP, on a indiqué à l’AFP qu’une majorité du groupe était en désaccord avec ce texte.
Sujet: Re: Janvier 2011 fin de vie échec d'une loi 13.05.13 11:16
Euthanasie : une loi mort-née ? Le Sénat tenté par la fronde
Le Sénat examine ce mardi une proposition de loi légalisant l’euthanasie, contre l’avis du gouvernement.
François Fillon a dû se fendre d’une tribune publiée dans le Monde pour bien expliquer aux sénateurs que la proposition de loi légalisant l’euthanasie devrait rester dans les cartons.
Alors que le débat sur les lois bioéthiques doivent démarrer au Parlement en février, la polémique qui s’est fait jour autour de la fin de vie a déjà aboli les traditionnelles barrières gauche – droite. Pourquoi une telle levée de boucliers ? Le premier article du texte suffit à l’expliquer :
"Toute personne capable majeure, en phase avancée ou terminale d'une affection accidentelle ou pathologique grave et incurable, lui infligeant une souffrance physique ou psychique qui ne peut être apaisée ou qu'elle juge insupportable, peut demander à bénéficier (...) d'une assistance médicalisée permettant, par un acte délibéré, une mort rapide et sans douleur".
Bien qu’une majorité semble devoir se dégager autour de cette approche, l’avertissement de François Fillon dans sa tribune, la présence improvisée de Xavier Bertrand au Sénat aujourd’hui font de la proposition de loi un test décisif pour le gouvernement.
Sujet: Re: Janvier 2011 fin de vie échec d'une loi 13.05.13 11:43
Débat « Assistance médicalisée pour mourir » Posted on 27 janvier 2011 by Equipe parlementaire
Mardi soir a eu lieu au Sénat le débat sur l’ « Aide médicalisée pour mourir ». Le texte, proposé par Jean-Pierre Godefroy (PS), Alain Fouché (UMP) et Guy Fischer (PCF), était donc (fait rare) trans-partisan et a dépassé les clivages habituels de la Haute-Assemblée.
En séance : Assistance médicalisée pour mourir envoyé par Senat. – L’actualité du moment en vidéo.
L’essentiel de la proposition de loi tenait dans son article premier, « toute personne capable majeure, en phase avancée ou terminale d’une affection accidentelle ou pathologique grave et incurable, lui infligeant une souffrance physique ou psychique qui ne peut être apaisée ou qu’elle juge insupportable, peut demander à bénéficier (…) d’une assistance médicalisée permettant, par un acte délibéré, une mort rapide et sans douleur ».
Mais cet article, comme d’ailleurs tous les autres de la proposition de loi, a été supprimé par une majorité de sénateurs (170 contre 142). En effet, la veille du débat, dans une tribune parue dans Le Monde, le Premier ministre François Fillon s’était opposé à l’euthanasie, invitant ainsi sa majorité au Sénat à en faire de même.
De facto, les quatre amendements présentés par les Sénatrices et Sénateurs écologistes sont tombés. Ils proposaient d’intégrer davantage les personnels paramédicaux dans la procédure d’aide médicalisée pour mourir, de clarifier certaines dispositions concernant la demande d’aide à mourir et d’informer aux mieux les usagers des hôpitaux sur leurs droits. Ces amendements avaient été élaborés en collaboration avec la Commission Santé d’Europe Ecologie – Les Verts et l’Association pour le Droit à Mourir dans la Dignité.
Néanmoins, lors de la discussion générale, Jean Desessard a pu défendre la position des élu-e-s écologistes au Sénat (voir ci-dessous). Il a demandé à ce qu’une loi sur l’euthanasie voie le jour, reprenant les mots du député Vert luxembourgeois Jean Huss « « Ce n’est pas dans la légalité que les abus ont lieu, mais bel et bien dans l’illégalité ». Il a également plaidé pour le respect du pluralisme moral, à savoir le droit à disposer de soi-même et la possibilité pour chacune et chacun de choisir.
Si le texte a été repoussé par le Sénat, cette proposition de loi a au moins eu le mérite de rouvrir le débat. En attendant la prochaine fois…
Verbatim de l’intervention de Jean Desessard.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Monsieur le président, messieurs les ministres, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, « Ce n’est pas dans la légalité que les abus ont lieu, mais bel et bien dans l’illégalité ». C’est avec ces mots que Jean Huss, notre collègue député Vert luxembourgeois, a défendu la loi qui a permis au Grand-Duché de légaliser l’aide à mourir.
J’espère que nous suivrons aujourd’hui l’exemple de nos voisins du Benelux et je remercie mon collègue socialiste Jean-Pierre Godefroy, mon collègue du groupe CRC-SPG Guy Fischer et mon collègue de la majorité Alain Fouché d’avoir eu le courage d’ouvrir à nouveau ce débat.
Il existe aujourd’hui une absurdité dans notre code pénal : aucune distinction n’est faite entre la mort donnée par compassion à autrui, à sa demande, et l’assassinat, puni de la réclusion criminelle à perpétuité.
Le cas de Vincent Humbert a montré les lacunes de notre droit.
La responsabilité du décès ne doit pas incomber aux familles ou aux médecins. C’est à la personne en fin de vie de choisir. C’est un acte individuel fort. C’est le droit à disposer de soi-même.
Quand allons-nous reconnaître l’exercice du droit fondamental de chaque être humain sur sa propre vie ? L’opinion publique semble prête. Que fera cette nuit la représentation nationale ?
La majorité se repose sur la loi de 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie, dite « loi Leonetti ». Malheureusement, cette loi est trop souvent ignorée, mal connue et pas toujours appliquée. (M. Alain Gournac s’exclame.) Les médecins ne sont pas toujours correctement formés, les patients pas toujours bien informés et l’acharnement thérapeutique existe toujours.
Mais, surtout, cette loi est insuffisante, car elle laisse trop peu de place à l’autodétermination des patients. C’est à chaque malade de choisir : faire le choix de vivre encore ou de mettre un terme à ses douleurs, à sa souffrance. Ce n’est ni à l’entourage ni à l’équipe médicale de décider.
D’ailleurs, que peut faire l’équipe médicale ? Aujourd’hui, elle se cantonne à laisser mourir les malades, puisque l’on interdit au médecin d’aller au bout de son acte. On augmente les doses de morphine, on enlève les perfusions, mais, officiellement, on ne donne pas la mort. Quelle hypocrisie !
Mme Françoise Laborde. C’est vrai !
M. Jean Desessard. La loi n’est donc pas adaptée, car elle ne satisfait pas celles et ceux qui arrivent en fin de vie ni leurs proches ni les soignants.
M. Josselin de Rohan. C’est ce que vous dites !
M. Jean Desessard. Alors que se passe-t-il ? Allons-nous laisser souffrir les malades qui demandent à mourir ? Allons-nous laisser les citoyens sans repère, quitte à ce que certains se retrouvent devant les tribunaux ? Allons-nous laisser les médecins enfreindre la loi encore longtemps ? Allons-nous laisser les magistrats face à ce vide juridique ? De toute façon, comment punir ceux qui ont aidé leurs proches ? Le procès de Marie Humbert s’est conclu par un non-lieu.
Cela fait trente ans que les Français attendent une loi. C’est aujourd’hui au législateur d’assumer sa responsabilité.
C’est tout de même étrange d’entendre certains dire aujourd’hui qu’il y a un vrai problème et qu’il faut y réfléchir encore. Une décision est à prendre, c’est tout !
Nous avons entendu ceux qui nous expliquent que si les personnes en fin de vie souffraient moins physiquement, il n’y aurait pas besoin d’assistance médicalisée pour mourir.
Ce sont deux questions différentes. D’un côté, il faut impérativement généraliser l’accès aux soins palliatifs, nous sommes tous d’accord sur ce point. Or, monsieur le ministre, à l’heure actuelle, ces soins ne sont accessibles qu’à 15 % ou 25 % de ceux qui en ont besoin. C’est vraiment très peu !
En revanche, d’un autre côté, la délivrance de la mort doit être également un choix, car les soins palliatifs et l’aide à mourir sont des choix complémentaires.
La douleur des personnes en fin de vie n’est pas tout. Elle s’accompagne parfois d’un désespoir lucide qui va au-delà de la douleur. Certaines personnes ne supportent pas l’idée de devenir complètement dépendantes et n’acceptent plus leur déchéance.
Il faut partir des réalités d’aujourd’hui : 70 % à 75 % des décès ont lieu à l’hôpital ou en maison de retraite, dans des conditions le plus souvent jugées inacceptables par les soignants, …
M. Roland Courteau. Absolument !
M. Jean Desessard. … et seules 24 % des personnes qui meurent à l’hôpital sont accompagnées par leurs proches,…
M. Roland Courteau. Très bien !
M. Jean Desessard. … soit plus de 75 % qui meurent dans la solitude.
Pourtant, que souhaitent la plupart de nos concitoyens ? Mourir chez eux sereinement, entourés de leurs proches à qui ils peuvent dire au revoir.
Mme Raymonde Le Texier. Très bien ! C’est cela le respect !
M. Jean Desessard. Prenons un exemple européen.
Cela fait dix ans que les Pays-Bas autorisent l’aide à mourir et la jurisprudence en tolérait la pratique depuis vingt ans. Il n’y a pas d’abus à déplorer. Dans ce pays, où l’aide médicalisée à mourir concerne 2 % des décès, et ce taux a tendance à légèrement diminuer, on meurt le plus souvent à domicile.
M. René-Pierre Signé. En France, 70 % des personnes meurent à l’hôpital !
M. Jean Desessard. Mon souhait est que ce vœu profond de délivrance puisse également être accompagné et encadré en France.
Car mourir dignement est un droit fondamental.
C’est à nous, parlementaires, de faire en sorte que l’État protège le pluralisme moral.
Les législations des États qui autorisent l’aide médicalisée à mourir n’obligent évidemment personne à demander ces interventions, mais elles n’interdisent pas non plus à certains citoyens d’y recourir et de vivre ainsi selon leurs convictions morales. Elles vont dans le sens du pluralisme moral, ce que la loi Leonetti ne permet pas aujourd’hui.
Ceux qui, pour des raisons éthiques ou religieuses, veulent lutter jusqu’au bout de leurs forces doivent considérer que d’autres peuvent faire un autre choix et accepter que la loi les y autorise.
M. Bernard Piras. Très bien !
M. Jean Desessard. C’est donc une loi républicaine que nous avons la possibilité de consacrer aujourd’hui.
M. Bernard Piras. Très bien !
M. Jean Desessard. C’est une loi de liberté, qui respecte la volonté du malade, mais aussi celle du médecin, qui peut accompagner ou ne pas accompagner vers la mort.
C’est une loi d’égalité, car les Français seront enfin égaux devant ce choix ultime. Il n’y aura plus ceux qui ont les moyens d’aller en Suisse et les autres.
M. Roland Courteau. Très bien !
M. Jean Desessard. C’est enfin une loi de fraternité, pour permettre aux malades et à leurs proches d’affronter le plus sereinement possible ces moments douloureux.
C’est pour ces raisons que les écologistes voteront pour ce progrès en faveur des libertés individuelles. Les sénatrices et les sénateurs verts soutiennent la proposition de loi !
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Sujet: Re: Janvier 2011 fin de vie échec d'une loi 13.05.13 12:13
Le débat sur la fin de vie. Le Sénateur Bernard Cazeau a fait son choix et explique ses raisons.
Rédigé le Lundi 14 Février 2011 à 20:29 | Lu 23 commentaire(s)
Monsieur Jean-Luc Roméro, Monsieur le Président de l'ADMD,
J’ai bien reçu votre courrier du 31 janvier 2011 et je vous remercie de m’avoir fait part de votre opinion en faveur des différentes propositions de loi relatives à la reconnaissance de l'exception d'euthanasie et de l'aide active à mourir. Celles-ci ont été examinées au Sénat, le mardi 25 janvier 2011. Son refus par les élus de la majorité constitue une honte.
Ce n’est pas la première fois que le Parlement français débat en séance publique de ce sujet. Ce dialogue fait appel à des convictions morales, religieuses, philosophiques ou éthiques. La question de la mort assistée relève indissociablement de l’intime et des libertés publiques.
Ces propositions de loi relatives à l’assistance médicalisée pour mourir marquent l’aboutissement du mouvement qui reconnaît la primauté du respect de la volonté individuelle comme principe fondamental de l’organisation de notre société et de la mise en œuvre du soin.
En effet, elles visent à mettre fin au paradoxe selon lequel une personne peut prendre l’ensemble des décisions qui orienteront son existence, indiquer par testament ce qu’il doit advenir de ses biens après son décès, mais serait privée d’un tel droit à la fin de sa vie, au moment de sa mort.
Il est incontestable que le procédé de l’assistance médicalisée pour mourir proposé complète la logique des soins palliatifs. Ces derniers visent à apaiser la douleur, même si leur délivrance implique éventuellement d’accélérer le moment du décès.
L’assistance médicalisée pour mourir tend pour sa part à mettre fin à la souffrance résultant de la perception que la personne a de sa propre situation et à lui ouvrir la possibilité de choisir, le moment venu, les conditions de sa fin de vie. Il existe donc non pas des contradictions, mais des réponses différentes à des demandes qui sont différentes.
D’ailleurs, ces propositions de loi confient la mission de mettre en œuvre l’aide médicalisée pour mourir non pas aux équipes de soins palliatifs, mais au médecin traitant ou au médecin saisi de la demande. Cette démarche entend faire preuve d’honnêteté et de clarté. En effet, les options consistant à laisser l’assistance à mourir dans la clandestinité, comme c’est malheureusement aujourd’hui le cas, ou à la confier au monde associatif, comme cela se pratique en Suisse, sont porteuses de trop d’incertitudes et de risques pour qu’un tel choix puisse être effectué en conscience.
Pour ma part, j’ai voté en faveur de ces propositions de loi pour la légalisation de l’aide active à mourir et ce pour quatre raisons.
Premièrement, ces textes répondent aux souhaits de la personne en lui permettant de rester maître de toutes les décisions concernant la fin de son existence et de la manière dont elle souhaite la vivre avant de disparaître. La volonté du patient doit être absolument respectée.
Deuxièmement, ils permettent aux médecins confrontés à des cas douloureux d’une clause de conscience professionnelle. On leur offre ainsi un cadre juridique dans lequel ils pourront répondre à cette demande d’une manière humaine, sans pour autant se mettre eux-mêmes dans l’illégalité, ce qui est le cas aujourd'hui.
Troisièmement, les propositions de loi répondent aux proches, qui finissent parfois par accéder aux souhaits de la personne malade, par amour, en se mettant eux-mêmes en danger devant la justice. Il faut mettre un terme à cette situation horrible. Il n’est pas digne de penser que le malade, avant de fermer les yeux, ne sache pas ce qu’il adviendra judiciairement à celui qui va l’aider.
Quatrièmement, les textes que nous avons examiné répondent aux juges, souvent cléments, mais qui doivent pouvoir apporter une réponse au nom du peuple français, et non pas simplement en leur âme et conscience.
Au final, ces propositions de loi ne tendent pas à faire de l’assistance médicalisée à mourir la seule mort possible. Elles ne visent ni à la banaliser, ni à la généraliser et encore moins à l’imposer à toutes et à tous. Elles n’ont pour objectif que de permettre à celles et ceux qui le souhaitent de partir dignement.
Demeurant à votre disposition,
Je vous prie de croire, Monsieur le Président, à l’expression de mes salutations distinguées.
Sujet: Re: Janvier 2011 fin de vie échec d'une loi 13.05.13 12:40
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Sujet: Re: Janvier 2011 fin de vie échec d'une loi 13.05.13 13:13
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Sujet: Re: Janvier 2011 fin de vie échec d'une loi 08.08.13 11:25
Une leçon de vie
Assistance médicalisée pour mourir -
Par François Autain / 25 janvier 2011 Mes chers collègues, afin d’éclairer le vote que vous allez émettre sur l’article 1er de cette proposition de loi, je voudrais livrer à votre réflexion le témoignage que nous avons reçu de Montpellier, avec un certain nombre de mes collègues, le 17 janvier dernier. Je vous en donne lecture : « Madame la sénatrice, monsieur le sénateur, « Par la présente, je viens vous demander de voter la loi pour l’aide active à mourir. Le Président de la République a exprimé en 2007 que “l’on ne devait pas rester les bras ballants devant la souffrance d’un être humain, tout simplement parce qu’il n’en peut plus” ; de nombreux Français à travers des sondages se sont exprimés en ce sens. « Je vous demande donc de vous affranchir de tout corporatisme religieux, politique ou autre et de voter en tant qu’individu cette loi. « Si demain, vous-même étiez confronté à la situation de Vincent Humbert, bloqué dans un lit, relié à des machines, sans pouvoir parler : que souhaiteriez-vous ? « Depuis ma naissance, je lutte contre une maladie orpheline dont je ne suis même plus sûre du nom, une recherche génétique est entamée depuis deux ans. J’ai cinquante-deux ans, je n’ai marché qu’à sept ans et tous mes gestes ont été la résultante d’opérations et de rééducation. Ma vie se résume en un mot : “combats”. « Tout a été à conquérir, tout a été difficile et compliqué. Rien n’est vraiment adapté spontanément et vivre avec un handicap n’est pas chose facile. « Aujourd’hui, suite à un divorce, je viens de m’installer à Montpellier, ville que je pensais plus équipée et là encore je déchante ; je suis bloquée depuis plusieurs jours dans mon appartement, les transports sont insuffisants pour la demande et je ne peux même pas me divertir en allant une fois par semaine au cinéma. « Je me sens prisonnière de mon corps et de mon appartement, si confortable soit-il. « Je n’accepte pas l’isolement et de ne pas pouvoir parler avec quelqu’un en dehors de mes auxiliaires de vie qui interviennent deux heures par jour. « Toutes les nuits, je suis raccordée à un appareil respiratoire et je sais que l’avenir est incertain, que demain je risque de devoir être assujettie en permanence à une machine, avec de l’oxygène, que je ne pourrai peut-être plus du tout marcher et même parler. « Je n’accepte pas cette dégradation, je veux choisir mon destin. J’ai déjà enduré trop de souffrances, trop de douleurs. Alors oui, comme Jean-Luc Romero, président de l’ADMD, je vous demande de ne pas me voler mon ultime liberté ! « Je veux partir dignement, je ne veux pas de trachéotomie. Au-delà de la souffrance physique, il y a la souffrance morale et personne, je dis bien personne, n’est en droit de se substituer à moi pour mon choix de vie ou de mort. « C’est mon corps et je dois pouvoir en disposer comme je l’entends. Mes proches, ma famille ne partagent pas forcément mon point de vue, ils voudraient me garder auprès d’eux, me voir sourire encore et encore, mais viendra un jour où je ne sourirai plus, où je ne serai qu’un magma de douleurs. « Alors, il faudra qu’ils me lâchent la main, qu’ils me laissent m’envoler et qu’ils reconnaissent que j’ai mérité ce long repos. « J’aurai donné le meilleur de moi, j’aurai reçu au centuple. Inutile de s’acharner stérilement, à quoi bon gagner quelques jours, lorsqu’il n’y a aucune perspective d’amélioration et que tout converge vers une déchéance ? « Je vous remercie, madame la sénatrice, monsieur le sénateur, pour le temps que vous venez d’accorder à la lecture de ma lettre. Je souhaite qu’elle reçoive un écho favorable dans votre cœur de femme ou d’homme, et qu’elle vous incite à voter cette loi, qui est une loi de bon sens, mais qui nécessite un certain courage de votre part. « Je vous prie d’agréer, madame la sénatrice, monsieur le sénateur, mes sincères salutations. » Je pense qu’il n’y a rien à ajouter à cette leçon de vie.
