Que se passe-t-il dans notre cerveau quand nous sommes amoureux ? Le Point.fr - Publié le
03/09/2012 à 16:10 - Modifié le
03/09/2012 à 16:30
Romantiques s'abstenir, tous les scientifiques confirment que l'amour n'est qu'une affaire de neurotransmetteurs et d'hormones. Les travaux récents montrent l'importance de l'odorat dans l'attirance. © SUPERSTOCK/SUPERSTOCK / SIPA
Durant des millénaires, la pensée et les sentiments ont été considérés comme indépendants du fonctionnement du corps. Heureuse époque... Aujourd'hui, à l'instar de ses confrères neurobiologistes, le Pr Bernard Sablonnière*, qui étudie le fonctionnement des neurones à l'hôpital de Lille, affirme que les progrès de la science ont fini par briser ce fameux tabou du dualisme entre l'âme et le corps. L'imagerie médicale moderne y a contribué en mettant en évidence les zones cérébrales activées par la rencontre et le désir.
Selon ce spécialiste, l'amour se construit en plusieurs étapes. C'est "un processus dynamique qui représente l'effet combiné de différentes régions du système nerveux, se répartissant en plusieurs étages, qui s'échelonnent dans le temps". C'est ainsi que se succèdent l'attirance, la séduction, l'attachement, le désir, la relation sexuelle et - dans le meilleur des cas - la relation durable du couple.
Odorat
Tout d'abord, comment commence une relation ? Les travaux récents montrent l'importance de l'odorat dans l'attirance. Il faut savoir que les odeurs, perçues par le bulbe olfactif, atteignent directement l'amygdale, le centre des émotions du cerveau qui se connecte à l'hippocampe, impliqué, lui, dans la mémoire. C'est pourquoi on associe souvent une odeur à une émotion spécifique. Les femmes, ayant un sens de l'odorat en général plus aiguisé que leurs partenaires, sont plus réceptives à leur odeur.
Si l'attirance représente l'étape initiale d'une relation amoureuse - mais c'est un comportement inné chez de nombreuses espèces -, l'attachement est une composante essentielle de l'amour. Et certains neurobiologistes pensent que différents facteurs stimulants comme des variations hormonales ou des événements extérieurs prédisposent notre cerveau à devenir plus réceptif aux stimuli émis par des personnes de notre entourage. Qu'ils soient visuels, auditifs, olfactifs ou tactiles, ils vont stimuler l'amygdale mais sans utiliser le cortex volontaire, ce qui explique la difficulté à décrire alors ce que l'on ressent.
Insécurité
Physiologiquement, ce comportement entraîne une augmentation rapide de la sécrétion de deux hormones, la vasopressine et l'ocytocine. Cette dernière, d'abord découverte comme celle déclenchant les contractions utérines lors de l'accouchement, est aussi celle de la tendresse maternelle, du bien-être et de l'attachement. Cette même ocytocine renforce la confiance en l'autre et décuple le sentiment d'empathie.
La séduction, elle, fait intervenir plusieurs sens : la vision (par le regard et le sourire), l'olfaction (par le parfum), l'audition (par les mots doux), le goût ainsi que le toucher (au travers des caresses). Cette phase de séduction s'accompagne non seulement d'un stress, mais aussi d'une activation du circuit de la récompense. "Ce circuit, une fois activé, s'il mène trop vite à l'obtention du plaisir, donnera une coloration de fusion à la relation, ce qui n'est pas toujours un bon signe.Pour que la séduction puisse durer, il faut maintenir un certain degré d'insécurité et d'anxiété dans la relation. Il s'agit d'un dosage subtil de l'effet des neuromédiateurs et de notre comportement, modulé par notre mémoire, nos décisions et notre éducation. Une alchimie bien subtile...
Par
Anne Jeanblanc * "La chimie des sentiments", éditions Jean-Claude Gawsewitch, 256 pages, 16,90 euros