HANDICHRIST

Pêle-mêle, tout et rien
 
PortailS'enregistrerConnexionFAQCalendrierAccueilRechercher
 

 Docteur Véronique Fournier

Aller en bas 
AuteurMessage
Admin

Admin


Féminin Messages : 24166

Docteur - Docteur Véronique Fournier Empty
MessageSujet: Docteur Véronique Fournier   Docteur - Docteur Véronique Fournier Icon_minitime23.11.13 11:06


Euthanasie : pour une médecine humaine et responsable

Véronique FOURNIER Cardiologue, directrice du Centre d’éthique clinique de l’hôpital Cochin et Denis BERTHIAU Juriste 1 septembre 2011 à 00:00


L’affaire récente de Bayonne m’évoque ce que nous avons souvent entendu au cours du travail que nous venons de terminer au Centre d’éthique clinique de l’hôpital Cochin à Paris. A savoir ce que disent attendre de la médecine, au moment de leur mort, les personnes de plus de 75 ans : un message auquel nous ne nous attendions absolument pas…

En janvier 2009, nous avons lancé une étude auprès de 200 personnes âgées de plus de 75 ans, malades ou non, dépendantes ou non, vivant chez elles ou en maison de retraite, pour savoir ce qu’elles pensaient du dispositif des «directives anticipées», introduit en 2005 par la loi Leonetti et les autorisant, comme tout un chacun, à écrire ce qu’elles souhaiteraient qu’il soit décidé pour elles au moment de leur fin de vie. L’objet n’est pas ici de dévoiler les résultats de l’étude qui seront présentés pour la première fois lors d’un colloque organisé le 11 octobre, à la MGEN à Paris, en partenariat avec Libération et France Culture. Il est d’évoquer plus spécifiquement trois d’entre eux.

Le premier est que tous ceux que nous avons rencontrés, quasi sans exception, expriment fortement qu’ils veulent vivre et vivre encore, résolument, quels que soient leur âge et leur état de santé.

Le deuxième est que la très grande majorité d’entre eux ne veulent pas entendre parler d’euthanasie, au sens où on l’entend usuellement d’un droit ouvert permettant d’obtenir, en tant qu’homme libre, une aide active à mourir de façon anticipée, à son heure et en toute conscience.

Pour autant, et c’est le troisième message intéressant ici, ils sont nombreux à dire clairement qu’ils souhaiteraient que la médecine, au bout du bout, le jour où elle n’aura vraiment plus rien à leur proposer, quitte à ce qu’ils soient déjà inconscients et dans l’incapacité de s’exprimer, prenne sur elle de précipiter les choses en douceur.

Pourvu que je tombe sur un médecin qui aura assez d’humanité pour cela, disent-ils ! Et beaucoup d’entre eux ni ne considèrent qu’il s’agit vraiment là d’euthanasie ni ne veulent écrire de directives anticipées dans ce sens : ils ont bien trop peur qu’elles servent alors de blanc-seing aux médecins pour arrêter prématurément le combat ! Certes, tous n’expriment pas cela. La plupart éludent le sujet, le tiennent à distance, disent qu’il n’y a rien à en dire et que l’on ne peut rien anticiper. D’autres expriment qu’ils sont contre toute forme de précipitation, ils sont souvent de fervents adeptes des soins palliatifs - mais ceci n’est pas toujours exclusif de cela.

Enfin, il y a aussi ceux qui sont militants de l’Association pour le droit à mourir dans la dignité, ou proches de ses thèses ; mais même ceux-là, poussés dans leurs retranchements, sont près d’un tiers à dire qu’ils aimeraient ne pas avoir à aller jusqu’à devoir s’exprimer in ultime pour demander la mort. Et tous ceux qui espèrent que quelqu’un acceptera de précipiter au dernier moment le cours des choses utilisent les mêmes arguments : mieux que personne, la médecine sait quand cela ne vaut plus la peine de continuer, c’est son métier ; c’est elle aussi qui est la mieux placée pour savoir comment faire partir les gens en douceur ; il devrait donc faire partie de son travail, de ses «bonnes pratiques», d’accepter de faire cela aussi, en plus du reste, pour ceux qui le souhaitent…