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Sujet: Re: Janvier 2011 fin de vie échec d'une loi 08.08.13 12:04
Un débat sur l'aide active à mourir, prévu le 16 novembre au Sénat, va être reporté à janvier prochain dans de meilleures conditions, s'est félicité mardi à Huningue (Haut-Rhin) le président de l'Association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD), Jean-Luc Romero. — Joel Saget AFP/Archives
Un débat sur l'aide active à mourir, prévu le 16 novembre au Sénat, va être reporté à janvier prochain dans de meilleures conditions, s'est félicité mardi à Huningue (Haut-Rhin) le président de l'Association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD), Jean-Luc Romero. Le président de l'ADMD a estimé que la durée accordée à un tel débat aurait été trop limitée en novembre, s'agissant d'une proposition de deux élus socialistes. En janvier prochain, le débat pourra alors durer plusieurs heures, car il concernera aussi des textes proposés par une vingtaine de sénateurs UMP et des élus communistes, a-t-il souligné. En accord avec la présidente de la commission des Affaires sociales, ces sénateurs demandent un vrai débat "qui pourrait être l'occasion d'une énorme surprise", selon lui. 94% des Français se déclarent favorables à une loi autorisant l'euthanasie, selon un récent sondage Ifop pour Sud-Ouest Dimanche, a rappelé M. Romero. "Cela prouve le décalage total qu'il y a entre les Français et le gouvernement, qui s'arc-boute sur une position liberticide", d'après lui. L'ADMD n'est pas opposée aux soins palliatifs mais milite pour une loi sur l'euthanasie. "C'est une loi pour tout le monde, car si vous êtes contre, jamais vous ne serez aidé, et si vous êtes pour, vous serez aidé", a-t-il argumenté. M. Romero, par ailleurs conseiller régional d'Ile-de-France, avait participé mardi matin au Trocadéro à Paris à un rassemblement de son association, qui revendique 48.000 adhérents en France. Dans l'après-midi il s'est entretenu à Huningue avec des représentants d'associations suisses et allemande en faveur du suicide assisté. Les participants à cette rencontre ont ensuite jeté des roses blanches dans le Rhin depuis un pont, en hommage "à tous les anonymes qui n'ont pu choisir de mourir dignement".
Sujet: Re: Janvier 2011 fin de vie échec d'une loi 08.08.13 12:55
Tuer en douceur ou la barbarie silencieuse, une nouvelle tentative pour légaliser l’euthanasie par Mgr Ginoux
Mgr Bernard Ginoux
La commission des Affaires sociales du Sénat a adopté un projet de loi visant à légaliser l’euthanasie. Ce projet va être présenté aux sénateurs et discuté ce mardi 25 janvier 2011.
Il relance à nouveau le droit de demander la mort et de la donner, alors que la loi Léonetti de 2005 avait refusé cette possibilité. Cette loi votée le 22 avril 2005 ne mettait cependant pas un terme au débat. D’abord parce qu’elle laissait quelques points discutables comme celui de l’alimentation artificielle en fin de vie. Mais, plus encore, son auteur affirmait qu’il travaillait à la question de « l’exception d’euthanasie » (La Croix, 7 avril 2008), ce qui veut dire que dans certains cas le législateur pouvait autoriser à donner la mort. Dans le même temps l’ADMD (Association pour le droit de mourir dans la dignité) et son très influent président revenaient sur cette loi parce qu’ils en étaient insatisfaits. C’est ainsi qu’ils ont pu faire avancer un nouveau projet voté ce 18 janvier par la commission des Affaires sociales du Sénat.
Que dit ce projet ?
L’article premier le résume : « Toute personne capable majeure, en phase avancée ou terminale d’une affection accidentelle ou pathologique grave et incurable, lui infligeant une souffrance physique ou psychique qui ne peut être apaisée ou qu’elle juge insupportable, peut demander à bénéficier d’une assistance médicalisée permettant, par un acte délibéré, une mort rapide et sans douleur ».
Il s’agit bien de procurer la mort volontairement, de tuer une personne.
Bien entendu, dans la suite, les mots employés et les considérations avancées se veulent très « soft », laissant entendre qu’il s’agit de rechercher le bien des personnes malades et de leur éviter une fin tragique, prétendue indigne. On affirme ne prendre en compte que des situations extrêmes et le faire dans la compassion. L’appréciation des situations demeurera toujours subjective, surtout quand le texte parle de souffrances « psychiques ». Par ailleurs le discours est séduisant puisque la loi permettrait ainsi de « devenir maître de son parcours de fin de vie » ! Mais que pouvons-nous répondre à cette nouvelle tentative puisque, depuis bientôt trente ans (à l’époque avec le sénateur Caillavet, de Lot-et-Garonne, né en 1914, et aujourd’hui militant à l’association « Ultime Liberté » ), de manière récurrente, ce courant de pensée veut imposer à la société française une loi autorisant l’euthanasie.
Pendant sept ans j’ai eu la charge des aumôneries d’hôpitaux et de la pastorale de la santé dans mon diocèse d’origine. Le nombre de personnes en fin de vie avec des pathologies lourdes (sida, cancer, etc.) que j’ai approchées – chrétiennes ou non – est important. J’ai vu des situations insoutenables. Je compte sur les doigts d’une main les personnes qui ont, à un moment, demandé vraiment la mort. J’ajoute que c’était la période où se mettaient en place – avec beaucoup d’oppositions et de difficultés – les soins palliatifs. Chaque fois que l’équipe des soins palliatifs pouvait intervenir, la personne retrouvait la paix. Malheureusement les efforts réalisés pour les soins palliatifs sont encore insuffisants. La demande de mort est un appel, l’expression d’une détresse, le besoin d’être accompagné. Si les soins palliatifs et l’entourage prennent en charge assez tôt cet accompagnement, la fin de la vie n’est plus une tragédie, même si mourir est toujours un passage angoissant. Au-delà de cette expérience personnelle rapidement évoquée, il y a les principes même du vivre ensemble que le droit de tuer remet de fait en question.
La médecine
La médecine est faite pour soigner. Comment lui demander de poser un acte de mort ? Quelle confiance pourrait avoir le patient devant la blouse blanche qui entre dans sa chambre ? Quelle perspective que de faire disparaître le malade qui est trop gênant ? Comment des « soignants » peuvent-ils devenir des « tueurs » (même en douceur !). Les tenants de l’euthanasie répondront que si le geste est légal les soignants n’auront pas d’états d’âme ou de scrupules de conscience. Une connaissance élémentaire de l’être humain nous apprend le contraire : un acte de mort reste toujours un poids pour celui qui le commet.
La souffrance
Comment apprécier le caractère « insupportable » d’un mal, sachant que la douleur physique doit être soulagée et peut l’être si le suivi palliatif est rigoureux. Comment juger des opinions très contradictoires de la personne malade et de son entourage ? Quelles pressions imaginer sur celle-ci ? Les psychologues, les études sur les réactions des malades en phase terminale montrent des variations très grandes, depuis le déni de la maladie jusqu’aux pensées suicidaires.
Il n’est pas possible de tenir pour certaine une demande de mort. Ces dernières années l’un ou l’autre cas de situations extrêmes (affaires Humbert, Sébire ) exploitées médiatiquement où il y avait une demande publique d’aide à mourir ont montré, une fois l’émotion passée, l’ambiguïté de ces cas. Ils sont d’ailleurs très rares et aussitôt survalorisés parce que les militants de l’euthanasie en ont besoin pour justifier leur revendication.
Le principe d’humanité
Reprenant ce titre à un écrivain connu (Jean-Claude Guillebaud) je remarque que je n’ai pas besoin d’invoquer la foi chrétienne pour affirmer que donner la mort volontairement est contraire au principe d’humanité, au pacte social qui permet le vivre-ensemble. C’est, en effet, de l’être humain qu’il s’agit et de la solidarité humaine : lorsque la loi permet de tuer (au nom d’un bien mais quel bien ?) elle donne à des êtres humains pouvoir absolu sur d’autres. Le fait d’être une équipe, dans un hôpital, avec des « spécialistes » ne change rien à la réalité. La mort programmée d’une personne, que cette équipe va désigner comme « indigne » de vivre, en raison de son état d’anéantissement physique ou psychique (cf. le projet de loi), est un crime. Au nom de l’humanité, au nom du respect de toute vie humaine jusqu’à sa fin naturelle, au nom de la solidarité avec les plus faibles, nous devons proclamer la « dignité » intangible de chaque être humain. L’oublier c’est entrer dans la barbarie.
Le 21 janvier 2011
(pour le Bulletin Catholique n° 2 du diocèse de Montauban du 26 janvier 2011)
Sujet: Re: Janvier 2011 fin de vie échec d'une loi 08.08.13 13:14
Autoriser l'euthanasie instaurerait un régime de peur - Cardinal Barbarin Publiée le 28-01-2011
Alors que le Sénat examine une proposition de loi légalisant l'euthanasie, l'archevêque de Lyon s'inquiète des conséquences que pourrait entraîner l'autorisation de la « mort assistée ».
La loi sur la fin de vie ne reconnaît aucun droit à donner la mort et propose de bons repères insistant sur les soins palliatifs et le refus des traitements disproportionnés. Pourtant, la commission sociale du Sénat vient de donner le feu vert à la discussion ouvrant la voie à l'euthanasie en cas de « souffrance physique ou psychique ne pouvant être apaisée ou jugée insupportable » . Invoquant des cas extrêmes, des parlementaires omettent de mettre en valeur le beau travail accompli dans les unités de soins palliatifs. On essaie d'introduire une idée uniformisée de mort douce, alors que l'euthanasie est loin d'être douce, pour les soignants comme pour le malade et sa famille. Je salue cette « exception française », par laquelle nos législateurs ont manifesté la permanente vocation de la douce France à prendre en charge les plus fragiles, jusqu'au terme de leur vie terrestre.
La légalisation de l'euthanasie briserait la confiance entre soignants et soignés. Mme Schnapper écrivait que « la société moderne repose sur la confiance objective entre les individus grâce aux relations politiques et économiques, le droit, l'argent, les institutions. Mais les relations directes entre les personnes ne sauraient être oubliées, qui demeurent au coeur de la vie humaine. » La médecine est un lieu où il serait terrible d'attenter à l'amitié entre les hommes, celle où le faible se dit : « Celui-ci veut mon bien, même en me défendant contre ma crainte d'affronter la situation présente. » Si l'euthanasie est légalisée, le patient aura peur même des interventions thérapeutiques légitimes.
La légalisation de l'euthanasie pousse à l'exclusion des personnes les plus vulnérables. Si un homme est seul, sans personne qui le protège, si le recours à la mort légale lui est offert, le voici en danger, à la merci des fluctuations de sa sensibilité. La demande de mourir est souvent un appel au secours : « Tout le monde me laisse tomber. Est-ce que j'ai encore du prix aux yeux de quelqu'un ? » La dignité d'un homme, c'est son droit à être aimé, toujours.
La légalisation de l'euthanasie est contradictoire avec le développement des soins palliatifs, qui permettent de répondre à la plupart des douleurs des grands malades. Pourquoi 80 %, paraît-il, du budget des soins palliatifs ne leur est pas encore alloué ? Est-il vrai que le fait de renoncer aux opérations chirurgicales réalisées in extremis sans espoir de guérison, dégagerait une part de cet argent ? J'ai encore à l'esprit la fin de Jean-Paul II : en février 2005, on l'opère d'une trachéotomie pour qu'il puisse continuer de respirer. Mais quand, fin mars, on envisage une gastrectomie, il refuse. On continue de le nourrir et de l'hydrater, mais il n'est pas question de tenter une nouvelle opération, aussi douloureuse qu'inutile. Et le 2 avril au soir, il s'en va. « Avec la mort, la vie n'est pas détruite, elle est transformée. »
M. Badinter notait qu'un droit à la mort assistée revient à aider ceux qui prendraient la décision de se suicider. « J'aurais la crainte, disait-il, d'une forme d'incitation, je n'ose pas dire de provocation au suicide. L'être humain est fragile. L'angoisse de mort est présente. Chez certains, face à une épreuve, il y a une tentation de mort inhérente à la condition humaine. » Avec lui, je veux dire que la mort est une peine toujours injustifiable, pour un coupable, à plus forte raison pour un innocent.
Y voir la « dernière liberté » constitue un piège. Comme si cet acte était pleinement libre, alors que plus de la moitié des rescapés du suicide ne récidivent pas. Comme si le suicide ne touchait que celui qui y recourt. Sa violence traverse le corps social et sa mémoire reste vive dans le coeur des proches. Dans sa réclusion, Etty Hillesum recopie ces lignes de W. Rathenau à une femme tentée par le suicide : « J'ai moi-même envisagé cette éventualité, que je dois aujourd'hui rejeter. Je considère qu'une telle fin est une injustice, une offense à l'esprit. C'est un manque de confiance vis-à-vis du bien éternel, une infidélité à l'égard de notre devoir le plus intime : celui d'obéir à une loi universelle. Celui qui se tue est un meurtrier, non seulement de lui-même, mais aussi d'autrui. Une telle mort, j'en suis profondément convaincu, n'est pas une libération, comme peut l'être une mort naturelle et innocente. Toute violence commise en ce monde prolifère, comme chacun de nos actes. Nous sommes ici pour porter une partie de la souffrance du monde, en lui offrant notre coeur, non pour l'aggraver par un acte de violence. »
On objectera que la proposition de loi ne vise que des cas où la mort naturelle surviendrait en toute hypothèse, et dans de brefs délais. Si c'est le cas, tendons la main, comme les soignants des services de soins palliatifs qui font honneur à la médecine. En vérité, dans les pays où elle est établie, l'euthanasie (qu'on voudrait permettre même aux mineurs) touche aussi des gens qui ne sont pas en situation de mort imminente, notamment des personnes dépressives.
« Le véritable amour chasse la crainte », dit la Bible. Bien des malades et des familles ont fait cette expérience : une maladie douloureuse a été traversée. L'amour, jour après jour, a permis de dépasser la peur. Comme homme ayant vécu la maladie, comme croyant, attentif à l'interdit fondateur de toute société : « Tu ne tueras pas » , je veux dire aux sénateurs : ne doutez pas de l'amour !
Sujet: Re: Janvier 2011 fin de vie échec d'une loi 08.08.13 14:03
Euthanasie : retour d’un vieux débat Par Eric Favereau — 25 janvier 2011 à 00:00 (mis à jour à 10:55)
La commission des Affaires sociales du Sénat a adopté mardi une proposition de loi visant à légaliser l'euthanasie, 'un grand succès' pour Jean-Luc Romero, président de l'association pour le droit à mourir dans la dignité (ADMD) et conseiller régional PS d'Ile-de-France.
La commission des Affaires sociales du Sénat a adopté mardi une proposition de loi visant à légaliser l'euthanasie, "un grand succès" pour Jean-Luc Romero, président de l'association pour le droit à mourir dans la dignité (ADMD) et conseiller régional PS d'Ile-de-France. AFP Philippe Huguen
Une proposition légalisant la mort assistée est débattue ce soir au Sénat, mais François Fillon s’y est déjà opposé. Une polémique paradoxale alors que la loi sur le «laisser mourir» est peu appliquée.
Euthanasie : retour d’un vieux débat
L’euthanasie ou le débat immobile. Convictions contre convictions. Comme un jeu de rôle figé, loin de la réalité des pratiques. Cette fois, c’est au tour de quelques sénateurs d’avancer une proposition pour légaliser l’euthanasie, adopté la semaine dernière en commission. Ce texte va être débattu ce soir, au Sénat. Avant même que la discussion ne débute, le Premier ministre s’y est fermement opposé, hier, dans une tribune au journal le Monde. «La question est de savoir si la société est en mesure de légiférer pour s’accorder le droit de donner la mort. J’estime que cette limite ne doit pas être franchie», écrit François Fillon (UMP). Qui précise sa conviction : «A titre personnel, je suis hostile à la légalisation d’une aide active à mourir, ce n’est pas ma conception du respect de la vie humaine et des valeurs qui fondent notre société.»
Quelques heures auparavant, le ministre de la Santé, Xavier Bertrand, avait indiqué qu’il n’était pas non plus favorable au texte sur l’euthanasie. «Je suis pour le développement des soins palliatifs, je suis pour l’application pleine et entière de la loi de 2005», dite loi Leonetti, qui encadre le «laisser mourir», un dispositif dans lequel tout geste destiné à provoquer directement le décès reste interdit.
«Cadre intime». Chaque année, depuis dix ans, des parlementaires, de droite ou de gauche, déposent régulièrement un projet de loi permettant l’euthanasie, dans certaines conditions. Ils le font d’autant plus aisément qu’ils se savent appuyés par des sondages, montrant que plus de 90% des Français y seraient favorables. Aussitôt, de fortes oppositions émergent, et cela se termine toujours par un refus du législateur. Jusqu’à la fois prochaine.
Dans le cas présent, ce sont trois sénateurs, - un socialiste, un communiste, un UMP -, qui ont déposé au départ chacun leur proposition, finalement réunies dans un seul texte en commission. Tous trois partent d’un constat : «L’absence de législation conduit, dans les faits, un certain nombre de personnes en fin de vie au suicide, avec les conséquences terribles pour la personne et son entourage qui en résultent.»
Le rapport de la commission note, non sans justesse : «La question de la mort assistée devrait rester dans le cadre intime, mais cette formule est impossible si l’on veut protéger l’entourage de la personne qui souhaite anticiper le moment de son départ.» La proposition de loi vise à donner «un cadre à une assistance médicalisée pour mourir». Article premier : «Toute personne, en phase avancée ou terminale d’une affection accidentelle ou pathologique grave et incurable, lui infligeant une souffrance physique ou psychique qui ne peut être apaisée ou qu’elle juge insupportable, peut demander à bénéficier, dans les conditions prévues au présent titre, d’une assistance médicalisée permettant, par un acte délibéré, une mort rapide et sans douleur.»
Ce droit ne concernerait donc que des patients en état terminal de maladie. Pour l’exercer, les sénateurs imaginent un processus un peu compliqué : d’abord, la personne demande à son médecin traitant une assistance médicalisée pour mourir. Celui-ci saisit deux confrères, puis le médecin traitant et les médecins qu’il a saisis vérifient, lors de l’entretien avec la personne malade, le caractère libre, éclairé et réfléchi de sa demande. «Dans un délai maximum de huit jours suivant cette rencontre, les médecins lui remettent, en présence de sa personne de confiance, un rapport faisant état de leurs conclusions sur son état de santé. Si les conclusions des médecins attestent que l’état de santé de la personne malade est incurable, que sa souffrance physique ou psychique ne peut être apaisée ou qu’elle la juge insupportable, que sa demande est libre, éclairée et réfléchie et s’ils constatent alors qu’elle persiste, en présence de sa personne de confiance, dans sa demande, l’assistance médicalisée pour mourir doit lui être apportée.» Le texte précise : «La personne malade peut à tout moment révoquer sa demande.»
Le médecin peut refuser de porter son concours, mais celui-ci est alors tenu de mettre le malade en contact avec un autre médecin. Le projet des sénateurs prévoit que cette demande est aussi recevable lorsque la personne n’est plus consciente ; celle-ci ayant, au préalable, rempli des directives anticipées claires sur son souhait. Enfin, est demandé que soit «institué auprès du garde des Sceaux, et du ministre de la Santé, une commission nationale de contrôle des pratiques».
«Volonté». Que va-t-il se passer lors de ce débat au Sénat ? Tout reste ouvert. Des manifestations sont prévues, des partisans comme des opposants. «La loi Leonetti - qui permet au patient d’arrêter ses traitements quitte à en mourir -, est déjà si mal appliquée, lâche un sociologue qui travaillesurla fin de vie. En France, quelle que soit sa conviction, on a toujours autant de difficultés à entendre simplement la volonté du patient.» Eric Favereau
Sujet: Re: Janvier 2011 fin de vie échec d'une loi 08.08.13 14:26
Pour une certaine forme d'euthanasie dans les Unités de Soins Palliatifs L'euthanasie et les soins palliatifs ne sont pas contradictoires. Le Monde.fr | 28.01.2011 à 09h58 • Mis à jour le 28.01.2011 à 09h58 | Par Professeur Jean-Louis Lejonc, Unité de Soins Palliatifs Groupe Hospitalier Henri-Mondor
Le 12 septembre 1990, je publiais dans votre journal un article intitulé "Soins palliatifs : danger". J'ai regretté que le titre proposé (La Mort est-elle une maladie ?) ait été modifié qui me semblait mieux refléter mon interrogation. Elle reste d'actualité malgré les efforts déployés pour développer les soins palliatifs et faire évoluer la loi. Je regrette comme autrefois que les soins palliatifs demeurent un exercice spécifique : le corpus de connaissances afférent devrait être maîtrisé par tous les médecins et notamment ceux concernés au premier chef, oncologues, cancérologues et autres spécialistes en charge des cancéreux. Ils répugnent souvent à s'approprier les savoir-faire élaborés au sein des Unités de Soins Palliatifs et ne considèrent guère celles-ci - ou peu, ou mal, ou trop tard.
Le Sénat se penche une nouvelle fois sur la question : l'opposition entre soins palliatifs et euthanasie devrait se manifester et mettre en scène les promoteurs de ceux-là et les avocats de celle-ci. Je suis désormais médecin dans une Unité de Soins Palliatifs et je souhaite apporter un éclairage différent à ce débat.
