L’attaque épiscopale contre le Téléthon a
surpris par sa brutalité, et davantage encore à cause du moment choisi,
à la veille de la grande opération de collecte, qui nécessite une
mobilisation totale du plus grand nombre.
Cette attaque, utilisant la dynamique d’un consensus national, a cherché à en casser le ressort. Elle est partie du diocèse de
Fréjus-Toulon , dont l’évêque est
Mgr Rey.
C’est un certain Monsieur
Pierre Olivier ARDUIN qui a
lancé la bombe. Il est responsable dans ce diocèse de tout ce qui
touche « l’éthique » , Commission bioéthique, Formation en bioéthique,
Commission bioéthique et vie humaine¦ L’homme incontournable, donc, pour
tout ce qui touche aux questions génétiques¦ coeur de la recherche
générée par le téléthon.
Les lecteurs de « l’hebdo du net » de Golias ont pu prendre
connaissance la semaine dernière, des engagements politiques
à l’ultra-droite de
Pierre Olivier Ardouin. Car ce
monsieur a une autre spécialité, dont il ne parle guère. Aux dernières
élections européennes de 2004, il était sur la liste de l’
Alliance Royale, en compagnie de quelques transfuges du Front National et de quelques nostalgiques de l’Algérie Française. Tel est l’homme que
Mgr Rey a chargé de défendre ce qui est pour lui l’éthique chrétienne.
Mais faut-il le rappeler, l’éthique ne se limite pas à la bioéthique.
Car qui donc dans l’affaire manque le plus à l’éthique chrétienne ?
L’appel au boycott comme stratégie d’évangélisation ? ? ? Cette appel au boycott est inacceptable pour plusieurs raisons :
L’épiscopat français, relayant l’appel du diocèse de
Fréjus-Toulon , a participé directement à une opération visant manifestement à "
casser la baraque" du
téléthon.
Que les évêques aient des questions sur telle ou telle pratique des
laboratoires de recherche est une chose, que nous ne voulons pas
ignorer. En revanche, que ces questions se transforment en condamnation
sans appel quelques jours seulement avant le grand week-end du
financement en est une autre, et qui a peu à voir avec la première.
La première touche le fond et ne peut se débattre dans la
précipitation, tant le sujet est complexe et sans évidence, comme le
montre la réserve des autres Eglises ou religions.
La deuxième concerne la forme de l’intervention qui vise uniquement
à déstabiliser l’opinion publique et à la couper en deux. Les questions
épiscopales pouvaient tout de même bien attendre le lundi matin 11
décembre. Cette stratégie, parfaite dans son montage, fait froid dans le
dos des chrétiens engagés dans le monde.

Une
loi a été faite pour encadrer, délimiter le champ d’intervention,
éviter les dérives en matière de diagnostics génétiques. Elle est
loi de la République,
réponse à un problème de société qui pèse lourd sur des couples et des
familles. Pourquoi l’ignorer ou la considérer immédiatement comme une
loi scélérate ?
Eternelle tentation des clercs (de toutes couleurs de robe) qui en
appellent à Dieu pour contester la loi des hommes, sans un regard pour
la terrible présence de la souffrance.

L’attaque
de l’épiscopat ignore la compassion envers les victimes, patients ou
proches, de ces maladies génétiques. Et, surtout, qu’on ne cite pas les
piteuses phrases de prétendue sympathie pour les malades et leur famille
émises du bout des lèvres et qui sonnent si faux dans le contexte.
N’est-il pas révélateur que la seule voix discordante dans le concert
des condamnations vienne d’un évêque,
Mgr Dubost, évêque d’
Evry, qui a vécu personnellement une expérience familiale de la maladie ?

La
fête du Téléthon,
jusque dans ces manifestations les plus populaires, est, personne ne
peut le nier, un grand témoignage de solidarité, d’empathie et, pour
parler comme l’Evangile, d’ « amour du prochain ».
Les évêques, qui ne manquent pas de déplorer quotidiennement
l’égoïsme et l’individualisme de nos contemporains, apparaissent comme
incapables de reconnaître cette ouverture à l’autre, cette générosité,
cette volonté de partage, comme s’ils étaient étanches aux sentiments
d’humanité, au nom de principes «
discutables », dans le sens o๠ils sont «
à discuter ».
Quelle image de l’Eglise ont-ils montré en cherchant à casser un
dynamisme aussi populaire ? On ne demande pas à l’Eglise de faire de la
démagogie et de caresser le peuple dans le sens du poil. On lui demande
simplement de savoir un peu mieux lire les signes d’amour et d’espoir,
chez des malades, chez des parents en souffrance et dans une opinion
publique pour une fois solidaire.
Dépassant la seule myopathie, les recherches fondamentales financées
par les dons ont permis des avancées thérapeutiques pour bien d’autres
affections, souvent « orphelines ». Et aussi, comment ne pas signaler le
fait que le
Téléthon a contribué à changer le regard des «
gens »
sur bien des maladies, même les plus déformantes. Si aujourd’hui, par
exemple, lentement, sans choquer, les fauteuils roulants trouvent peu
à peu leur place dans notre société, c’est aussi, un peu, grâce au
Téléthon.
Et çela, ça n’intéresse pas Dieu ? Et c’est tout cela que veulent casser les évêques ¦

La
source de la contestation ne doit pas manquer, non plus, de nous
inquiéter. Les milieux conservateurs dans l’Eglise de France prennent de
plus en plus d’influence. Va-t-on connaître la situation des
Etats-Unis, même si là -bas ce sont des protestants, évangélistes ou
autres, qui mènent le combat que l’on sait ? Avec le retour des tradis,
c’est ce monde-là qui fait son entrée dans l’Eglise de France, et
jusqu’au sommet de la hiérarchie.
Beaucoup de chrétiens, « conciliaires » ou pas, ne veulent pas de ce
retour en arrière, o๠la morale devient le premier et souvent unique
message de l’Eglise.
Si demain les évêques veulent débattre de ces problèmes de bioéthique, des embryons, des manipulations génétiques¦ OK !
Pour sa part
Golias y est prêt, avec, nous l’espérons toutes les forces vives de l’Eglise et de la société.
Mais de grâce, arrêtons ces coups bas, trop répugnants pour être évangéliques.