Somme toute, ce qu’ils demandent n’est-il pas assez proche de ce qu’aurait fait pour ses patients le docteur Bonnemaison de l’hôpital de Bayonne - et de ce qui du reste se fait régulièrement dans nos hôpitaux, sous une forme ou sous une autre ? Et sommes-nous sûrs qu’il soit moralement si condamnable de répondre positivement à de telles demandes, si tant est que l’on n’y réponde pas seul, ce qui est probablement le moindre des garde-fous indispensables ?

C’est vrai que le débat se profilerait alors de façon radicalement différente de celle envisagée jusqu’ici. Nous serions loin de l’euthanasie-liberté, choisie par plusieurs de nos voisins européens, et consistant à ouvrir la possibilité de mettre fin à la vie d’une personne qui le demande, après mûre réflexion, au nom de sa liberté, ou de l’euthanasie-exception à laquelle il ne pouvait être fait appel que pour des cas dramatiques et rarissimes, proposée par le Comité consultatif national d’éthique il y a quelques années.

Se pourrait-il que le débat sur l’euthanasie en France devienne celui ouvert par l’affaire de Bayonne ? En effet, à en croire les résultats de notre étude récente, comme ceux du dernier sondage sur «Les Français et l’euthanasie» réalisé par l’Ifop pour Sud Ouest du 17 au 19 août, il semblerait bien que ce soit ce type d’euthanasie qui rencontre l’écho le plus large dans la population : une euthanasie banale, quotidienne, confiée à une médecine en qui on a confiance, une euthanasie accordée à la toute fin d’une vie, comprise comme une libération offerte, au nom de ce qu’on appelait autrefois le «paternalisme médical», c’est-à-dire à l’inverse exactement du mouvement qui a porté les législations ailleurs.

Y aurait-il sur la question une spécificité française et comment la comprendre ? Une hypothèse pourrait être que l’équilibre entre l’individu et le collectif soit particulier chez nous. Nous serions comme imprégnés d’une tradition d’allégeance à la règle collective. Gageons qu’il y a encore du chemin avant que les Français fassent de l’euthanasie une revendication de l’individu au nom de son autonomie.

Aujourd’hui, leur principale attente est ailleurs : dans une loi qui autorise, au nom de la solidarité collective, la médecine à être à la fois humaine mais aussi responsable, jusqu’au point de précipiter in extremis leur mort, pour leur épargner d’ultimes souffrances, et peu importe avec quel produit pourvu que la fin soit douce. Est-ce possible ?
Véronique FOURNIER Cardiologue, directrice du Centre d’éthique clinique de l’hôpital Cochin et Denis BERTHIAU Juriste
Revenir en haut Aller en bas
http://handi-christ.forumactif.com
Admin

Admin


Féminin Messages : 24166

Docteur - Docteur Véronique Fournier Empty
MessageSujet: Re: Docteur Véronique Fournier   Docteur - Docteur Véronique Fournier Icon_minitime23.11.13 11:15

Fin de vie : "Les gens veulent s'endormir paisiblement jusqu'à en mourir"

Véronique Fournier, médecin et directrice du Centre d’éthique clinique de l'hôpital Cochin , le mardi 18 décembre 2012

Le Monde.fr | 18.12.2012 à 17h29 • Mis à jour le 19.12.2012 à 08h59


Dans un chat sur LeMonde.fr, Véronique Fournier, médecin et directrice du Centre d’éthique clinique de l'hôpital Cochin, salue le rapport Sicard en ce qu'il ouvre la voie à une "euthanasie palliative".


Visiteur : Pourquoi fallait-il modifier la loi Leonetti sur la fin de vie ?

J'ai l'impression que le rapport Sicard (ici en PDF) parle d'un changement culturel nécessaire autour de la fin de vie, plus que d'un changement législatif. C'est moins la loi qu'il faut changer que la façon dont elle est interprétée et appliquée aujourd'hui sur le terrain.