Le développement de ces unités a beaucoup apporté à la qualité des soins aux patients quand l'espoir d'une guérison n'existe plus. Ce sont des soins actifs, ayant pour but d'apaiser les symptômes, les douleurs, le râle, de prendre en compte l'épuisement, la détresse physique et morale, d'aider les patients et les familles à passer ce cap atroce. Et préserver la dignité. Il est à ce titre singulier que la principale association militant en faveur de l'euthanasie se désigne pour le droit de mourir dans la dignité. Comme si les soins palliatifs étaient indignes. Ce qui est indigne, c'est l'acharnement, l'obstination déraisonnable. D'autres sauront mieux que moi l'expliquer
Je veux ici défendre l'idée qu'il n'y a pas nécessairement contradiction entre soins palliatifs et euthanasie. Et suggérer que la légalisation d'une certaine forme euthanasie semble inéluctable pour deux raisons : l'une est noble, l'autre est financière.
La première résulte du progrès spectaculaire apporté par les Unités de Soins Palliatifs dans le maniement des médicaments antalgiques et sédatifs. Lorsque le terme arrive, que la mort qui rodait est toute proche, nous avons le souci de tout faire pour que les douleurs ne reprennent pas. Parfois le patient décède rapidement et dans l'apaisement. Parfois brutalement. Mais parfois lentement et au prix d'une augmentation importante des doses de morphine ou opiacés apparentés. Lorsque l'essoufflement devient un râle, un râle affreux et bruyant, nous prescrivons des médicaments qui le soulagent. Et aussi quand l'angoisse de mort est insupportable. Morphine et sédatifs à fortes doses plongent alors le mourant dans le coma. Un coma bienvenu mais qui peut durer longtemps. Très longtemps. Parfois des jours et des jours. La loi autorise le "laisser mourir". Mais en dépit de l'arrêt de toute alimentation, de toute hydratation, la mort se fait attendre parfois si longtemps ... Et alors, alors que tout a été fait, que tout a été dit, que le patient avait pu converser avec ses proches, nouer ou renouer des liens, exprimer ce qu'il avait à exprimer, aller au bout de la vie, alors qu'il n'est plus qu'un pauvre corps décharné inerte et inconscient, ça s'éternise et on attend. On attend.
- Alors, docteur, c'est pour quand ? - Je ne sais pas, vous savez, on ne peut pas savoir, c'est une question d'heures, de jours, peut-être ... Mais rassurez-vous : il ne souffre pas, il n'est déjà plus avec nous, vous savez …
- Oui, c'est vrai, on vous remercie … Vous savez, c'est formidable ce que vous avez fait ici ... Dire qu'on ne voulait pas qu'il aille en soins palliatifs ! Grâce à vous, il a été mieux vers la fin ... Mais, maintenant, maintenant qu'il est inconscient et qu'il ne se réveillera plus, on ne peut pas "faire quelque chose ?" Est-ce que ça a du sens ? Maintenant qu'on ne peut plus communiquer avec lui ? Ça a du sens ? - Non. Il faut attendre.
Attendre ? Attendre quoi ? Attendre. Juste pour attendre. Car ça peut durer des jours ...
Parfois une semaine. Une attente inutile, perverse, incompréhensible, sans objet devant un corps inerte que l'on vient visiter par devoir. Une attente qui ne pourra qu'entretenir la culpabilité.
- Tu vois Ginette, c'était bien qu'il ait été transféré en soins palliatifs, mais, en fin de compte, pourquoi ils l'ont laissé comme ça inconscient si longtemps pour rien ? Y savaient bien qu'il allait mourir, et–y-z-ont rien fait… Tu te souviens comme il était horrible à voir à la fin ? Comme un zombie … Plutôt que ça, j'aimerais, dans de telles situations, que l'on ait le droit "faire quelque chose".
La seconde raison qui militera pour la légalisation d'une certaine forme d'euthanasie est d'ordre économique. Les soins coûtent cher. Très cher. L'offre de soins ne peut que diminuer dans notre pays, qui grève les budgets de la fonction publique hospitalière et de la sécurité sociale. Les générations qui gouverneront après 2020 devront faire des choix budgétaires en la matière. Beaucoup de patients relevant des soins palliatifs sont âgés et/ou retraités de la vie active. Il est vraisemblable que les baby-boomers comateux en fin de vie ne seront pas une priorité. Car les soins palliatifs coûtent cher. Très cher en raison des densités de personnel soignant requises pour assurer convenablement des prescriptions médicamenteuses complexes et techniques et prendre du temps, le temps de la douceur pour laver les corps douloureux et accablés, du temps pour écouter les mots qui restent à dire, du temps pour manifester empathie et compassion auprès des mourants et de leurs entourages. Du temps pour essuyer la merde et les vomissures qui souillent les chairs et les âmes.
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Sujet: Re: Janvier 2011 fin de vie échec d'une loi 12.10.13 19:24
Les Français préfèrent les soins palliatifs à l'euthanasie. LAMOUREUX Marine , le 17/01/2011 à 0h00
Sondage contre sondage. À quelques jours de la discussion au Sénat de propositions de loi légalisant l'euthanasie (La Croix du 10 janvier), un sondage OpinionWay réalisé début janvier auprès d'un millier de personnes (1) montre que les Français sont très prudents face à une telle éventualité.
Loin des résultats habituels sur l'aide active à mourir - selon la dernière enquête en date, de l'Ifop, publiée en novembre, 94 % des Français seraient favorables à une loi autorisant l'euthanasie -, le sondage OpinionWay donne des résultats beaucoup plus nuancés. Ainsi, il indique que 60 % des personnes interrogées « préfèrent le développement des soins palliatifs à la légalisation de l'euthanasie » et que, pour 52 % d'entre elles, une telle voie comporte des « risques de dérives ». De même, lorsqu'on les questionne sur leur entourage, les sondés affirment, à 63 %, préférer « qu'un de leur proche gravement malade bénéficie de soins palliatifs plutôt que de subir une injection mortelle », selon OpinionWay.
« Rien d'étonnant », selon le président de l'Association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD). « Il est normal que les Français soient favorables aux soins palliatifs. Mais dans certains cas, ils sont insuffisants, notamment parce qu'il y a des souffrances psychiques qu'on ne peut pas soulager », observe Jean-Luc Romero. Ce n'est donc pas contradictoire avec le fait que les Français souhaitent un droit à l'euthanasie, ajoute-t-il, « la question est simplement mal posée dans ce sondage ».
Sylvain Pourchet, responsable de l'unité de soins palliatifs de l'hôpital Paul-Brousse, à Villejuif (Val-de-Marne), estime au contraire qu'avec l'enquête OpinionWay, on aborde enfin « le sujet avec subtilité : ces résultats nous montrent que la réalité est plus nuancée qu'on veut nous le faire croire et que les Français ont une vraie réflexion sur un sujet complexe ». Ainsi parmi la majorité soulignant le risque de dérives (62 % des seniors interrogés et 55 % des plus diplômés), 57 % craignent que « des malades non consentants soient euthanasiés », notamment les personnes souffrant de démence, et 56 %, que « des malades vulnérables (personnes âgées ou handicapées) subissent des pressions pour accepter une euthanasie ». 56 %, enfin, redoutent l'entrée en ligne de compte de « raisons financières ».
Dans cette enquête, la méconnaissance de ses droits par la population est également frappante. 68 % des sondés ignorent qu'il existe en France une loi interdisant l'acharnement thérapeutique (66 % des plus diplômés). Un terreau sur lequel s'enracinent les demandes d'euthanasie, poursuit Sylvain Pourchet, car « c'est précisément l'acharnement thérapeutique qui conduit à la plupart des demandes d'euthanasie ». Il conclut : « Le sondage nous enseigne donc deux choses : qu'il faut absolument faire connaître la loi Leonetti de 2005, mais aussi mieux comprendre pourquoi certains patients demandent à mourir. Or on s'apprête à légiférer dans la précipitation, sans ces données. » Une enquête scientifique sur ce thème vient d'être lancée avec le soutien de l'Observatoire de la fin de vie, mais ses résultats ne seront pas connus avant 2012.
Le décret sur l'allocation de fin de vie enfin publié
Près d'un an après le vote de la loi créant une « allocation journalière d'accompagnement d'une personne en fin de vie », le décret vient d'être publié au Journal officiel. Cette allocation, d'un montant de 53,17 € par jour, sera versée aux salariés (mais aussi aux travailleurs non salariés, exploitants agricoles et professions libérales) qui suspendent ou réduisent leur activité professionnelle pour accompagner à domicile un proche en phase avancée ou terminale d'une affection grave et incurable, pendant une période de vingt et un jours. Le système se veut souple, permettant, lorsque le salarié n'interrompt que partiellement son activité, de toucher l'allocation pendant quarante-deux jours. Un second décret, concernant les fonctionnaires, devrait être publié dans les prochains jours.
(1) Sondage effectué en ligne du 7 au 10 janvier 2011 auprès d'un échantillon de 1 015 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas, pour la Société française d'accompagnement et des soins palliatifs (Sfap) notamment.
Sujet: Janvier 2011 échec d'une loi 12.10.13 20:24
Communiqué de l' A.D.M.D. (droit de mourir dans la dignité) Publié le 25 janvier 2011
Demain, le Sénat discutera en séance publique la proposition de loi relative à l’assistance médicalisée pour mourir.
En lui-même, l’événement est considérable puisque c’est la première fois dans l’histoire de notre pays que la Chambre Haute se saisit de cette question.
D’ores et déjà, nous devons remercier les sénateurs Alain Fouché, Guy Fischer et Jean-Pierre Godefroy de leur mobilisation, ainsi que les sénateurs François Autain, Patricia Schillinger et Dominique Voynet.
Compte tenu du rapport des forces au palais du Luxembourg, de la pression exercée sur les parlementaires par les pouvoirs publics, les associations liberticides pro-life, les représentants des lobbies médical et religieux, il est peu probable que le vote nous soit favorable.
Comme à l’Assemblée nationale en novembre 2009, ce scrutin sera l’occasion de nous compter en vue des prochaines élections de mars 2012 et de montrer notre force et notre conviction.
A partir de ce jour, nous pourrons choisir nos représentants en fonction du respect qu’ils affichent à notre égard : impensable de voter pour celles et ceux qui nous méprisent.
Hauts les cœurs ! Nous obtiendrons cette loi d’Ultime Liberté !
Sujet: Re: Janvier 2011 fin de vie échec d'une loi 02.11.13 14:32
le mardi 25 janvier 2011 Thomas Legrand Une proposition de loi visant à légaliser l’euthanasie Ecouter l'émission
**Les sénateurs s’apprêtent à discuter en séance, d'une proposition de loi visant à légaliser l’euthanasie. Oui c’est un texte qui a été voté la semaine dernière en commission des affaires sociales du Sénat. Il ne sera sans doute pas adopté à la fin mais il relance, encore, le débat sur le droit à mourir. Rappelons que c’est une proposition de loi et non pas un projet de loi, ce sont donc des parlementaires qui en sont à l’origine, et, signalons-le, le texte adopté en commission résulte de la fusion de trois propositions différentes de trois sénateurs communistes, socialistes et UMP. Sur ces sujets, bien sûr, la frontière droite/gauche est assez inopérante même si, globalement l’UMP est plutôt contre ce projet et le PS, les écologistes et les communistes plutôt pour. Que dit le texte ? Il propose, je cite : « un droit à demander une assistance médicale pour mourir » pour les malades en phase terminale d'affection incurable. Le texte prévoit pour tout adulte la possibilité de mettre par écrit sa volonté à respecter s'il lui arrive de ne plus être en état de l'exprimer. Il accorde aussi aux médecins « une clause de conscience » qui leur permet de refuser d'accomplir cet acte définitif. D’autres propositions en ce sens ont déjà été formulées par des parlementaires par le passé mais ça n’a jamais abouti, pourtant une large majorité des Français interrogés dans diverses enquêtes se montrent favorables à une telle loi, preuve d’une évolution des mentalités, si tant est que l’acceptation de l’euthanasie puisse être considérer comme étant une avancée, ce qui est bien sûr une opinion toute personnelle, voire intime. Pour l’instant les médecins confrontés à ces questions de fin de vie se réfèrent à la loi Leonetti de 2005 qui est censée leur permettre de ne pas sombrer dans ce que l’on appelle l’acharnement thérapeutique. Mais les contours de cette notion d’acharnement thérapeutique sont flous, variables et complexes à évaluer. La loi Leonetti, le « laisser mourir » ne satisfait personne, ni les médecins, ni les familles désemparées. La proposition des sénateurs va beaucoup plus loin et s’apparenterait donc à la légalisation de l’euthanasie en France. François Fillon s’est prononcé contre ce texte dans une tribune publiée dans Le Monde.Oui et il exprime ainsi l’avis de l’exécutif et du chef de la majorité donc, ce texte sera repoussé. C’est aussi un avis très personnel et c’est normal sur un tel sujet : « je suis hostile à la légalisation d’une aide active à mourir » dit-il. On peut s’échanger tous les arguments que l’on veut, c’est un sujet qui évolue beaucoup plus par maturation personnelle, par prise de conscience. Les témoignages (on se souvient de ceux de la famille Humbert), les échanges d’expérience font plus que le débat politique classique mais il est un fait indéniable (et politique) celui-là, que personne ne peut contester : la situation actuelle est intenable. Puisqu’on est bien obligé de constater l’inertie de l’exécutif sur ce sujet, le cadre de l’élection présidentielle serait parfait pour en débattre et enfin trancher au lendemain de 2012. L’euthanasie comme sujet de la prochaine présidentielle, comme des questions aussi triviales que la fiscalité, la sécurité, le chômage, serait le meilleur moyen d’obliger les responsables politiques. Si une élection présidentielle est, comme on le dit souvent, la rencontre entre un homme (ou une femme) et le peuple, alors l’euthanasie, la mort, la souffrance sont des thèmes pour la présidentielle. Dire ce que l’on pense sur ces questions c’est aussi dire la société vers laquelle nous voulons aller.** https://youtu.be/pdeB55-j_28
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Sujet: Janvier 2011, échec d'une loi 02.11.13 15:02
Le gouvernement contre le droit de mourir dans la dignité (4 articles) vendredi 4 mars 2011.
Nous déplorons que le Sénat se soit rangé à l’avis du gouvernement en rejetant la proposition de loi relative à l’aide active à mourir. Ce texte de compromis avait pourtant été adopté la semaine passée par la commission des affaires sociales, en fusionnant trois propositions de loi provenant de tous les bancs de notre assemblée, dont une co-élaborée par le sénateur du Parti de Gauche François Autain.
Nous regrettons que, sous la pression du Gouvernement, les sénateurs n ’aient pas reconnu ce droit ultime de la personne atteinte d’un mal incurable de choisir librement les conditions de sa fin de vie. Si nous sommes d’accord avec le Gouvernement pour dire que la loi Leonetti adoptée en 2005 n’est pas ou peu appliquée, nous réfutons l’argument qui consisterait à opposer soins palliatifs et aide active à mourir. Envisager d’autoriser, dans certaines conditions, la mort assistée ne doit pas être considéré comme un refus ou une remise en cause des soins palliatifs mais bien comme la reconnaissance d’une ultime liberté qui leur est complémentaire.
Nous considérons que la possibilité pour la personne malade en fin de vie de recourir à l’aide active à mourir procède de la volonté d’étendre le champ des libertés individuelles. Il s’agit d’apporter à la personne une plus grande autonomie en lui donnant la possibilité de décider elle-même, de façon libre, éclairée et réfléchie, des conditions et du moment de sa propre mort.
Marie-Agnès Labarre, Sénatrice du Parti de Gauche
3) Mourir dans la dignité : une liberté fondamentale
Alors que les sénateurs avaient choisi d’ouvrir le débat sur la possibilité de choisir les conditions de sa propre fin de vie, le gouvernement a fait savoir qu’il refusait de légiférer sur ce sujet expliquant qu’il était préférable de développer les soins palliatifs.
La loi Leonetti, adoptée en 2005, a certes permis de réelles avancées sur la question des soins palliatifs. Mais il faut garder à l’esprit, que dans certains cas, les soins palliatifs peuvent ne pas correspondre au souhait des personnes malades. Certaines personnes gravement malade peuvent exprimer la volonté de mourir et il est alors nécessaire de tout mettre en place pour que ces personnes aient le droit de mourir dans la dignité.
La question de la fin de vie est un sujet sensible et mérite un débat apaisé. Ne doit-on pas considérer la liberté de mourir dignement comme l’une des libertés fondamentales de l’individu ? Il s’agit peut être même de l’une des dernières libertés dont peuvent bénéficier lespersonnes atteintes de maladies incurables.
Source : Aujourd’hui en France, Le Parisien 26 janvier 2011 Sénat
L’euthanasie n’est toujours pas légalisée, mais le débat est rouvert. A la faveur d’une proposition de loi défendue par quatre sénateurs (UMP, PS, et Front de gauche), qui devait être repoussée in extremis hier soir, alors que quelques centaines d’opposants manifestaient à l’extérieur du Sénat, les responsables politiques ont pris position sur ce délicat sujet de société, qui dépasse le clivage droitegauche.
L’article premier de ce texte prévoit que « toute personne capable majeure, en phase avancée ou terminale d’une affection accidentelle ou pathologique grave et incurable, lui infligeant une souffrance physique ou psychique qui ne peut être apaisée ou qu’elle juge insupportable, peut demander à bénéficier d’une assistance médicalisée permettant, par un acte délibéré, une mort rapide et sans douleur ». Pour ses auteurs, Jean-Pierre Godefroy (PS), Alain Fouché (UMP), Guy Fischer (PC) et François Autain (Parti de gauche), il s’agit de compléter la loi Leonetti de 2005 sur la fin de vie, qui autorise les médecins à une forme de « laisser mourir » en soulageant la douleur d’un patient, quitte à abréger sa vie. Le texte vise à ce que ce soit le patient lui-même qui décide du moment de sa mort.
Or, contre toute attente, il a été adopté la semaine dernière par la commission des Affaires sociales du Sénat, provoquant, depuis, une bataille acharnée entre ses partisans et ses adversaires. Afin de resserrer les rangs d’une majorité en proie au doute, le Premier ministre, François Fillon, est monté au créneau lundi, dans une tribune au journal « le Monde » : « La question est de savoir si la société est en mesure de légiférer pour s’accorder le droit de donner la mort, écrit-il. J’estime que cette limite ne doit pas être franchie. » Hier, Jean Leonetti, auteur de la loi éponyme et vice-président du groupe UMP à l’Assemblée, s’est dit lui aussi très réservé sur le texte, qui selon lui « légalise le suicide assisté ». « Sur ce sujet, nous devons avoir la culture du doute collectif, estime le député des Alpes-Maritimes, par ailleurs cardiologue. Ceux qui disent qu’ils savent sont soit des ignorants, soit des menteurs. Je continue à ne pas savoir. »
A gauche, si Martine Aubry s’est déclarée « favorable » à une légalisation de l’euthanasie, Ségolène Royal et Robert Badinter ont émis des « réserves ». Quant aux centristes, très partagés, ils ont finalement arbitré la partie au Sénat. « Le clivage est entre les catholiques, opposés à l’euthanasie, et les humanistes laïcs, favorables à sa légalisation », résumait-on hier au palais du Luxembourg.
NATHALIE SEGAUNES
1) Débat au Sénat sur le droit pour une mort digne : le Vatican reprend la main par l’UFAL
Source :http://www.ufal.org
L’UFAL qui saluait hier l’examen en séance publique au Sénat ce soir d’une proposition de loi relative à l’assistance médicalisée pour mourir est consternée par le revirement de la commission des affaires sociales du Sénat.
Après avoir adopté à la majorité le 18 janvier la proposition de loi, la commission a en effet voté ce matin un amendement de la sénatrice Marie-Thérèse Hermange supprimant l’article 1 de la proposition de loi, lui retirant toute substance.
L’intense lobbying des opposants au droit de mourir dans la dignité qui s’opère depuis la décision d’examiner la question de l’euthanasie en séance publique et qui a redoublé depuis le vote d’une proposition de loi de synthèse par la commission des affaires sociales n’y est pas pour rien.
Les prises de position publique du premier ministre par une tribune publiée par le journal Le Monde et celle du ministre du travail de l’emploi et de la santé sur RMC ne sont rien d’autre que des pressions sur les sénateurs pour les inciter à voter non pas en leur conscience mais selon la morale défendue par le gouvernement et dictée par le Vatican.
Alors que l’adoption de cette proposition de loi serait une grande avancée qui constituerait une rupture avec l’idée religieuse que la mort ne peut être que l’oeuvre de dieu et que la vie est une réalité transcendante qui ne peut être laissée à la libre disposition de l’Homme, on voit bien qu’aujourd’hui c’est l’union sacrée de tous ceux qui défendent les valeurs du christianisme, dont le gouvernement actuel, qui dicte sa loi aux représentants du peuple, et que permettre à chaque individu de disposer librement de son corps est un combat toujours d’actualité. https://youtu.be/pdeB55-j_28
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Sujet: Re: Janvier 2011 fin de vie échec d'une loi 02.11.13 15:28
Réflexions sur la tentation de créer un droit à choisir sa mort
Sujet: Re: Janvier 2011 fin de vie échec d'une loi 02.11.13 15:59
Home / Sciences et Ethique ( Radio Vatican ) Les chrétiens se mobilisent contre le projet de loi de légalisation de l'euthanasie 24/01/2011
En France, le projet de loi pour légaliser l’euthanasie sera examiné ce mardi par les sénateurs. Intitulé « aide active à mourir », le texte prévoit la légalisation de l’euthanasie pour des personnes en fin de vie et pour des personnes qui se trouveraient en « phase avancée d’une pathologie grave et incurable ». Cette proposition de loi a déjà été adoptée la semaine dernière par la commission des affaires sociales du Sénat. Demain, c’est la chambre haute qui doit se prononcer en séance plénière. Un projet de loi qui suscite de nombreuses polémiques. Le collectif « Plus digne la vie » a lancé il y a une semaine une pétition intitulée « Manifeste citoyen pour la dignité de la personne en fin de vie ». Sylvain Pourchet, membre du Conseil exécutif du collectif et médecin responsable de l’unité des soins palliatifs de l’Hôpital Paul Brousse à Villejuif a signé cette pétition. Il nous explique pourquoi il n’est pas d’accord avec ce projet de loi. RealAudioMP3 Propos recueillis par Marie-Leila Coussa
Plusieurs personnalités ont pris officiellement position contre ce projet de loi. Au premier rang d’entre elles, le premier ministre François Fillon qui, dans une tribune au quotidien le monde juge une telle évolution dangereuse. Sur RMC, le ministre du travail Xavier Bertrand a déclaré qu’il n’était pas favorable non plus à ce texte. Quant à l’Académie de médecine, elle dit redouter des dérives, y compris la tentation d’utiliser la loi à des fins économiques. (avec La Croix)
A lire également la réflexion de l'évêque de Montauban, Mgr Bernard Ginoux, publiée par le site de la CEF
Ce projet, qui a donc été ecarté, relancait à nouveau le droit de demander la mort et de la donner, alors que la loi Léonetti de 2005 avait refusé cette possibilité. Cette loi votée le 22 avril 2005 ne mettait cependant pas un terme au débat. D'abord parce qu'elle laissait quelques points discutables comme celui de l'alimentation artificielle en fin de vie. Mais, plus encore, son auteur affirmait qu'il travaillait à la question de « l'exception d'euthanasie » (La Croix, 7 avril 2008), ce qui veut dire que dans certains cas le législateur pouvait autoriser à donner la mort. Dans le même temps l'ADMD (Association pour le droit de mourir dans la dignité) et son très influent président revenaient sur cette loi parce qu'ils en étaient insatisfaits. C'est ainsi qu'ils ont pu faire avancer un nouveau projet voté ce 18 janvier par la commission des Affaires sociales du Sénat. Que dit ce projet ? L'article premier le résume : « Toute personne capable majeure, en phase avancée ou terminale d'une affection accidentelle ou pathologique grave et incurable, lui infligeant une souffrance physique ou psychique qui ne peut être apaisée ou qu'elle juge insupportable, peut demander à bénéficier d'une assistance médicalisée permettant, par un acte délibéré, une mort rapide et sans douleur ». Il s'agit bien de procurer la mort volontairement, de tuer une personne. Bien entendu, dans la suite, les mots employés et les considérations avancées se veulent très « soft », laissant entendre qu'il s'agit de rechercher le bien des personnes malades et de leur éviter une fin tragique, prétendue indigne. On affirme ne prendre en compte que des situations extrêmes et le faire dans la compassion. L'appréciation des situations demeurera toujours subjective, surtout quand le texte parle de souffrances « psychiques ». Par ailleurs le discours est séduisant puisque la loi permettrait ainsi de « devenir maître de son parcours de fin de vie » ! Mais que pouvons-nous répondre à cette nouvelle tentative puisque, depuis bientôt trente ans (à l'époque avec le sénateur Caillavet, de Lot-et-Garonne, né en 1914, et aujourd'hui militant à l'association « Ultime Liberté » ), de manière récurrente, ce courant de pensée veut imposer à la société française une loi autorisant l'euthanasie. Pendant sept ans j'ai eu la charge des d'hôpitaux et de la pastorale de la santé dans mon d'origine. Le nombre de personnes en fin de vie avec des pathologies lourdes (sida, cancer, etc.) que j'ai approchées - chrétiennes ou non - est important. J'ai vu des situations insoutenables. Je compte sur les doigts d'une main les personnes qui ont, à un moment, demandé vraiment la mort. J'ajoute que c'était la période où se mettaient en place - avec beaucoup d'oppositions et de difficultés - les soins palliatifs. Chaque fois que l'équipe des soins palliatifs pouvait intervenir, la personne retrouvait la paix. Malheureusement les efforts réalisés pour les soins palliatifs sont encore insuffisants. La demande de mort est un appel, l'expression d'une détresse, le besoin d'être accompagné. Si les soins palliatifs et l'entourage prennent en charge assez tôt cet accompagnement, la fin de la vie n'est plus une tragédie, même si mourir est toujours un passage angoissant. Au-delà de cette expérience personnelle rapidement évoquée, il y a les principes même du vivre ensemble que le droit de tuer remet de fait en question. La médecine La médecine est faite pour soigner. Comment lui demander de poser un acte de mort ? Quelle confiance pourrait avoir le patient devant la blouse blanche qui entre dans sa chambre ? Quelle perspective que de faire disparaître le malade qui est trop gênant ? Comment des « soignants » peuvent-ils devenir des « tueurs » (même en douceur !). Les tenants de l'euthanasie répondront que si le geste est légal les soignants n'auront pas d'états d'âme ou de scrupules de conscience. Une connaissance élémentaire de l'être humain nous apprend le contraire : un acte de mort reste toujours un poids pour celui qui le commet. La souffrance Comment apprécier le caractère « insupportable » d'un mal, sachant que la douleur physique doit être soulagée et peut l'être si le suivi palliatif est rigoureux. Comment juger des opinions très contradictoires de la personne malade et de son entourage ? Quelles pressions imaginer sur celle-ci ? Les psychologues, les études sur les réactions des malades en phase terminale montrent des variations très grandes, depuis le déni de la maladie jusqu'aux pensées suicidaires. Il n'est pas possible de tenir pour certaine une demande de mort. Ces dernières années l'un ou l'autre cas de situations extrêmes (affaires Humbert, Sébire ) exploitées médiatiquement où il y avait une demande publique d'aide à mourir ont montré, une fois l'émotion passée, l'ambiguïté de ces cas. Ils sont d'ailleurs très rares et aussitôt survalorisés parce que les militants de l'euthanasie en ont besoin pour justifier leur revendication. Le principe d'humanité Reprenant ce titre à un écrivain connu (Jean-Claude Guillebaud) je remarque que je n'ai pas besoin d'invoquer la foi chrétienne pour affirmer que donner la mort volontairement est contraire au principe d'humanité, au pacte social qui permet le vivre-ensemble. C'est, en effet, de l'être humain qu'il s'agit et de la solidarité humaine : lorsque la loi permet de tuer (au nom d'un bien mais quel bien ?) elle donne à des êtres humains pouvoir absolu sur d'autres. Le fait d'être une équipe, dans un hôpital, avec des « spécialistes » ne change rien à la réalité. La mort programmée d'une personne, que cette équipe va désigner comme « indigne » de vivre, en raison de son état d'anéantissement physique ou psychique (cf. le projet de loi), est un crime. Au nom de l'humanité, au nom du respect de toute vie humaine jusqu'à sa fin naturelle, au nom de la solidarité avec les plus faibles, nous devons proclamer la « dignité » intangible de chaque être humain. L'oublier c'est entrer dans la barbarie. Le 21 janvier 2011 (pour le Bulletin Catholique n° 2 du de Montauban du 26 janvier 2011)
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Sujet: Janvier 2011, échec d'une loi 02.11.13 16:25
"L'euthanasie ne cherche pas à aider le malade" Matthieu Mégevand - publié le 26/01/2011
Mardi 25 janvier, le Sénat a examiné en séance publique une proposition de loi autorisant l'assistance médicalisée pour mourir sous certaines conditions. Le texte, qui a finalement été rejeté, a bien évidemment suscité une polémique, et pose à nouveau la question du droit du patient à finir sa vie dignement, et plus largement, du rapport complexe qu'entretient notre société à la mort.
"L'euthanasie ne cherche pas à aider le malade"
C'est une loi sur l'euthanasie qui ne dit pas son nom. Proposé par des sénateurs socialistes, communistes mais également UMP, le texte examiné par le Sénat prévoyait de reconnaître, pour les personnes atteintes d'une maladie grave et incurable infligeant une souffrance physique ou psychique, le droit d'accéder à une assistance médicalisée pour mourir. Tandis que les différentes religions s'accordent sur la question et refusent l'euthanasie au nom de la sacralité de la vie, une partie du monde médical semble lui aussi hostile à toute forme de législation.
Ainsi, Anne-Marie Trébulle, directrice des soins à la maison médicale Jeanne-Garnier à Paris, spécialisée dans les soins palliatifs, explique : "Les patients en fin de vie sont fragilisés par leur état, et souvent une personne qui réclamait la mort la veille se réjouit de la visite de son petit-fils le lendemain. Le véritable problème, c'est l'apaisement des souffrances : les soins palliatifs permettent de gérer la souffrance du patient et de lui offrir une fin de vie relativement agréable, ou tout du moins acceptable. L'euthanasie ne cherche pas à aider le malade; elle le supprime purement et simplement, sans répondre à la question centrale de sa souffrance."
Ainsi, selon Anne-Marie Trébulle, le problème se situe plutôt du point de vue de l'assistance aux personnes en fin de vie que de celui du droit à mourir: "Les patients souhaitent voir leurs souffrances apaisées, et une demande d'euthanasie doit être considérée comme un appel au secours", conclut-elle. A l'inverse, certains sénateurs comme Alain Fouché (UMP) défendent la proposition de loi: "En tant que chrétien, c'est un déchirement, admet ce dernier, mais il faut se référer aux Pères de l'Église qui ont su trouver un compromis face au commandement “tu ne tueras point”, en inventant la guerre juste; cette loi utilise le même principe de conciliation. Il s'agit d'offrir une alternative à ceux qui ne souhaitent pas assister à leur propre déchéance; bien sûr les soins palliatifs doivent être privilégiés, mais ils ne peuvent pas constituer la seule voie possible."
Du côté de la gauche, on se réfère à des valeurs libérales pour défendre la loi. Guy Fischer (CRC) rappelle, comme ce fut le cas lors du combat sur l'avortement, que la liberté individuelle doit primer : "Chaque individu doit pouvoir être maître de son corps; il n'appartient à aucune entité supérieure." Même idée chez le rapporteur de la loi Jean-Pierre Godefroy : "L'autonomie de la conscience, le respect de la liberté individuelle constituent le fondement de cette loi." Et d'ajouter : "L'assistance pour mourir est distincte des soins palliatifs; elle ne cherche pas à apaiser la souffrance mais à donner à ceux qui le souhaitent le choix de ne plus vivre."
Au-delà des clivages, il semble qu'il y ait là deux manières différentes d'envisager l'existence: du côté des opposants, il paraît impossible d'inclure la mort dans les soins thérapeutiques, parce que c'est celle-là même qui est combattue et évitée; le caractère sacré de la vie prend le dessus. Un point de vue proche de l'argumentaire religieux. Pour les défenseurs de la loi, c'est avant tout l'esprit de compassion jumelé au principe de liberté absolue qui domine; la mort est abordée comme une ultime possibilité, comme un dernier acte d'autonomie et d'apaisement. Entre ces deux positions inconciliables, le Sénat a tranché : la proposition de loi a été refusée, et avec elle cette idée que la mort puisse servir en dernier recours à soulager le patient; celui-ci devra donc attendre que la maladie l'y conduise. http://www.lemondedesreligions.fr/actualite/l-euthanasie-ne-cherche-pas-a-aider-le-malade-26-01-2011-1131_118.php
Sujet: Janvier 2011, échec d'une loi 02.11.13 16:48
Le Sénat a rejeté mardi 25 janvier 2011 la proposition de loi « fusionnée » visant à légaliser l’euthanasie. Que retenir de cette décision ? Comment analyser la manœuvre du lobby pro-euthanasie ? Comment les leaders politiques se sont-ils positionnés ? Le rapport de forces a-t-il changé ? Les médias ont-ils évolué ? Quatre hypothèses.
1/ L’ADMD est-elle allée « trop loin » ?
Pour certains, le président de l’ADMD, Jean-Luc Romero, en aurait « trop fait ». C’était son idée d’obtenir une majorité sénatoriale gauche-droite grâce au réseau des parlementaires adhérant à l’Association pour le droit de mourir dans la dignité. On lui doit aussi la fusion des propositions socialistes, communiste et, surtout, UMP, celle d’Alain Foucher. La présidente de la commission des affaires sociales, la centriste Muguette Dini, qui organisé cette fusion, est très officiellement membre du comité de parrainage de l’ADMD, de même que Jean-Pierre Godefroy, auteur socialiste de la proposition principale… Jean-Luc Romero croyait-il la partie gagnée ? Il a multiplié les déclarations médiatiques véhémentes, jusqu’à l’imprudence. Lors de son audition parlementaire, les sénateurs ont pu être choqués lorsqu’il a confié la raison pour laquelle il n’était pas certain de demander l’euthanasie s’il se trouvait en fin de vie : il pourrait demander la mort s’il se retrouvait seul, pas s’il était amoureux ! De quoi donner du crédit à ceux qui avaient pointé l’arbitraire du critère de « souffrance psychique » inscrit dans l’objet de la loi. Comment aider les désespérés, si le désespoir donne droit à la mort ? Devant l’agitation de Jean-Luc Romero, l’agacement de Jean-Pierre Godefroy était perceptible en public, et patent en privé. L’instabilité politique du conseiller régional d’Ile-de-France, qui a migré en quelques années du RPR à la gauche en passant par le centre, et son aptitude à mélanger les genres en amalgamant la « cause homosexuelle » et son histoire personnelle à la revendication de l’euthanasie en font un partenaire ingérable. Mais surtout, derrière les cas-limite montés en épingle, il ne fait pas de doute que c’est le suicide médicalement assisté comme ultime liberté, assorti d’une réelle aversion pour la vulnérabilité qui dessine l’idéologie des promoteurs de l’euthanasie.
2/ Des leaders politiques mieux éclairés
L’incertitude fut longtemps réelle sur l’issue du scrutin, surtout après le vote du 18 janvier de la commission des affaires sociales votant son texte, par 25 membres contre 19 et deux abstentions. À partir de ce moment, Gérard Larcher, ne cachait plus son inquiétude. À quelques jours du débat en séance, il prenait « personnellement » position contre le texte même si, en qualité de président du Sénat, il respectera la coutume en s’abstenant. Le 25 janvier, c’est pourtant la sagesse qui a pris le dessus. D’abord retournement de situation en commission des affaires sociales où la mobilisation des UMP qui avait fait défaut le 18 leur a permis de vider de sa substance l’article 1er de la loi. Un résultat qui a fait croire un peu tôt que tout était joué. Or, tout demeurait possible en séance. Précisons que, cette nuit là, les députés favorables à la « proposition de loi relative à l’assistance médicale pour mourir » n’ont cessé de nier qu’il s’agissait de légaliser l’euthanasie, mais la lecture du texte ne laisse pas de doute… Ce sont finalement 172 voix contre 143 qui ont adopté, à 3 heures du matin le 26 janvier, ce nouvel article, aboutissant, de facto, au rejet de la proposition de loi. Finalement, 21 centristes sur 29 ont rejeté l’euthanasie laissant seules leurs collègues Muguette Dini et Valérie Létard. Et seuls trois UMP ont voté l’euthanasie : Alain Fouché, Christian Demuynck et André Villiers, trois autres s’abstenant : Catherine Procaccia, Sylvie Goychavent et Dominique Braye, tandis que les 141 autres rejetaient le texte. La gauche restait presque unanime, à l’exception de Virginie Klès (PS) qui s’est opposé à l’euthanasie, de deux autres socialistes, qui se sont abstenus (Samia Ghali et Claude Jeannerot) de même que quatre communistes (Nicole Borvo Cohen-Seat, Michelle Demessine, Evelyne Didier et Gélita Hoarau). Quand au groupe des radicaux qui réunit des sénateurs de gauche et de droite, il est resté partagé. À titre d’exemple, Jean-Pierre Chevènement a voté l’euthanasie, mais ni Jean-Marie Bockel, ni Gilbert Barbier, l’un des leaders de l’opposition à ce texte. Parmi les non-inscrits Sylvie Desmarescaux avait fait projeter à ses collègues le récent film Les Yeux ouverts (tourné dans une maison médicale de soins palliatifs) la veille de l’examen du texte à laquelle elle s’est logiquement opposée comme Bruno Retailleau, Philippe Darniche et Alex Türk. À l’image de Marie-Thérèse Hermange (UMP) et de Gilbert Barbier (radical), quelques sénateurs très mobilisés ont su entraîner les hésitants par une expertise pointue. Plusieurs parlementaires se sont exprimés avec force contre le texte comme Jean-Louis Lorrain (UMP), André Lardeux (UMP), Bruno Retailleau (non inscrit), Anne-Marie Paillé (nouveau centre) ou Bernadette Dupont (UMP). Au-delà de ce résultat, certains auteurs ou signataires des propositions de loi avaient fini par avouer, en marge de leurs interventions médiatiques, ne pas être si certain que cela de leur pertinence. Cette proposition avait pour objet, avouaient-ils, de « faire avancer le débat », un débat qui, toujours à les entendre, n’était « pas mûr ». Les derniers jours, les voix de ténors des deux camps ont contribué à solidifier les indécis. À gauche, le sénateur Robert Badinter, artisan de l’abolition de la peine de mort et considéré comme une autorité morale, s’est élevé contre le texte, même s’il n’a pas participé au vote. Ségolène Royal a aussi affiché une nouvelle fois sa différence en émettant « de grandes réserves sur la légalisation de l’euthanasie ». À droite, une tribune du Premier ministre avait été publiée dans Le Monde du 25 janvier qui en avait fait son titre principal (Le Fil, 25 janvier) L’engagement de François Fillon estimant à propos du « droit de donner la mort » que « cette limite ne doit pas être franchie » a certainement compté pour les UMP.
3/ Un nouveau rapport de forces
Les parlementaires ont aussi pu mesurer la mobilisation des adversaires du projet hors du monde politique. Certes, les sénateurs sont « à part » en raison de l’indépendance accrue que leur confère leur système de désignation (scrutin de listes et grands-électeurs). Mais le Sénat est aussi réputé pour sa sagesse en matière d’expertise législative : mettre à bas le fragile équilibre du système de santé par un dispositif d’« autorisation de tuer » nécessitant une complexe procédure administrative, des garde-fou toujours difficiles à réguler, et des commissions de contrôle a postériori… tout cela avait de quoi inspirer la méfiance. Les voix d’experts du monde médical et associatif ont pesé, notamment celles issues du mouvement des soins palliatifs. Avec ses 13 000 signataires, l’appel du collectif Plus digne la vie, coordonné par Emmanuel Hirsch, a rassemblé une vaste liste de personnalités capables de contrer celle affichée par l’ADMD sur son site. On retrouve par exemple dans le comité d’honneur de Plus digne la vie des médecins médiatiques comme Marcel Ruffo et Israël Nisand, le prix Nobel de la paix Elie Wiesel et des politiques de sensibilité variées, de Jean-Frédéric Poisson (UMP-PCD) à Michel Vaxès (PC), en passant par Bernard Debré, également professeur de médecine (UMP)… La pétition « Stop à l’euthanasie » de l’Alliance pour les Droits de la Vie a quant à elle recueilli 56 000 signatures. Un record. En manifestant symboliquement la réalité de l’euthanasie par 700 gisants étendus dans leurs linceuls blancs au pied du Sénat, elle a voulu montrer l’engrenage contenu dans la proposition de loi : on commence par des personnes fragiles en raison de leur âge ou de leur handicap, mais c’est toute la société qui est concernée. Être présent, à proximité immédiate de l’évènement, c'est-à-dire dans son temps et dans son lieu avec des images fortes, permet d’offrir l’illustration d’une cause. C’est la raison des 30 « happenings » du 14 janvier en régions et de celui, spectaculaire, du 25 à Paris. En France, c’est dans la rue que se mesurent encore les rapports de force, ou plus exactement de motivation. Ainsi, la force et la crédibilité des opposants à l’euthanasie ont été mieux saisies par les observateurs de ce débat. Si les sondages d’opinion mesurent l’avis spontané des Français sur un sujet, compris de façon plus ou moins confuse, ils aident rarement à rendre compte de leur degré d’engagement pour une cause… En lien avec la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (SFAP), le sondage de Plus digne la vie, publié quelques jours avant le débat, a rétabli l’équilibre : non seulement c’est le développement des soins palliatifs que les Français préfèrent (à 60%), à la légalisation de l’euthanasie (38%), et cette dernière même est vue par une majorité (52%) comme un danger potentiel de dérive… Sans compter qu’on découvre l’ignorance des même Français sur la loi fin de vie puisque 68% ne savent pas que notre droit proscrit l’acharnement thérapeutique. Du coup l’Ordre des médecins a publié à son tour son opposition au texte alors qu’on pouvait le sentir flottant après l’affaire Sébire. Chantal Sébire, souffrant d’un spectaculaire cancer du visage, s’est suicidée en 2008 après avoir revendiqué l’euthanasie mais aussi après avoir refusé, tour à tour, les soins curatifs et palliatifs. Depuis, aucune affaire médiatique de « cas emblématique » n’a défrayé la chronique… si on excepte les scandales des euthanasies à l’étranger, notamment en Suisse avec l’association Dignitas.
4/ Vers un rééquilibrage médiatique ?
Pendant les jours qui ont précédé le vote, les tribunes dans la presse écrite de psychologues ou de médecins mais aussi d’autorités morales (citons les cardinaux André Vingt-Trois (cf. Décryptage, 14 janvier) et Philippe Barbarin (Le Fil, 25 janvier) ont permis d’alimenter le débat en arguments de raison, au-delà des slogans toujours réducteurs. La séquence de deux minutes du journal de 20 heures de TF1 dédiée au débat du soir, le 25 janvier, est peut-être emblématique d’un revirement (cf. vidéo). Certes, on voit encore Marie Humbert évoquer les jeunes qui, ressemblant à son fils, attendraient l’euthanasie (elle continue de les assimiler de façon scandaleuse à « des légumes »). Mais des images de la scénographie de l’Alliance pour les Droits de la Vie ouvrent le reportage avec les propos du docteur Xavier Mirabel estimant que le débat sur la dépendance mérite une autre réponse que l’euthanasie, puis c’est au tour du docteur Devalois de plaider pour les soins palliatifs. Et surtout, la séquence se termine sur les dérives observées dans les rares pays qui ont déjà légalisé l’euthanasie, avec la mention d’un rappel à l’ordre de la commission des droits de l’homme de l’ONU sur ce sujet. On est loin de l’inéluctabilité de l’euthanasie telle qu’avancée par ses militants. La situation reste fragile, et l’on peut s’attendre à de nouvelles offensives pro-euthanasie. Sans-doute la précipitation et l’outrance de l’ADMD a-t-elle, jusqu’à maintenant, joué en sa défaveur, musclant par son harcèlement la résistance dialectique des parlementaires et contribuant à organiser la résistance du monde des soins palliatifs et de multiples personnalités. Dans ce type de débat, selon l’adage « malheur aux vaincus » la position qui gagne entraîne une bonne part des indécis, qui sont la majorité silencieuse ou ignorante. La Belgique et la Hollande sur lesquelles se sont appuyés les auteurs de la proposition de loi connaissant de graves dérives, leur statut de précurseur pourrait se muer en triste exception. Quant au défi culturel, il reste entier. La culture de la vulnérabilité qui englobe les soins palliatifs nécessite un engagement de tous : un solide investissement de l’Etat, de nouvelles évolutions dans la pratique médicale, davantage d’engagement bénévole et, finalement, un changement de regard sur les personnes dépendantes. https://youtu.be/pdeB55-j_28
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Sujet: Janvier 2011, échec d'une loi 02.11.13 17:03
19-11-2009 11:00
L'euthanasie, en débat à l'Assemblée, transcende les clivages politiques
Source : Dépêche AFP - 19 novembre 2009
Le thème de la légalisation de l'euthanasie s'est invité une nouvelle fois à l'Assemblée via une proposition de loi socialiste, transcendant les clivages politiques traditionnels même si le débat, jeudi, a tourné court avec un nouveau psychodrame Parti socialiste-UMP. Les députés socialistes ont en effet quitté l'hémicycle pour protester contre la décision du gouvernement et du groupe UMP de reporter le vote du texte, des articles et des amendements, comme c'est désormais le cas sur chaque proposition de loi de la gauche. Ils ont donc boycotté la suite de la discussion dans l'après-midi. Avant l'incident, le rapporteur du texte, le socialiste Manuel Valls a plaidé pour un véritable "droit général à l'euthanasie", refusant "l'hypocrisie" car "l'euthanasie est en réalité une pratique courante dans de nombreux centres de soins". "La seule manière d'éviter les dérives est d'admettre enfin la réalité pour mieux l'encadrer", a-t-il dit, car "la généralisation" du recours aux soins palliatifs "ne répondra jamais aux souffrances et aux demandes de tous les malades". La ministre de la Santé Roselyne Bachelot a répliqué que la loi du 22 avril 2005, dite loi Leonetti, avait constitué "une avancée considérable dans le débat sur la fin de vie", se demandant s'il fallait "franchir un nouveau pas" et si ce pas constituerait, in fine, "un progrès ou la transgression d'une limite". Un progrès sans aucun doute pour l'UMP Henriette Martinez, militante de l'Association pour le droit de mourir dans la dignité, qui revendique "l'ultime liberté" et regrette "que l'UMP ne se soit pas saisie de ce sujet". Une opinion partagée par Jacques Desallangre (Parti de gauche), pour qui la loi Leonetti "n'est qu'une étape", demeurant "insuffisante". Parmi les détracteurs du texte, beaucoup se sont attachés à promouvoir les soins palliatifs. Car "ce n'est pas la vie qui aliène, c'est d'abord la douleur dont il faut libérer le patient", a estimé Roselyne Bachelot. Pour le communiste Michel Vaxès, en effet "l'urgence" est d'obtenir "que l'Etat leur donne les moyens de s'exprimer pleinement et partout". Pour lui, "les dérogations admises risquent toujours d'autoriser la suivante". Colette Le Moal (Nouveau Centre) a également demandé au nom de son groupe "le développement des unités de soins palliatifs", estimant qu'il fallait approfondir le loi actuelle car son parti considère "que la fin de vie est encore la vie". Ces soins palliatifs restent aussi "un objectif prioritaire de notre politique de santé" pour le porte-parole du Parti chrétien démocrate et successeur de Christine Boutin Jean-Frédéric Poisson. Celui-ci s'est insurgé contre les socialistes et "l'élaboration d'une hiérarchie entre les vies qui mériteraient d'être vécues et celles qui ne le mériteraient pas", alors qu'il convient "de réaffirmer la valeur inestimable de la vie, de la conception à la mort naturelle". Il faut "aider à mourir comme en d'autres circonstances on peut aider à naître", a indiqué la socialiste Marie-Odile Bouillé, sage-femme de profession. Elle s'est dit "frappée que les arguments avancés contre l'aide à mourir ressemblent à ceux avancés", il y a plus de 30 ans, "contre le droit à l'avortement". Alors que les députés débattaient du texte, quelque 70 membres d'une "Alliance pour les Droits de la Vie" protestaient devant l'Assemblée nationale. Emmanuelle TRECOLLE 19 nov 2009 (AFP) -
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Sujet: Janvier 2011, échec d'une loi 02.11.13 17:29
18-11-2009 06:55 18:55
La légalisation de l'euthanasie: un "souci de liberté" selon Romero
Source : Dépêche AFP - 18 novembre 2009
La proposition de loi visant à légaliser l'euthanasie répond "au seul souci de liberté pour chacun", estime Jean-Luc Romero, président de l'Association pour le droit à mourir dans la dignité (ADMD), dans une lettre ouverte aux députés.
Cette proposition, cosignée par les députés PS, apparentés et PRG, "est différente de la nôtre, mais reste une loi d'humanité, de respect et de dignité", souligne M. Romero dans sa lettre aux députés qui débattront du sujet jeudi prochain.
"Cette perspective de légaliser l'euthanasie -qui remporte l'adhésion d'une très large majorité de Françaises et de Français, quelle que soit leur appartenance politique et quelle que soit leur pratique religieuse- répond au seul souci de liberté pour chacun", indique le conseiller régional d'Ile-de-France.
Un sondage, publié en mai, indiquait que 86,3% des Français sont favorables à une légalisation de l'euthanasie.
Pour le président de l'ADMD, la législation actuelle, appelée loi (Jean) Léonetti, du nom du député qui l'a portée, "ne permet pas de garantir aux citoyens de notre pays une fin de vie conforme à leurs propres volontés".
"Sans une loi accomplie, nous savons que des euthanasies clandestines sont pratiquées", et ce "sans consultation préalable du patient", et que "ceux qui réclament une délivrance (...) sont maintenus dans des souffrances inacceptables".
Pour répondre "à ceux qui craignent les dérives", M. Romero souligne que "la loi encadre et précisément évite les dérives".
La proposition prévoit que "toute personne majeure, en phase avancée ou terminale d'une affection grave et incurable, infligeant une souffrance physique ou psychique qui ne peut être apaisée et qu'elle juge insupportable, peut demander à bénéficier d'une assistance médicalisée pour mourir dans la dignité".
Le texte, présenté dans le cadre d'une niche parlementaire socialiste, a été rejeté la semaine dernière en commission et devrait donc l'être aussi lors de l'examen en séance publique.
L'Alliance pour les Droits de la Vie, hostile à la légalisation de l'euthanasie, manifestera devant l'Assemblée jeudi matin, au moment même où le texte sera discuté.
PARIS, 18 nov 2009 (AFP)
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Sujet: janvier 2011, échec d'une loi 03.11.13 11:23
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Sujet: Re: Janvier 2011 fin de vie échec d'une loi 06.11.13 13:50
Dossier : L’euthanasie en débat Prendre soin des malades en fin de vie Une approche éthique de la fragilité par Emmanuel Hirsch , le 26 mai 2009
Si près de 80 % des personnes meurent aujourd’hui dans le cadre d’une institution de soin plutôt qu’à leur domicile, c’est parce que la médicalisation de la vie jusqu’à son terme refuse à la communauté humaine les temps hautement symboliques qui la relient à son histoire et aux valeurs qui en sont constitutives. Quand l’« idéologie biomédicale » s’oppose à la dignité des malades, elle devient un déni d’humanité.
“ « L’humain commence dans la sainteté avec comme première valeur ne pas laisser le prochain à sa solitude, à sa mort. Vocation médicale de l’homme » [1]. ”
L’hôpital moderne fascine lorsque les prouesses biomédicales semblent déjouer les fatalités et confèrent à l’homme le sentiment de pouvoir maîtriser sa destinée. Il surprend, inquiète et déçoit lorsque les réalités du soin confrontent malgré tout aux vulnérabilités humaines et à la mortalité, aux dilemmes de décisions éprouvantes au terme de l’existence. Évoquer les pratiques soignantes dans leur confrontation à la fin de vie et à la mort permet à la fois de saisir les paradoxes et les équivoques de la biomédecine, le sens d’une réhabilitation des valeurs du soin, d’appréhender les nouvelles conditions du mourir aujourd’hui, d’identifier les évolutions dans l’expression autonome de la personne malade, de cerner l’objet de la démarche palliative, enfin de découvrir la phase ultime de l’engagement soignant, auprès du mort, en chambre mortuaire. Ce parcours aux limites du soin et aux marges de la scène sociale confère une signification insoupçonnée à l’approche éthique de la fragilité.
Une posture de résistance
Les considérations éthiques qu’inspire une confrontation aux aspects insoupçonnés des réalités de l’activité hospitalière concernent des situations humaines et des domaines de la vie sociale qui n’accèdent pas toujours, comme il le faudrait, au statut de questions philosophiques. Le dédain ou le mépris semblent prévaloir lorsque la condition humaine nous ramène à l’ordinaire de circonstances qui dénoncent nos incuries et désinvoltures, déjouent nos stratégies d’évitement, ces renoncements de l’esprit caractéristiques d’une perte de sensibilité, voire d’une altération des principes démocratiques.
Rejetés aux confins de ce que la cité intègre ou tolère encore, ses parias sont les malades qui déstabilisent les certitudes, perturbent les procédures, défient les solidarités et dénoncent les insuffisances. La chronicité d’une affection, les dépendances, démences et altérations cumulées dans le vieillissement sont éprouvées comme corruptrices et insultantes à l’égard d’une dignité humaine modélisée et idéalisée selon les normes en vigueur, sans savoir au juste quelle autorité les édicte. Les mentalités de l’exclusion et désormais de la sélection portent même au-delà de l’existence. Le recours au diagnostic préimplantatoire, aux sondes de la médecine prédictive ou présomptive ont pour mobile d’éviter une maladie ou une souffrance, voire de privilégier certains déterminants génétiques selon des critères biomédicaux ou individualistes qui ne se contestent plus.
Si près de 80 % des personnes meurent aujourd’hui dans le cadre d’une institution de soin plutôt qu’au domicile, c’est essentiellement parce que la médicalisation de la vie jusqu’à son terme refuse à la communauté humaine les temps hautement symboliques qui la relient à son histoire et aux valeurs qui en sont constitutives. La mort médicalisée se substituerait aux traditions, de même que diffèreraient les conditions mêmes de la mort vécue dans un contexte où la destinée humaine serait enfin maîtrisée par cette faculté reconnue de décider ce qui paraît, à un moment donné, préférable. Il en va de même, du reste, aux abords de l’existence, lorsque la sélection génétique ou le tri embryonnaire permettent de fonder un choix au nom d’intérêts estimés socialement, voire scientifiquement recevables.
Les positions incarnées et défendues par les professionnels de santé ainsi que les bénévoles investis sur le front du soin, dans cette fonction soignante en charge de missions qui lui échoient au terme d’un cumul de désistements, apparaissent dès lors significatives d’une posture de résistance. Lorsque l’on soigne, l’attention éthique caractérise un sens de la responsabilité, de la faculté de manifester une préoccupation humaine dont, bien souvent, l’existence même de la personne malade dépend, mais également une certaine conception de l’idée d’humanité. Les avancées biomédicales, l’avènement des technologies du vivant ont ainsi profondément transformé les fonctions de l’hôpital, la culture, les missions et les pratiques du soin. Il n’en demeure pas moins que l’acte soignant constitue encore l’expression la plus sensible de nos obligations à l’égard de l’autre. Le soin peut être compris comme un engagement d’ordre moral, parti pris d’une présence bienveillante opposée aux tentations de l’indifférence et de l’abandon.
Sur le terrain le moins exposé aux convoitises des prouesses technologiques, là où l’impuissance à guérir équivaut trop souvent au désistement et à l’abandon sans le moindre suivi, certains ont décidé de reconquérir et de réhabiliter des espaces voués au soin. Dans le contexte de la fin de vie et même au terme de l’existence, des soignants interviennent au nom de principes éprouvés comme des obligations, afin de témoigner une présence, un soutien, une sollicitude à celles et ceux qui bientôt ne seront plus. Cette revendication morale du soin conteste une idéologie biomédicale trop souvent indifférente à d’autres considérations que les seules performances de sa productivité en termes de publications scientifiques et d’innovations au statut parfois bien équivoque. Elle porte certainement le ferment d’un renouveau de la pensée médicale, ce qui explique avec quelle réticence on lui concède une reconnaissance dans les sanctuaires d’une médecine hospitalo-universitaire parfois détournée de son objet même au nom d’intérêts conjoncturels estimés davantage efficients, valorisants et économiquement rentables.
À cet égard la non intégration dans les bonnes pratiques professionnelles de la loi du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie est significative d’une déroute ou d’un mépris qui devraient inquiéter. L’idéologie biomédicale inspire parfois des stratégies qui détournent de leur application les lois de la République, sauf quand elle y trouve des avantages qui servent ses logiques. Face aux plus hautes vulnérabilités de l’existence, au-delà de la simple négligence, une telle posture est parfois interprétée et éprouvée comme un déni d’humanité.
Les conditions du mourir
La mort ne survient plus en son temps – au terme de la vie – mais quand les recours thérapeutiques sont épuisés, que le maintien d’un traitement s’avère injustifié ou alors que la personne accablée d’un inutile surcroît de vie choisit d’y renoncer. Les repères, figures ou représentations du mourir se sont profondément transformés, bouleversant nos mentalités et nos attitudes face à la mort. On meurt désormais autrement et ailleurs : assisté de soignants, accompagné de quelques fidèles ou seul ; à l’hôpital, en institution, souvent en des lieux relégués à l’écart de la cité ; en dehors de l’espace privé où l’on a vécu, dans un contexte où la technicité entrave parfois les derniers actes de vivant.
En fait, dépourvue d’une place reconnue dans notre espace social, la mort surgit impromptue et violente au moindre indice de vulnérabilité exprimé dans sa consistance physiologique, incitant au renoncement par défaillance de la vie davantage que par extinction de la vie. Les réflexions développées dans nos hôpitaux à propos des conditions du mourir contribuent depuis près de trente ans à la restitution d’une dimension profonde des soins, aujourd’hui encore atténuée, voire révoquée, par une technicité abusive.
Alors que, dans les années 1980, l’obsession de « la mort dans la dignité » semblait devoir imposer une législation autorisant l’assistance médicalisée à la mort par la dépénalisation de l’euthanasie, en quelques années les professionnels de santé ont su instaurer un ensemble de dispositifs qui, de la lutte contre la douleur aux soins palliatifs et à l’accueil en chambres mortuaires, sollicitent d’autres mentalités et des approches différentes qui contestent les indignités et les manquements tolérés jusqu’alors. Penser la fin de vie et mieux en intégrer l’accompagnement dans les activités des services hospitaliers, c’est accepter d’interroger le sens des pratiques et parfois même leur justification. Il s’agit là, également, de réinvestir un soin compris dans la continuité d’un parcours qui unit plus qu’on ne le pense dans une attention partagée, la personne malade, ses proches et une équipe soignante. Un soin compris comme un engagement qui trouve des formes d’expression souvent rares lorsqu’il consiste à se rendre disponible à l’autre dans sa vérité, son attente et parfois même ses choix ultimes.
Est-ce alors par intuition ou par défaut que le politique annexe aujourd’hui l’espace hospitalier du soin pour tenter d’y inventer les pratiques sociales et de renouveler les principes d’humanité dont le manque caractérise une crise qui met en cause les savoirs, les compétences, les légitimités ? Les urgences, vulnérabilités et souffrances de l’homme s’expriment dans cette zone limite et parfois marginale de la cité, y révélant les complexités, les ruptures et les renoncements qui menacent le bien commun. L’hôpital est le lieu méconnu des combats démocratiques, là où la pensée philosophique peut éprouver sa pertinence et sa sagesse.
La volonté exprimée par les personnes malades qui, au terme de leur vie, tiennent à être respectées, y compris dans leur liberté de décider, s’exprime aujourd’hui encore en des termes revendicatifs à la fois éthiques et politiques. Face à des pouvoirs ressentis comme arbitraires et démesurés, elles exigent une véritable sollicitude et souhaitent réhabiliter un certain équilibre qui procéderait notamment du droit de refuser des thérapeutiques estimées injustifiées, disproportionnées, parfois même perçues dans leur caractère inhumain. L’expertise dite profane de la personne malade doit être reconnue et intégrée aux objectifs du soin, dans la réciprocité d’un échange favorable à l’arbitrage d’une décision partagée.
Le législateur semble en avoir tenu compte, tout comme il a su reconnaître les évolutions induites à la fois par la laïcisation et la médicalisation de la phase terminale de l’existence, assumant dans un tel domaine une mission particulièrement délicate pour laquelle ses compétences pouvaient toutefois faire débat. La loi du 9 juin 1999 visant à garantir l’accès aux soins palliatifs institue cette autre dimension de la fonction soignante assumée selon des dispositifs spécifiques jusqu’au terme de la vie. Le 4 mars 2002, la loi relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé consacre l’autonomie de décision de la personne malade dans le soin comme un principe aussi fondamental que l’avait été, en 1947, la notion de consentement à la recherche affirmée dans l’article premier du code de Nuremberg. Plus précise encore, la loi du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie fixe les lignes directrices d’une démarche médicale de nature à favoriser une fin de vie dans la dignité, notamment en tenant compte de la volonté de limitation ou d’arrêt d’un traitement exprimée selon des dispositions minutieusement élaborées. Le code de déontologie en transpose les procédures dans son article 37 revu le 6 février 2009.
Le champ des pratiques hospitalières les plus exposées et les plus éprouvantes constitue certainement le lieu privilégié où enraciner une réflexion éthique et politique. De manière récurrente et parfois excessive, l’actualité en atteste. Elle ne peut cependant s’édifier que sur la base du débat démocratique argumenté et contradictoire, soucieux de la personne plus vulnérable et dépendante dans la proximité de sa mort. Les principes de respect, de justice et de sollicitude doivent être compris comme une exigence de responsabilité à son égard.
Justesse du soin
Au terme de sa vie, dans un environnement soumis aux règles et aux dispositifs propres à la biomédecine, la personne malade a parfois le sentiment de perdre en valeur, en dignité et en estime de soi, dès lors qu’une sentence insurmontable, vécue comme une disgrâce, semble la destituer simultanément de son « intérêt médical » et de ses privilèges de vivant. Elle s’éprouve brusquement abandonnée, voire livrée à sa mort, ramenée sans y être préparée à cette condition de mortelle qui fait irruption de manière déconcertante, pour ne pas dire imprévisible et dès lors insupportable.
Les missions du soin impliquent au plus près des personnes dans ces périodes délicates, voire ultimes, qu’il faut accompagner au mieux, avec les crises, les tentations de renoncer, les doutes, les réactions face aux sentiments d’injustice, de désarroi profond. Les propositions et les décisions ne peuvent être en toutes circonstances satisfaisantes, à la hauteur des attentes. Notre compréhension des enjeux de l’éthique du soin nécessite donc une approche sensible de la rencontre dans la maladie jusqu’au terme de l’existence. Cette sollicitude s’exprime dans la continuité d’une relation à construire à chaque instant et à travers le respect témoigné à la personne dans son histoire propre. Il convient de préserver une cohérence de la fonction soignante, au service de la personne dans les choix et les besoins de son existence. Une éthique de la fragilité et du respect s’efforce de se substituer au mouvement inexorable où se dissipe si souvent l’humanité d’une existence. Comment cultiver le sens d’un projet soignant – à défaut d’être strictement thérapeutique – conçu comme l’expression d’une constante disponibilité attentive aux derniers signes et manifestations de l’existence, aux traces ultimes d’un parcours dans la vie ?
Le soignant est bien souvent exposé à des situations dont on pourrait dire qu’elles lui échappent, tant elles s’avèrent énigmatiques et accablantes. Comment se situer, mais également prendre, assumer une position ? Les sentiments de vulnérabilité et d’impuissance sont partagés de manière cumulative avec la personne malade. Certains peuvent avoir la tentation de renoncer à cette confrontation, d’éviter, voire d’abandonner le malade à sa détresse solitaire. D’autres, au contraire, s’investissent dans l’effort éperdu de l’activisme : « Plutôt tout faire que de ne rien faire… » On observe aussi des phénomènes de glissement qui tiennent pour beaucoup au sentiment de disqualification face aux douleurs rebelles à tout apaisement. La violence des circonstances peut induire des attitudes éminemment contestables, comme cette maltraitance parfois évoquée mais aussi la préconisation d’une sédation intensive assimilable à ce que serait une démarche euthanasique.
L’émergence de la revendication, exprimée par les malades ou leurs proches, du recours au suicide médicalement assisté, est intervenue dans le contexte des excès d’un interventionnisme technique. L’impression d’un « acharnement thérapeutique » est apparue comme un abus d’autorité souvent assorti d’indifférence et de mépris. Du point de vue des bonnes pratiques comme de l’éthique professionnelle, on peut même parfois interpréter ces « audaces » biomédicales ou ces excès comme caractéristiques d’une dérive, d’une perversion qui dénaturent la fonction soignante. Le contrat de soin et la relation de confiance s’en trouvent profondément affectés.
Le sens de la décision médicale, l’estimation de son impact et de ses conséquences relèvent d’une conception avérée et partagée de ce que constitue un juste soin. Or les médecins n’ont pas toujours consacré l’attention nécessaire à la définition de règles qui encadreraient leurs pratiques, là même où les circonstances les exposent au risque d’une déperdition des valeurs constitutives de leurs missions. Confrontés à des demandes et à des pressions sociales parfois inconsidérées, ils doivent pourtant trouver les repères adaptés à des évolutions biomédicales génératrices d’incertitudes et d’équivoques susceptibles de compliquer les choix. Les principes et procédures inspirés par l’éthique de la discussion sont encore trop rarement appliqués aux dilemmes de la décision médicale. On comprend ainsi d’autant mieux le besoin exprimé par certaines personnes malades d’être reconnues et respectées dans leur autonomie et plus encore dans leurs valeurs lorsqu’elles ont le sentiment qu’elles sont bafouées. La loi du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie donne droit à leur souhait d’être respectées dans la faculté de refuser des traitements qu’elles ne considèrent plus justifiés, tolérables ou conciliables avec leur conception de la dignité humaine ou de la qualité de vie. C’est pourquoi le législateur insiste tout particulièrement sur le développement d’une culture des soins palliatifs et le renforcement des capacités d’accueil de ces lieux d’hospitalité et de soutien aux extrêmes de la vie.
Une présence maintenue
L’hôpital français n’a que lentement pris conscience des nouvelles obligations que suscitaient les évolutions biomédicales en phase terminale de la maladie. Une approche spécifiquement soignante s’est donc efforcée dans les années 1980 de pondérer les apparents excès d’un « jusqu’auboutisme » médical, proposant une démarche différente, notamment inspirée des pratiques en vigueur en Angleterre et au Canada : « Recentrer la situation médicale dans une dimension de rencontre. » Dans un premier temps, cette attitude qui, par la suite, est devenue le mouvement des soins palliatifs a pu être perçue comme une forme de contestation, puisqu’elle relevait du souci de rétablir une forme d’humanisme là où, semble-t-il, il faisait défaut. D’autre part, il convenait de situer la personne au cœur du projet de soin et donc de lui reconnaître des droits propres : « Apprendre à écouter la vraie demande. » Les soins palliatifs mettaient également en cause une tendance à l’abandon des malades qui échappaient à l’efficacité des traitements ou à la banalisation de la pose des cocktails lytiques souvent prescrits lorsque le chef de service considérait que, d’un point du vue curatif, le patient ne relevait plus de ce qu’il estimait de l’ordre de sa compétence.
L’hôpital public est parvenu progressivement à s’investir dans cette autre part du soin assuré jusqu’au terme de l’existence, s’insérant progressivement dans une approche initiée au sein de structures privées, parfois de tradition religieuse. Il n’était pas évident d’envisager une telle option dans le contexte techniciste des centres hospitalo-universitaires, mais aussi dans un cadre laïc qui se devait d’être respectueux des personnes dans leurs convictions et leurs préférences : « Laisser le patient faire son chemin – et le rendre possible. »
La culture des soins palliatifs s’est élaborée de manière progressive, dans un environnement social et institutionnel spécifique. Pour le dire de manière rapide, jusqu’alors les questions relatives à la mort étaient au mieux évitées, les médecins et paramédicaux préoccupés par les enjeux relevant des fins de vie apparaissaient marginaux, car peu conformes aux modèles dominants qu’ils semblaient parfois confronter à leurs insuffisances quand il ne s’agissait pas d’impostures. À certains égards, l’approche palliative s’est donc présentée comme une forme de résistance et de contestation au regard de certaines dérives biomédicales visant essentiellement l’efficience technologique et la performance, expression émergente d’un discernement relevant du souci témoigné à la personne dans l’expression de ce qui favorisait la qualité de son existence et l’adhésion autonome à ses traitements. Pour certains, il s’agissait d’affirmer que « lorsqu’on estime qu’il n’y a plus rien à faire, au contraire, comme soignants, nous avons encore tout à faire au service de la personne et de ses proches. »
Il importait également de présenter un front concret et a priori non dogmatique aux idéologies du « tout euthanasique », même si la démarche palliative ne doit pas se présenter comme une alternative à l’euthanasie. Elle procède d’enjeux et de finalités spécifiques mais démontre pourtant qu’on peut envisager une fin de vie dans des conditions humainement dignes, c’est à dire de nature à respecter la personne dans l’accomplissement de son existence jusqu’à la mort sans pour autant l’anticiper. Les soins palliatifs relèvent de pratiques pluridisciplinaires qui peuvent décloisonner les fonctions et susciter de nouvelles dynamiques, y associant le bénévolat qui implique directement le corps social dans une mission avec laquelle il peut ainsi renouer. Cette démarche apporte parfois des éclairages et des ouvertures différents aux débats sociaux les plus actuels, qu’il s’agisse des soins de la douleur, du suivi des malades atteints de maladies chroniques, de la limitation et de l’arrêt de traitement, de la sédation ou du suicide médicalement assisté.
Les réflexions inspirées par le mouvement des soins palliatifs ont permis en quelque sorte de renouer avec les attitudes modernes à la grande tradition humaniste de la vocation médicale confrontée aux difficultés de circonstances existentielles si redoutables et complexes. L’accompagnement dans le soin témoigne d’un sens exceptionnel de nos responsabilités opposées aux tentations de la trahison, du désistement ou de l’indifférence. Comment comprendre et admettre alors un soin détourné des responsabilités qui lui confèrent son véritable sens dans un cadre imparti ? Les soins palliatifs nous éclairent sur les enjeux nouveaux d’une médecine appelée à plus de discernement et d’humilité dans ses choix décisifs.
La démarche dite palliative s’intègre à la continuité des soins et contribue, par la qualité et la capacité d’un suivi global effectif et cohérent, à maintenir et adapter une relation attentive à la demande exprimée ou aux besoins éprouvés dans l’existence jusqu’à la mort. Elle intervient majoritairement au sein de structures spécialisées, mais tend désormais à suivre la personne malade lorsqu’elle aspire à retrouver son domicile pour y vivre dans l’intimité le « temps de sa mort ».
Le temps de la mort
Il n’est pas habituel d’évoquer ce temps bien particulier de l’hospitalité à la suite du décès à l’hôpital. L’accueil en chambres mortuaires constitue pourtant la phase ultime d’une continuité des soins. Il nous faut comprendre la place dévolue au défunt et à ses proches afin de les reconnaître et de les respecter dans l’expression d’égards et d’hommages qui nous renvoient au principe même de l’humaine dignité.
À l’hôpital, le temps de la mort et du recueillement marque souvent une rupture avec la technicité déployée jusqu’alors pour tenter de préserver l’existence. Les procédures ont perdu leur efficacité, les actes du soin se sont avérés inopérants, la mort a été constatée par l’équipe médicale. Après avoir habituellement lavé le corps que l’on enveloppe selon des règles ou des habitudes propres à chaque service, il est accompagné vers la chambre mortuaire et confié à des soignants pour ce dernier séjour parmi nous. Ce souci encore témoigné, cet attachement porté à la méticulosité de gestes, d’attentions intimes dont on ne soupçonne que rarement la véritable portée relèvent d’une attitude de piété affirmée dans le contexte souvent anonyme et douloureux de cette « chambre de la mort ». C’est un lieu de silence et de retenue, qui rompt avec l’activisme souvent bruyant des services hospitaliers. Une telle discrétion, tant de pudeur et d’humilité ne peuvent se comprendre qu’en acceptant un compagnonnage, un partage dans cet environnement si singulier situé aux marges de l’hôpital, à ses limites, dans ses retranchements. Il convient d’accepter ce risque d’une confrontation qui expose à l’énigme d’une absence qui n’est pas encore irrémédiable ou d’une présence incertaine qui ne tient qu’aux attitudes et rites que l’on maintient malgré tout.
Le sens même des activités de la chambre mortuaire concerne le travail de mémoire : préserver au-delà de la mort ou malgré la mort les éléments épars mais significatifs d’une existence considérée dans sa dignité propre. Ne tente-t-on pas, lorsque cela s’avère nécessaire, de réhabiliter, de restaurer cette figure humaine en atténuant les traits du masque mortuaire avec des baumes ou des produits cosmétiques, apprêtant le visage qui doit conserver son apparence ? C’est comprendre à quel point la désignation de chambre mortuaire altère la signification de ce qui s’y assume au quotidien. Ce lieu, cet espace dévolu à l’accueil et au temps du repos, intermédiaire, en fin de parcours, devrait davantage se penser en des expressions qui honoreraient la présence, la relation, le témoignage de nos obligations morales et sociales à l’égard de celui qui n’est plus.
Les soignants en chambre mortuaire témoignent de cette résistance contre l’inéluctable, sauvegardant les expressions de l’attention, du souci, de la sollicitude à travers des gestes et des dispositifs qui contestent toute tentation de désistement et d’abandon. Médiateurs, en quelque sorte, entre les vivants et les morts, ils rendent moins insurmontables le recueillement des proches, leur présence auprès du défunt. C’est dire la valeur de l’ordonnancement des procédures constamment marquées par la volonté de protéger le cadavre de ce qui pourrait l’affecter. Les attitudes et les regards doivent préserver l’intimité, y compris dans les délicates interventions que représente l’autopsie. Il est encore question de l’intégrité de la personne, de son image, de son éminente dignité.
Les rites de l’adieu, de la séparation du départ maintiennent ainsi la cohérence d’actes assumés par ceux qui restent au service de celle ou de celui qui nous quitte. Ils relèvent d’une conception de la veille, de la vigilance, de la sollicitude humaine opposées à toute forme de transgression, de renoncement, d’indifférence. Ces rites préservent et renforcent l’unité face à ce qui l’ébranle en interrogeant le sens même de notre intervention auprès du défunt. De telle sorte que par leur médiation nous parvenons à exprimer le fond de notre humanité et de notre responsabilité dès le regard porté sur le visage du mort dévoilé à son arrivée à la chambre mortuaire, et jusqu’à l’instant où le couvercle du cercueil le masque définitivement pour le soustraire à l’attention des vivants. C’est dire la valeur de ces soins de la dépouille mortelle faits d’égards, des gestes tendres qui l’épargnent des excès de cette violence que serait notre mépris.
Un art du mourir pour notre temps
Mourir en société peut exprimer la revendication d’une mort accompagnée avec humanité, digne, insoumise aux seules considérations biomédicales ou de gestion sociale des fins de vie. Il s’agit désormais de renouveler notre approche de ce domaine si sensible qui touche aux fondements de la société – elle ne saurait se limiter à la reconnaissance des conditions de la mort médicalement assistée, à la dépénalisation de l’euthanasie revendiquée d’un point de vue dit philosophique comme « la dernière liberté ».
La mort actuelle est révélatrice de nos attitudes face à la vie, la médicalisation de l’existence semble ne plus solliciter que des considérations où prédominerait l’approche scientifique au détriment de toute autre requête, ne serait-ce qu’anthropologique. Le temps de fin de vie doit toutefois être considéré comme un parcours dans l’existence qu’aucun obstacle ne saurait entraver jusqu’à son terme. Cette période s’avère d’autant plus respectable qu’elle est limitée et toujours singulière. C’est donc en termes de responsabilités de vie, assumées de vivant à vivant, que devraient être envisagées nos approches humaine et politique des situations de fin de vie, tenant compte d’un devoir de retenue, de décence et de dignité à l’égard des personnes plus vulnérables que d’autres du fait de leur exposition à l’imminence de la mort.
Sujet: Re: Janvier 2011 fin de vie échec d'une loi 06.11.13 14:14
Face à la mort Micheline Langlois (Paris) , le 06/03/2010 à 0h29 Mis à jour le 06/03/2010 à 6h19
Dans La Croix du 4 février, Laurent Larcher présente une émission sur KTO, intitulée « Face à la mort ». À cette occasion, Marie de Hennezel fait part de ses réflexions. J'ai été interrogée à deux reprises par ses prises de position. Premier point. Marie de Hennezel considère qu'il faut - en parlant des mourants - « leur faire ce que nous aimerions que l'on nous fasse ». Ne faudrait-il pas être sûr, alors, que ces mourants aimeraient que l'on fasse pour eux ce que nous souhaiterions pour nous ? Ne serait-il pas justifié, pour nous éviter d'imposer nos souhaits, de s'inquiéter de ceux des personnes concernées ? Deuxième point : Marie de Hennezel aborde l'euthanasie et le suicide assisté. Si on les accepte, dit-elle, « on saute dans un monde barbare ». J'hésite pour ma part à considérer comme « monde barbare » les Pays-Bas, la Belgique et le Luxembourg. En effet, dans le contexte présent, ce qualificatif touche plus loin qu'on ne peut le croire et rend impossible tout dialogue constructif. Marie de Hennezel termine ainsi sa phrase : « En levant l'interdit de tuer, où mettons-nous la limite ? » Le verbe « tuer » explicite certainement le mot « barbare » : celui qui tue. Cependant, nous devons préciser que le verbe « tuer » est utilisé par l'auteur en référence à l'euthanasie et au suicide assisté ; il s'agit alors de « tuer » ou « d'aider à se tuer » une personne qui a fait le choix de sa mort.
Sujet: Re: Janvier 2011 fin de vie échec d'une loi 06.11.13 14:15
Euthanasie, la France à la croisée des chemins
mardi 18 janvier 2011
Politique Science France Santé publique
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Dossier préparé par Agnès Farkas et Karel Vereycken
Introduction
A partir du 18 janvier, plusieurs grands partis proposeront chacun une proposition de loi relative à l’ euthanasie volontaire, qui sera débattue au Sénat. Elle est présentée comme une « dernière liberté à conquérir » pour les personnes atteintes d’une maladie incurable. Ce qui frappe, c’est l’uniformité des projets. Cela n’a rien d’étonnant puisqu’ils sont tous modelés sur le même, celui de la Fédération mondiale des sociétés pour le droit de mourir dans la dignité, fondé en 1980 à Oxford, c’est-à-dire au cœur de l’empire financier britannique, et à laquelle adhère l’Association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD) en France. Fondée la même année, l’ADMD, qui compte quelque 45 000 membres, vient de souffler ses trente bougies (voir encadré 3).
Nicolas Sarkozy aime promettre tout et son contraire. Initialement, en octobre 2007, s’adressant à des élus de l’UMP à la Mutualité, à Paris, il est vivement applaudi quand il évoque implicitement une éventuelle légalisation de l’euthanasie en lançant :
J’ai souvent dit le respect que j’avais pour les grandes religions de France, mais je veux simplement qu’on aborde ces questions en partant moins des principes et plus de la souffrance. On ne peut pas rester les bras ballants devant la souffrance d’un de nos compatriotes qui appelle à ce que ça se termine, tout simplement parce qu’il n’en peut plus.
Assez rapidement, sous la pression d’une partie de l’électorat catholique, il nuance ses propos sans se renier :
Pour des raisons philosophiques personnelles, je crois qu’il ne nous appartient pas, que nous n’avons pas le droit, d’interrompre volontairement la vie (...). Mais je ne veux pas fuir mes responsabilités (...) Je voudrais que soit privilégié le dialogue au chevet du malade, entre lui-même, le médecin et la famille, en toute humanité afin que soit trouvée la solution la plus adaptée à chaque situation.
En France, l’ADMD dispose de puissants relais dans la classe politique française et pas seulement à gauche. Son président actuel Jean-Luc Romero siège comme conseiller régional UMP d’Ile-de-France. Son vice-président est le sénateur UMP Alain Fouché (Vienne) dont la proposition de loi, de pair avec celle présentée par l’un des vice-présidents du Sénat, Guy Fischer (PCF, Rhône), et une troisième de Jean-Pierre Godefroy (PS, Manche), sera examinée fin janvier par la Commission des affaires sociales du Sénat que préside Muguette Dini (centriste), elle-même membre… du Comité de parrainage de l’ADMD !
Si après examen, la Commission réussit à accorder les trois projets en un seul, il sera soumis le 25 janvier au vote. Fait inédit, le projet dépassera les clivages traditionnels gauche droite et pourrait être soutenu par des sénateurs de l’ensemble de l’éventail politique.
De plus, d’après un sondage IFOP de fin octobre 2010 pour Sud Ouest Dimanche , les Français, qui confondent souvent douleur et mort, approuveraient à 94% qu’on légalise l’euthanasie, bien que pour 58% des interrogés, la loi devrait uniquement s’appliquer « dans certains cas ».
Et si on parlait du droit à la vie ?
Amadou Hampâté Bâ, philosophe malien, 1901-1991 :
La qualité d’une société se reconnaît à la façon dont elle traite ses vieux.
Dire la vérité au peuple ne veut pas dire effrayer les gens afin de les pousser à prendre des décisions irréversibles. Par exemple, prenons une affirmation répétée par les diverses ADMD à travers le monde : l’euthanasie est la garantie d’une mort douce face à la souffrance du malade incurable. Rien n’est plus faux ! Car comme le précisent certains médecins,
En réalité, l’euthanasie est une mort brutale par empoisonnement, parfois très pénible.
De plus, sa violence prive le malade et ses proches de vivre des moments essentiels qui peuvent précéder la mort naturelle.
Nous montrerons ici comment, à force de pessimisme et d’adaptation à l’idée qu’on n’a « plus d’argent » pour s’occuper de tous, on finit, comme dans les années trente, par basculer dans l’horreur d’une euthanasie de plus en plus active.
Faut-il donner un prix à la santé ?
Les années 80 sont déterminantes pour l’expansion des ADMD car elles furent aussi celles de changements importants, tant financiers que politiques. La politique libérale financière adoptée par les Etats, à partir de 1971, les a contraints à s’endetter auprès des banques et des institutions privées. Déjà, la plupart des gouvernements réduisent leur politique de couverture sociale et le secteur de la santé est l’une des cibles principales. C’est à ce moment que le gouvernement abaisse le numerus clausus (nombre d’inscriptions à l’université de médecine), qu’il dé-rembourse les médicaments et les soins médicaux.
Autrement dit, le droit à la santé coûte de plus en plus cher, au moment même où l’on promeut les délocalisations industrielles, aggravant le taux de chômage. De plus, la confusion entre retraite physique et « retraite mentale » est sciemment entretenue. Prendre congé de son lieu de travail n’est pas perdre toutes ses capacités intellectuelles. Bien au contraire, la reconnaissance et l’utilité de l’expérience des personnes « à la retraite » sont un potentiel totalement ignoré dans une société où la culture du corps est la règle.
Dans ces conditions, il est évident qu’une population soumise aux conséquences de la dérégulation financière est une population fragilisée moralement. Faute d’avenir, elle ne tend qu’à survivre dans le présent et peut avoir des tendances suicidaires, surtout si le milieu culturel les favorise. C’est à partir du début années 80 que les ADMD accélèrent la promotion de leurs publications sur le suicide assisté.
Que se passe-t-il en France ?
Selon le bilan démographique réalisé en 2003 par l’INSEE, l’espérance de vie des Français à la naissance est globalement élevée au regard des pays comparables. En 2003, elle était estimée en France métropolitaine à 75,9 ans pour les hommes et 82,9 pour les femmes. Il y avait, en 2002, douze millions de personnes âgées de plus de 60 ans, dont 4 millions et demi avaient plus de 75 ans. Le nombre des personnes âgées de 85 ans et plus est passé de 700 000 en 1985 à 1 million en 2000 et est estimé à 1,4 million pour 2020. Contrariés, certains parlent d’un « vieillissement des morts », constatant qu’« en un siècle, nous sommes passés d’une époque où la moitié des décès avait lieu avant 55 ans et un quart avant 15 ans, à une époque (à partir de 2000) où la moitié des décès a lieu après 80 ans et un quart à plus de 87 ans. »
Chef de file du système de soins préventifs dans le monde, la France a tardé à légiférer sur le sujet. Mais lors du dixième congrès national de la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs en juin 2004, qui portait sur le thème « L’euthanasie et la mort désirée », Mme Véronique Fournier, directrice du Centre d’éthique clinique de l’hôpital Cochin à Paris, dans son intervention intitulée « La mort n’appartient pas aux médecins » , a dénoncé avec force l’« irréductible paternalisme médical à la française ».
Lorsqu’à l’initiative de Michèle Barzarch, les premières unités de soins palliatifs sont créées en France en 1987, le but principal est posé ainsi :
Les Soins palliatifs sont des soins actifs dans une approche globale de la personne atteinte d’une maladie grave évolutive ou terminale. Leur objectif est de soulager les douleurs physiques ainsi que les autres symptômes et de prendre en compte la souffrance psychologique, sociale et spirituelle.
Ils ne sont donc destinés ni à être des mouroirs ni à promouvoir une euthanasie active à des fins comptables.
Comment Leonetti a ouvert la boîte de Pandore
En 2005, le député UMPiste et président de la Fédération hospitalière de France, Jean Leonetti, apporte un changement fondamental dans les lois relatives aux droits des malades et à la fin de vie. En effet, cette loi modifie deux articles fondamentaux (37-38) du code de déontologie médicale.
Jusqu’alors, l’article 37 est ainsi libellé :
En certaines circonstances, le médecin doit s’efforcer de soulager les souffrances de son malade, l’assister moralement et éviter toute obstination déraisonnable dans les investigations ou la thérapeutique.
Ce qui fait part d’un certain humanisme envers le malade.
Après les modifications suggérées dans le Rapport Leonetti, il pourrait s’énoncer ainsi :
Lorsque le traitement apparaît inutile, impuissant à améliorer l’état du malade ou présentant un risque disproportionné par rapport au bénéfice escompté, le médecin doit décider de sa limitation ou de son arrêt. Dans le cas où, après une évaluation précise de l’état du malade, cette décision peut entraîner la mort de ce dernier, elle n’intervient qu’en concertation avec l’équipe de soins et le malade, et après consultation de la personne de confiance désignée au préalable ou de la famille et, le cas échéant, des directives anticipées. La décision est inscrite dans le dossier médical du malade.
Pour éviter les procédures juridiques qui pourraient s’ensuivre, un article sera ajouté au code de la santé, destiné à régir la situation des malades en fin de vie (conscients), s’entretenant en « colloque singulier » avec leur médecin :
Lorsqu’une personne en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable, quelle qu’en soit la cause, décide de limiter ou d’arrêter tout traitement, le médecin doit respecter sa volonté après l’avoir informée des conséquences de son choix. La décision du malade est inscrite dans son dossier médical. Le médecin sauvegarde la dignité du mourant et assure la qualité de sa fin de vie en dispensant les soins visés à l’article L. 1110-10 [ce qui précède].
Ah ! L’honneur est sauf.
Voilà un argument qui ne manque pas de sophisme ! Car cet article ne vise à rien d’autre qu’à décriminaliser l’euthanasie passive et à ouvrir la voie à l’euthanasie active. Le futur malade sera donc fortement incité à prendre des « directives anticipées figurant dans le dossier médical » ; c’est-à-dire qu’il aura signé un Testament de fin de vie dans lequel il s’en remet à une tierce personne en cas d’incapacité majeure.
De plus, la loi du 5 mars 2007 sur les tutelles permet de choisir, longtemps à l’avance, la personne à qui vous souhaiteriez confier « la gestion de vos affaires si la maladie vous en rendait incapable », ainsi que de « faire entériner des consignes médicales pour vos derniers jours » . C’est un acte notarié nommé angéliquement « mandat de fin de vie » .
Pour finir, il pourra confier à une personne de son choix le soin d’administrer, après son décès, ses biens pour le compte de ses héritiers, s’il craint qu’ils n’en soient pas capables. « Sa mise en œuvre sera alors automatique. Lorsqu’un médecin habilité (choisi sur une liste précise établie par les autorités) aura constaté l’incapacité du malade, la personne désignée déposera le mandat au tribunal, et pourra ainsi commencer à jouer le rôle qui lui a été attribué », explique Me Michaël Dadoit, notaire à Rodez. Avec le projet proposé au gouvernement en 2010 par la secrétaire d’Etat à la Grande dépendance, Valérie Rosso Debord, voilà qui ouvre la porte à toutes les hérésies.
Sortir du piège
Le prétexte souvent évoqué pour mettre en place ces solutions finales est l’acharnement thérapeutique et la souffrance qu’il inflige au malade. En réalité, on peut tout à la fois refuser l’acharnement thérapeutique (traitements lourds inutiles) et l’euthanasie (mort délibérément provoquée), et continuer à être soigné avec attention. « Dire : il y a une pratique scandaleuse en France, l’euthanasie clandestine, il faut la combattre en la légalisant, ne tient pas », s’insurge le Professeur Bernard Devalois (Service des soins palliatifs à Puteaux). Le professeur François Goldwasser, chef du service cancérologie (Hôpital Cochin, Paris), précise :
On peut, si l’on s’en donne les moyens, régler aujourd’hui 99,9 % des situations difficiles. Ce qui me dérange, ce n’est pas tant la pratique que le fait de mettre en boîte dans une loi, car au-dessus de la loi, il y a la conscience du médecin. Une loi risque d’autoriser la paresse des consciences.
Dire la vérité, c’est faire face ! C’est vrai, confronté à une diminution dramatique des effectifs faute de budgets conséquents, le personnel médical actuel est surchargé. De plus, il est peu formé à la gériatrie et aux soins en fin de vie, et de mauvaises prises en charges successives au sein des divers services peuvent parfois avoir des conséquences nuisibles, non pas explicitement préméditées, mais malgré tout irréversibles. L’apprentissage des soins gériatriques doit donc faire partie de tous les secteurs de la santé.
Ensuite, si nous voulons changer la vision générale sur la personne âgée et les soins en fin de vie, à l’exemple de l’hôpital Sainte-Marguerite de l’Assistance publique et hôpitaux de Marseille, il faudra développer au sein des établissement hospitaliers de véritables centres de gériatrie et de soins palliatifs, regroupant les différents services œuvrant en concertation : neurologie, psychiatrie, urgence, médecine interne et gériatrie, en collaboration avec les centres anticancéreux. Ce qui ne pourra exister à aucun moment dans un monde marchand où « l’homme est pour l’homme un loup, non un homme, quand il ne sait pas quel il est ».
Encadré 1 Provocation : Ultime Liberté et le tourisme de la mort
Alors que l’ADMD a jusqu’ici patiemment milité pour faire « évoluer » les lois, son ancien président Henri Caillavet (ancien ministre), et surtout Mme Claude Hury, ancienne secrétaire général ajointe de l’ADMD, ont lancé en 2009 Ultime Liberté (UL), une association beaucoup plus radicale qui lutte pour la légalisation de « l’auto-délivrance assistée » et de l’euthanasie d’exception, y compris en « aidant » des citoyens français à se rendre dans d’autres pays où ils peuvent bénéficier d’un suicide assisté.
En Suisse, si l’article 111 du Code pénal qualifie l’euthanasie d’homicide, l’article 115 du même CP stipule que le suicide assisté n’est pas pénalisé car seul « celui qui, poussé par un mobile égoïste, aura incité une personne au suicide, ou lui aura prêté assistance en vue du suicide, sera, si le suicide a été consommé ou tenté, puni d’une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d’une peine pécuniaire ». PNG - 70 ko C’est pourquoi, tout en restant membre du conseil d’administration de l’ADMD, Mme Hury, actuellement présidente d’UL, se déclare elle-même « assistante bénévole chez Dignitas » , association suisse offrant ces services. Organisatrice active de ce que certains ont appelé « le tourisme de la mort », Mme Hury conduit des citoyens français en Suisse pour qu’ils puissent s’y donner la mort sur place. Elle précise que l’association Dignitas en Suisse « est la seule à accueillir des étrangers et que son principe : liberté d’une personne de décider de sa propre mort, est en adéquation avec nos principes, que sur le plan légal tout est conforme, sinon elle serait poursuivie pénalement et ses activités arrêtées, donc que nous n’avons pas à avoir de réticences à ce sujet. En revanche, ce qui fait polémique (…) c’est le montant du suicide assisté (9 700 CHF, soit environ 6000 euros) et l’utilisation de l’hélium pour certaines réalisations à la place du pentothal. (…) »
Le stratagème de l’ADMD, c’est d’organiser des pratiques euthanasiques privées et choquantes pour obliger les Etats à légiférer.
Montrant bien quelle boîte de Pandore qu’ouvre de telles législations et les dérapages tous azimuts auxquels il faut s’attendre, en Belgique, où l’euthanasie, dépénalisée en 2002, est déjà applicable à des « mineurs émancipés » (15 ans), socialistes et libéraux proposent depuis 2006 d’étendre l’euthanasie aux enfants « en âge de discernement » qui seront autorisés à faire leur choix « oralement », ainsi qu’aux personnes âgées atteintes de démence…
Mme Hury voit d’un bon œil cette « extension » d’une euthanasie que l’ADMD souhaite par ailleurs « très encadrée ». Le petit extrait qui suit d’un tchat sur internet parle de lui-même :
Pensez vous qu’un enfant puisse prendre la décision de renoncer à la poursuite de ses soins ? Aux Pays-Bas, la législation situe à 7 ans l’âge de décision pour un enfant. En Belgique, la loi est plus restrictive mais on étudie un élargissement vers des cas difficiles qui ne sont pas encore (sic) pris en compte.
Pensez-vous qu’à cet âge-là, l’enfant a pleine conscience des conséquences de l’arrêt d’un traitement ? C’est au soignant de présenter les avantages, les inconvénients et les limites d’un traitement, et les enfants malades sont souvent beaucoup plus « grands » que certains adultes.
Et qu’il puisse prendre sa décision sans pressions extérieures ? Les pressions extérieures, souvent celles de la famille, tiennent en général à l’envie de garder au maximum en vie l’enfant, cela fait partie de notre égoïsme (j’ai des enfants et des petits-enfants !) Malheureusement, on aurait facilement tendance à les "garder" malgré eux parce qu’on peut encore les embrasser, les toucher, leur parler...
Combien d’années faut-il à ceux qui ont décidé de la fin d’un proche pour se relever psychologiquement : un, deux, cinq, dix ans… ou jamais ? Chaque individu a besoin d’un temps de deuil différent.
Fidèles aux thèses eugénistes, certains médecins britanniques ont décidé depuis longtemps de ne soigner que des enfants handicapés qui « en valent la peine ». Les autres, on les prive de soins. Apparaît alors « la compassion » pour ceux qu’on vient de condamner et en fin de compte, il paraît « plus humain » de tuer un nourrisson handicapé que de le laisser mourir à petit feu dans la douleur.
Encadré 2 L’utilitarisme de Peter Singer
Pour faire accepter l’euthanasie, il fallait trouver un appui théorique. Celui-ci fut fourni par l’utilitarisme. De quoi s’agit-il ? Pour le professeur suisse François-Xavier Putallaz, l’utilitarisme, tel qu’on le trouve exposé chez un philosophe comme Peter Singer, repose sur deux principes :
« Premièrement, l’utilitarisme classique considère qu’une action est bonne si elle produit pour tous ceux qu’elle implique plus de bien-être que toute autre action alternative. Deuxièmement, la notion d’égalité doit s’entendre comme l’égale prise en considération des intérêts de chaque être doté de sensibilité, c’est-à-dire de chaque être susceptible d’éprouver du plaisir ou de la douleur : une différence d’intelligence entre deux individus, par exemple, ne justifie pas que l’intérêt de l’un doive peser plus lourd que celui de l’autre dans la balance utilitariste. Par ailleurs, l’égalité morale se réduit à l’exigence de ne pas privilégier le poids de l’intérêt d’un membre d’une race au détriment de celui d’un membre d’une autre race. Peter Singer propose alors une ultime démarche : que la barrière du "racisme des espèces" s’écroule à son tour, celle qui érige "arbitrairement" une barrière entre les espèces. L’antispécisme égalitaire implique que l’intérêt des individus de l’espèce homo sapiens ne mérite pas une considération a priori supérieure aux intérêts des individus d’une autre espèce. Parmi ses innombrables conséquences, ce double principe impose de distinguer deux sens de l’expression "être humain" : elle peut signifier soit la simple appartenance à l’espèce homo sapiens , soit la qualité de personne . Le terme de "personne" s’entend ici au sens du philosophe John Locke : une personne serait un être intelligent, capable de raison et de réflexion, qui peut se percevoir elle-même comme une chose pensante permanente et identique en différents temps et endroits. Cela admis sans critique par Singer, il en conclut qu’il existe des membres de notre espèce humaine qui ne sont pas des personnes (par exemple un enfant gravement handicapé mental), alors qu’il existe des membres d’autres espèces qui mériteraient la qualification de personne (certains chimpanzés)… » JPEG - 16.1 ko Dans son livre Questions d’éthique pratique (Bayard, 1997), Singer précise que d’après lui, le fait d’éliminer des nourrissons handicapés « ne peut être considéré comme équivalent au fait de tuer des êtres humains normaux ou tout autre être conscient de soi ». Sans le dire, il suggère qu’un enfant handicapé mental aurait bien moins de « valeur » qu’un chimpanzé adulte !
Pour Singer, en phase avec la mondialisation ultra-libérale, seul « l’intérêt » des parents doit être pris en compte, car si les handicaps sont graves, la naissance de l’enfant constituera une menace pour « leur bonheur ». Cet effet sur les parents sera un critère qui influencera plutôt la décision « en faveur de la mise à mort du bébé » , si du moins ils ne se sentent pas la force de faire face à la situation. « La quantité totale de bonheur est plus grande si l’enfant handicapé est tué. La perte de la vie du premier nourrisson est compensée par le gain d’une vie plus heureuse pour le second. C’est pourquoi, selon le point de vue utilitariste total, si tuer le nourrisson n’a pas d’effets néfastes sur d’autres personnes, le tuer sera justifié. (…) L’enfant est remplaçable, comme les animaux qui ne sont pas conscients d’eux-mêmes. »
Encadré 3 Euthanasie : Petite revue chronologique ante-mortem
Pour les élites de l’Empire britannique, légaliser l’euthanasie n’est qu’un premier pas vers une politique eugéniste plus générale. Pour mieux comprendre une idée, il faut aller au bout de ses conséquences philosophiques et morales. En 1920, le psychiatre Binding et le juriste Hoche publient un texte sur lequel s’est appuyé Adolf Hitler pour écrire Mein Kampf en 1924. En effet, Binding et Hoche y appelait déjà à « la destruction de la vie dépourvue de valeur ».
En Angleterre, Lord Berkeley Moynihan et le docteur Millard créent la première « Société d’euthanasie volontaire » en 1935. Ils reçoivent un renfort publicitaire de la Couronne anglaise en 1936, lorsque le roi George V commandite son euthanasie. Hormis le régime nazi, la plupart des gouvernements ont refusé de légiférer sur ce projet avant les années 1980.
Ce n’est qu’en 1969, après la « révolution culturelle », que la campagne sur le sujet prend vraiment son essor. Luis Kutner invente alors le « Testament de fin de vie » pour désigner un refus par avance de traitement médical. Cet avocat de Chicago est un fervent défenseur des droits de l’homme et co-fondateur avec le Britannique Peter Benenson d’ Amnesty International à Londres. Grâce à Kutner, les ADMD forment leurs premiers volontaires aux Pays-Bas en 1975. Aussitôt, d’autres sociétés surgissent dans plusieurs pays dont le Japon et l’Allemagne.
En 1976, les ADMD donnent leur première conférence internationale à Tokyo. En 1977, l’ordre du Conseil des médecins néerlandais accepte officiellement la pratique de l’euthanasie volontaire. Peu après, la Voluntary Euthanasia Society of Scotland publie un guide du suicide actif. Contournant les barrages politiques et légaux, sa parution a finalement lieu en 1981 et aussitôt, le nombre d’adhérents des diverses sociétés quadruple.
A la même époque, en mai 1975, le journaliste britannique Derek Humphrey, ancien correspondant du Sunday Times en Irlande du Nord, fait boire un poison à sa première femme atteinte d’un cancer. Sa seconde femme, dépressive, se suicide en 1991. Les hasards de la vie… Inquiété par la justice en Angleterre, Humphrey s’exile aux Etats-Unis où il lance une vaste campagne en faveur de l’euthanasie en la présentant comme un banal « droit au suicide ». Dans ce but, il fonde en 1980 la Hemlock Society (« La ciguë ») et publie en 1991 Final Exit , un manuel détaillé du suicide, toujours interdit de vente en France. JPEG - 57 ko C’est autour de ce livre culte que naîtra une véritable « internationale » du suicide assisté. Après en avoir été le président, Humphrey reste conseiller de la Fédération mondiale des sociétés pour le droit de mourir dans la dignité, qui regroupe 47 organisations similaires dans le monde.
Sa véritable victoire sera en 1984 lorsque la Cour suprême des Pays-Bas déclare que l’euthanasie volontaire est acceptable en dix des conditions clairement définies par le livre de l’ADMD. Décision suivie par l’Angleterre en 1994, qui déclare son soutien de principe à la législation régissant les testaments de vie et la prescription de médicaments mortels à la demande de particuliers.
A ce jour, après l’Oregon, où le suicide médicalement assisté est autorisé depuis 1994, les Pays-Bas et la Belgique ont décriminalisé l’euthanasie volontaire en 2002, suivis par le Luxembourg en 2009. Suite à cette offensive, et face au vieillissement de la population et à l’augmentation des dépenses financières qu’il faut y consacrer, des voix « humanistes » s’élèvent pour que la France « rattrape son retard » sur la question…
Les programmes de santé de Tony Blair, Cameron, Angela Merkel et Barack Obama sont clairement orientés dans la même direction.
Sujet: Re: Janvier 2011 fin de vie échec d'une loi 07.11.13 15:49
Projet de loi sur l'euthanasie : le rôle des francs-maçons L'Association pour le droit à mourir dans la dignité: un logo maçonnique ? ( ) En 2010, les 50.000 frères et les 1.200 loges du Grand Orient de France ont été invités à plancher sur cette question. Par L'Obs Publié le 25 janvier 2011 à 14h39
Sur le même sujet Sans surprise, le Sénat referme le débat sur l'euthanasie François Fillon est opposé à une légalisation de l'euthanasie Euthanasie : des amendements vident le texte de sa substance
La franc-maçonnerie a-t-elle œuvré à l'émergence d'une proposition de loi sur la légalisation de l'euthanasie ? Rencontré lors de notre enquête sur la franc-maçonnerie –en couverture du Nouvel Observateur jeudi 27 janvier-, Guy Arcizet, Grand Maître du Grand Orient de France (GODF) ne faisait pas mystère de son intérêt pour cet épineux sujet d'éthique : "Nous réfléchissons depuis plusieurs années à l'institution d'un droit à mourir dans la dignité. Personnellement j'y suis favorable mais chacun doit se déterminer selon sa conscience". En 2010, les 50.000 frères et les 1.200 loges de l'obédience ont été invités à plancher sur cette question. La quintessence de ces réflexions est remontée jusqu'au sommet de l'organisation et n'a pu échapper aux frères élus de la République. "C'est évidemment un thème sur lequel nous avons travaillé sans esprit partisan. Nous laissons d'ailleurs à nos camarades une totale liberté de vote", indique Bernard Saugey, sénateur de l'Isère et président de la Fraternelle parlementaire. Transcendant les clivages politiques, cette association de 410 membres regroupe des frères parlementaires (160 élus) et fonctionnaires de toutes les obédiences. "C'est une force dont on ne sert pas assez! ", dit Bernard Saugey. Né d'une convergence entre élus communistes, socialistes et UMP, la proposition de loi adoptée par la commission des affaires sociales (25 voix contre 19) pourrait bien être le produit d'une remobilisation de la fraternelle...
Puissante résistance
Très intéressé par les travaux des loges, Jean-Luc Romero, conseiller régional d'Île-de-France et président de l'Association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD) a rencontré Guy Arcizet, grand maître du GODF, le 8 novembre dernier. "Le Grand Orient a beaucoup travaillé sur cette question importante", écrit-il dans son blog. Longtemps présidé par le sénateur Henri Caillavet, une sommité du Grand Orient de France, l'ADMD reçoit le soutien de nombreuses personnalités (Michel Rocard, Noël Mamère, André Comte-Sponville, Michel Onfray, Nathalie Baye, Mireille Dumas…) et contribue à médiatiser la question de l'euthanasie.
Deux des sénateurs qui défendent le projet de loi sont membres de l'ADMD. Alain Fouché, sénateur UMP de la Vienne en est le vice-président. Jean-Pierre Godefroy, sénateur socialiste de la Manche, appartient au comité de parrainage. Ces élus sont-ils francs-maçons ? Rien ne permet de l'affirmer. Mais François Autain, sénateur communiste de la Loire Atlantique, s'est illustré en soutenant le Collectif pour la promotion de la laïcité, un rassemblement d'associations et d'obédiences maçonniques qui s'est élevé en 2009 contre l'accord passé par le Vatican et le gouvernement français permettant au Saint-Siège de délivrer des diplômes universitaires reconnus en France (accord du 18 décembre 2008).
Les militants du "droit à mourir dignement" se heurtent à une puissante résistance. De nombreuses associations catholiques, parfois ultra conservatrices, dénoncent l'influence de la franc-maçonnerie en invoquant le rôle actif et reconnu des " frères de lumière " - notamment Pierre Simon, auteur d'un rapport déterminant - dans l'adoption de la loi sur l'avortement de 1975. Dans une tribune publiée par le Monde, François Fillon, catholique pratiquant, a condamné par avance l'initiative des sénateurs. Dont acte : un amendement présenté par Marie-Thérèse Hermange, sénatrice UMP aux convictions catholiques affichées, devrait vider la proposition de loi de sa substance. Et le ministre de la santé Xavier Bertrand, franc-maçon assumé du Grand Orient de France, montera à la tribune de la Haute assemblée pour l'enterrer.
Sujet: Re: Janvier 2011 fin de vie échec d'une loi 07.11.13 15:51
Jacques Attali
"Dès qu’il dépasse 60/65 ans, l’homme vit plus longtemps qu’il ne produit et il coûte cher à la société. Je crois que dans la logique même de la société industrielle, l’objectif ne va plus être d’allonger l’espérance de vie, mais de faire en sorte qu’à l’intérieur même d’une vie déterminée, l’homme vive le mieux possible mais de telle sorte que les dépenses de santé soient les plus réduites possible en termes de coût pour la collectivité. Il est bien préférable que la machine humaine s’arrête brutalement plutôt qu’elle se détériore progressivement. L’euthanasie sera un instrument essentiel de nos sociétés futures."
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Sujet: Re: Janvier 2011 fin de vie échec d'une loi 11.12.13 10:57
L’euthanasie, dignité humaine ou lâcheté inconséquente ?
Né en 1952, marié en 1977, viticulteur-arboriculteur de profession, hyper dynamique de nature, je vivais heureux et croquais la vie à pleines dents. Un jour, vers la fin de l'année 1985, j'avais 33 ans, j'ai commencé à être gêné pour utiliser un tournevis. Six mois après j'étais en fauteuil roulant et, trois ans après, ne pouvant plus tenir ma tête, j'optais pour le lit... que je n'ai plus quitté depuis ce jour. Aujourd'hui, je suis entièrement paralysé, trachéotomisé, branché à un appareil respiratoire et ne peux désormais remuer que les yeux.
Cette maladie, appelée "Sclérose Latérale Amyotrophique" (S.L.A.) ou "maladie de Charcot" entraîne une dégénérescence inexorable de tous les muscles et conduit rapidement le malade à une dépendance totale.
Par bonheur, je possède un ordinateur équipé d'un logiciel spécial qui me permet d'écrire avec les yeux. C'est grâce à cet équipement que je peux vous écrire aujourd'hui.
Le premier moment d'abattement passé, je me suis tourné vers le Ciel et j'ai demandé : pourquoi moi ? ? ? Mon sort me paraissait injuste ; il y a tant de chômeurs professionnels... Tant d'individus sans foi ni loi... POURQUOI MOI ?
Je voulais comprendre... et j'ai compris ! J'ai compris qu'il m'avait fallu cette maladie pour me rendre compte que, comme beaucoup de monde, je me mettais la conscience tranquille en allant à la messe le dimanche mais qu'en fait, j'étais très loin de suivre la route du Seigneur.
Aujourd'hui, je suis entièrement paralysé, je ne peux remuer que les yeux mais je suis heureux : - heureux de marcher à nouveau sur la route du Seigneur, - heureux de vivre enfin en conformité avec mon idéal, - heureux d'être modestement utile à mon Dieu.
Issu d'une vieille famille terrienne, catholique et pratiquante, ayant toujours eu la Foi, à l’annonce de ma maladie, je me suis jeté en elle avec le désespoir et la frénésie d'un naufragé sur une bouée de sauvetage... Malgré l'extrême douleur des premières années : le désarroi dure tant que dure la descente aux enfers, j'ai maintenu ma confiance en Dieu...
La descente dure tant qu'il reste des muscles à immobiliser, à paralyser. A partir de là, quand on a touché le fond, quand la maladie ne trouve plus de quoi alimenter son appétit destructeur, on entre dans ce que nos éminents spécialistes appellent la phase terminale. Il y a 17 ans que je suis en phase terminale, je m'y suis habitué et, au risque de vous surprendre, ma joie de vivre balayant ou occultant tous les inconvénients et contraintes liés à mon état, je suis heureux !
J'ai les idées bien en place et aucune envie de me plaindre ! Oserai-je dire : au contraire !... Car cette maladie est, pour moi, une sanctification forcée... à la limite de l'injustice... Gloire à Dieu ! Réaction au malheur incompréhensible pour la plupart, mais Dieu remplit ma vie et je ne manque de rien. Le bonheur serait il subjectif et totalement indépendant de toute jouissance humaine ? Je laisse à chacun le soin de méditer cette pensée qui est une approche directe de l'influence permanente de Dieu dans nos vies, par une action à la fois permanente et imperceptible sur notre coeur, notre ressenti et nos évidences fondamentales...
Oui, la souffrance existe, aussi bien physique que morale mais il est écrit dans la Bible : Matthieu 11, 28-30 "Venez à Moi, vous tous qui peinez et ployez sous le fardeau, et Moi Je vous soulagerai. Chargez-vous de Mon joug et mettez-vous à Mon école, car Je suis doux et humble de coeur, et vous trouverez soulagement pour vos âmes. Oui, Mon joug est aisé et Mon fardeau léger. "
Je suis là pour en témoigner !... J'ai, bien souvent, remonté le moral de gardes-malades désespérées pour des peines légères et passagères mais j'ai moi-même rarement perdu le moral et je n'ai jamais perdu l'espoir parce que je n'ai jamais douté de l’Amour de Dieu.
Comment penser à l'euthanasie quand on a Dieu dans le coeur et quand aucune souffrance ne peut altérer notre confiance en Lui... Les « sans Dieu » sont à plaindre car ils ne connaissent pas l'incommensurable bonheur de se sentir aimé de Dieu, ils ne peuvent pas imaginer le secours bien réel dont bénéficient les amis de Dieu dans l'épreuve. Quand l'enfer se déchaîne contre nous, nous savons qu'il ne s'agit que d'une épreuve supplémentaire, destinée à tester notre Foi et notre confiance envers le Tout-Puissant, Créateur de tout ce qui est...
Il faut savoir que nous avons été créés par un débordement de l’Amour Infini de Dieu et que toutes nos souffrances sont nécessaires à notre purification, pour la préparation de notre Eternité bienheureuse dans la Gloire de Dieu.
Oui, quand l'enfer se déchaîne contre nous, nous accentuons notre prière, nous implorons le Ciel et nous gardons confiance... alors que les « sans Dieu », dans la même situation, désespèrent, appelent la mort et revendiquent le droit à mourir. Ils appellent ça « mourir dans la dignité » ! Ne s'agit il pas plutôt de désespoir et de lâcheté ? Ce qui est grave, parce qu'irréversible, c'est qu'ils refusent la Volonté Divine qui est Lumière et se précipitent dans la mort qui est ténèbres. Dieu respectera leur choix, leur libre arbitre, et les laissera aller dans les ténèbres éternelles puisque telle est leur volonté, libre et délibérée.
Alors que celui qui accepte et offre sa souffrance se met en phase avec la Volonté Divine parce qu'il fait preuve d’humilité, d’obéissance, de soumission, de confiance et d’amour envers notre Créateur et Rédempteur. La souffrance acceptée et offerte purifie notre âme, constitue une protection contre l'enfer et fait office de sauf conduit pour le purgatoire dont elle peut réduire sensiblement la durée.
L'euthanasie est donc criminelle à double titre : pour le temps et pour l'Eternité. Par son refus radical de la Volonté Divine elle est un billet pour l'enfer.
Il en est de même pour l'avortement. La culpabilité de l'avorteuse est même bien pire car, pour un confort égoïste, elle ôte la vie à son propre enfant qui possède déjà une âme immortelle et vivra donc éternellement dans le Ciel en qualité de martyr de sa propre mère.
Mais il est IMPORTANT de savoir que Dieu pardonne au pire des criminels qui implore son pardon avec un repentir sincère. Chacun peut donc décider de revenir à Dieu à tout moment mais, en nos temps troublés, il serait quand-même prudent de ne pas attendre.
En conclusion, qu'importe notre vie actuelle, offrons la joyeusement à la Divine Justice, soyons des amis fidèles de notre Dieu d'Amour et de Miséricorde, des esclaves de l'Amour, car nous savons que nous passerons l'Eternité dans Sa Gloire et que la Vision Béatifique chavirera perpétuellement notre coeur dans le ravissement et dans l'extase.
Dernière édition par Admin le 08.11.14 16:56, édité 2 fois
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Sujet: Re: Janvier 2011 fin de vie échec d'une loi 01.04.14 10:49
Euthanasie : Fillon clôt le débat 21h55, le 24 janvier 2011, modifié à 09h55, le 25 janvier 2011 Euthanasie : Fillon clôt le débat François Fillon se montre clairement opposé à la légalisation de l'euthanasie.@ Reuters
Le Premier ministre estime que "le droit de donner la mort" est une limite à ne pas franchir.
Si la question de l’euthanasie divise la société, François Fillon y est clairement défavorable. Le Premier ministre a manifesté lundi, dans une tribune publiée dans Le Monde, son opposition à ce sujet de société récurrent, relancé par une proposition de loi de sénateurs qui vise à légaliser l’euthanasie.
"La question est de savoir si la société est en mesure de légiférer pour s’accorder le droit de donner la mort. J’estime que cette limite ne doit pas être franchie", a tranché le chef du gouvernement, avant de mettre en garde contre toute "précipitation".
"Aucune conviction n’est indigne"
La proposition de loi du Palais du Luxembourg stipule que "toute personne capable majeure, en phase avancée ou terminale d'une affection accidentelle ou pathologique grave et incurable, lui infligeant une souffrance physique ou psychique qui ne peut être apaisée ou qu'elle juge insupportable, peut demander à bénéficier (...) d'une assistance médicalisée permettant (...) une mort rapide et sans douleur".
Une explication qui ne semble pas convaincre le Premier ministre. S'il prend soin d'expliquer que, dans ce débat, "aucune conviction n'est indigne", François Fillon met en avant les "efforts" accomplis depuis quelques années en matière de soins palliatifs et de "refus de l'acharnement thérapeutique".
Aubry favorable à la loi
La proposition de loi ne prévoit par ailleurs "aucune obligation explicite de consultation, ni même d’information de la famille du malade" et "le contrôle des actes ne serait effectué qu’a posteriori par une commission", souligne le chef du gouvernement. Une inquiétude qui devrait être relayée mardi soir par Xavier Bertrand. Le ministre de la Santé sera au Sénat pour défendre la position du gouvernement, au moment où sera examinée la proposition de loi.
A moins d'un an et demi de l'élection présidentielle, l'euthanasie pourrait, malgré toute la défiance du gouvernement, s'inviter dans la campagne électorale. Le Parti socialiste l'a même déjà inscrit dans son programme. Lundi soir, Martine Aubry s'est ainsi déclarée sur Canal+ "favorable" à la proposition de loi, réclamant toutefois des "précautions" dans son application.
La première secrétaire du Parti socialiste devrait trouver matière à débat avec sa rivale Ségolène Royal sur le sujet. "Il faut accompagner la fin de vie dans la dignité, mais j’ai de grandes réserves sur la législation sur l’euthanasie", a en effet déclaré l'ancienne candidate à l'élection présidentielle mardi sur Europe 1.
Sujet: Re: Janvier 2011 fin de vie échec d'une loi 07.04.14 13:02
"toute personne majeure en phase avancée ou terminale d'une maladie incurable, provoquant une souffrance physique ou psychique insupportable, et qui ne peut être apaisée, puisse demander dans des conditions précises et strictes à bénéficier d'une assistance médicalisée pour terminer sa vie dans la dignité" (proposition 21).
"Il n’est pas inutile de rappeler ici que beaucoup de Français ont été déçus par François Hollande, qui n’a pas respecté son engagement présidentiel, pris dans le cadre de la proposition 21, de faire voter une loi pour que «toute personne majeure en phase avancée ou terminale d’une maladie incurable, provoquant une souffrance physique ou psychique insupportable, et qui ne peut être apaisée, puisse demander, dans des conditions précises et strictes, à bénéficier d’une assistance médicalisée pour terminer sa vie dans la dignité». Comment la République peut-elle à ce point bafouer ses valeurs de liberté, d’égalité et de fraternité ?".
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Sujet: Re: Janvier 2011 fin de vie échec d'une loi 07.08.18 14:16
La loi Leonetti donne l'accès aux soins palliatifs
Par Sandrine Cabut
Mis à jour le 25/01/2011 à 08:43 Publié le 24/01/2011 à 08:40
68% des Français ignorent qu'il existe une loi interdisant l'acharnement thérapeutique.
Cinq ans après la loi Leonetti, qui a rendu illégal l'acharnement thérapeutique, où en est-on en France? Un récent sondage, mené par OpinionWay auprès de 1.000 personnes, montre que le dispositif est encore mal connu du grand public: 68% des Français «ne savent pas qu'il existe une loi interdisant l'acharnement thérapeutique», et globalement plus d'un sur deux (53%) s'estime «insuffisamment informé sur les soins palliatifs». Mais dans les hôpitaux et en particulier dans les services de réanimation et de soins palliatifs, les prises en charge des malades en fin de vie se transforment, selon les médecins. «Nous recevons des demandes d'euthanasie qui s'étiolent quand les malades reçoivent des soins, sont entourés, accompagnés, et rassurés sur le fait qu'il n'y aura pas d'acharnement thérapeutique, raconte le Dr Anne Richard, présidente de la Société française d'accompagnement et de soins palliatifs (Sfap), qui estime que la loi de 2005 est «simple» et répond à «la grande majorité» des situations .
[*]«Si le malade est conscient et sollicite un arrêt des traitements, le médecin a le devoir de lui expliquer les conséquences, et celui d'accéder à sa demande tout en le soulageant, précise cette spécialiste, ancienne chef de service de soins palliatifs au CHU de Saint-Étienne. S'il n'est pas conscient, il faut rechercher s'il a rédigé des directives anticipées ou désigné une personne de confiance.» Dans tous les cas, insiste-t-elle, «il y a une discussion avec l'équipe soignante, et le médecin doit faire appel à un confrère avec lequel il n'a pas de lien hiérarchique».
«La loi Leonetti a légalisé ce qu'on appelle les Lata (limitations et arrêts de traitement actifs, NDLR), qu'on faisait auparavant de façon illégale, se réjouit le Pr Jean-Roger le Gall, ancien chef du service de réanimation de l'hôpital Saint-Louis (Paris). Certes, tous les services n'en sont pas au même stade, mais on va dans le bon sens. De façon générale, on prend de plus en plus en compte les problèmes psychologiques des patients, de leur famille et des soignants.»
«Cette loi, unique au monde, nous a donné un cadre pour organiser les limitations thérapeutiques, qui répond bien aux situations cliniques auxquelles nous sommes confrontés», assure de son côté le Pr Louis Puybasset (neuroréanimation, Pitié-Salpêtrière, Paris). Selon lui, les pratiques et les mentalités ont beaucoup évolué en quelques années. [*]
Outils techniques et juridiques
«Avant, chaque équipe avait sa façon de travailler, certains arrêtaient tout facilement, d'autres faisaient de l'acharnement, mais on n'en parlait pas, c'était tabou. Aujourd'hui, nous avons des outils techniques et juridiques», explique le réanimateur. Il distingue toutefois deux situations bien différentes : d'une part, les défaillances d'organes (foie, appareil respiratoire…), de l'autre les atteintes neurologiques. «Aujourd'hui, grâce à des examens comme l'IRM morphologique et multimodale, on peut prédire avec précision le pronostic neurologique d'un malade pour décider ou pas de poursuivre la réanimation, ce qui était impossible il y a quelques années, précise-t-il. Mais cet examen n'est pas encore complètement validé, et il n'est pas encore utilisé partout.» En France, une dizaine d'équipes y auraient recours. Pour autant, tous les problèmes ne sont pas résolus. «Nous sommes face à une injonction paradoxale, relève Louis Puybasset. D'un côté, on nous dit de ne pas faire d'acharnement thérapeutique. De l'autre, la T2A (système de tarification hospitalière) nous pousse à une hyperactivité qui peut confiner à l'acharnement thérapeutique.» Il souligne aussi la pression des industriels du médicament et de matériel médical, et celle des malades et des familles. «Nous sommes dans une société qui a perdu l'idée de la mort, c'est comme s'il y avait une sorte de droit à toujours guérir», regrette le Pr Puybasset, en rappelant qu'en Ile-de-France 95% des gens meurent à l'hôpital, seuls dans trois quarts des cas. [*]http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2011/01/24/01016-20110124ARTFIG00741-la-loi-leonetti-combat-l-acharnement-therapeutique.php