Jean : Pourquoi une majorité du corps médical n'arrive-t-elle pas à accepter l'idée que des malades puissent vouloir cesser de vivre ?

Je ne sais pas si on peut dire cela. Les médecins n'ont pas envie de hâter la mort, ce qui est un peu différent. Ils peuvent concevoir que leurs patients puissent en avoir assez de lutter pour vivre, mais ils ne veulent pas être accusés de hâter la mort, ils estiment que c'est contre leur métier.

Visiteur : Ne faut-il pas revenir à la question la plus simple et la plus démocratique : que faire pour respecter les droits du patient ? C'est à lui de décider : les lois actuelles dépossèdent le patient du droit de décider.

Je crois que c'est assez juste. Ce dont on a eu l'impression, c'est que la loi Leonetti était plus une loi du côté des médecins. Et effectivement, si on pense que la décision de dire stop appartient au patient, alors il faut mettre en place un dispositif qui respecte ce droit et soit finalement plus favorable à la décision du patient qu'à celle du médecin.

Lorsque le patient demande l'aide au médecin pour que sa vie s'arrête, un certain nombre de médecins disent : si vous voulez mourir, je peux le comprendre et l'accepter, mais pourquoi me demander à moi de faire le sale boulot ?

Pelletier : Je suis membre actif d'une association représentant les malades à l'hôpital Georges-Pompidou, n'êtes-vous pas déçu par la "tiédeur" des propositions du professeur Sicard lesquelles vont à peine plus loin que la loi Léonetti ?

Je n'ai pas lu tout le rapport Sicard. J'en ai lu les commentaires. Je ne voudrais pas déformer sa pensée, mais si la seule tiédeur est de dire "pas d'euthanasie active par injection létale entraînant une mort immédiate", alors je trouve qu'il a raison, ce n'est pas tiède.

Je pense que d'une certaine façon, c'est une nouvelle violence faite au patient que de répondre par une injection létale à sa demande d'euthanasie, et qu'il y a d'autres façons d'accompagner une demande d'aide active à mourir. Et c'est cela que suggère le rapport Sicard.

Cec : Que pensez-vous de la proposition de la "sédation terminale" ?

Je pense que c'est tout sauf de la tiédeur. Les gens veulent s'endormir paisiblement jusqu'à en mourir. Et c'est ce que leur propose M. Sicard, si je comprends bien. C'est ce que j'aurais appelé une euthanasie palliative, parce que la sédation terminale ne précipite pas la mort. Le malade dort jusqu'à ce qu'il meure.

Alors que ce que propose M. Sicard, c'est qu'on n'hésite pas à hâter un peu la mort une fois que le malade est endormi. Il me semble donc que c'est tout sauf tiède. Et cela évite ce geste terriblement violent de tuer quelqu'un au bout de sa seringue, d'injecter quelque chose sur un patient qui meurt dans les dix minutes. C'est violent pour tout le monde.

Lub : La mission Sicard aurait-elle dû se prononcer en faveur d'une clause de conscience des médecins ?

Il me semble que c'est un dispositif plus de l'ordre législatif qu'autre chose. Et je trouve très fort qu'il n'en ait pas parlé à ce stade. Car on ne peut jamais forcer quelqu'un à faire quelque chose qu'il ne veut pas faire, et il faut savoir quels sont les gestes que le médecin ne veut pas faire. Et s'il n'y a pas d'injection létale, qui est la seule chose que les médecins ne veulent pas faire, il n'y a pas vraiment besoin de clause de conscience.

Visiteur : Que dit le rapport en ce qui concerne les personnes en fin de vie incapables de s'exprimer ? La famille vient-elle remplacer la parole du malade ?

Très souvent, les proches veulent une codécision. Ils ne veulent pas porter seule la responsabilité de la décision. Cela pourrait leur être facilité s'il y avait des directives anticipées très claires, mais il n'y en a pas la plupart du temps. Et c'est très difficile d'imaginer qu'elles puissent être très claires.

La seule chose qui pourrait être claire dans des directives anticipées, me semble-t-il, c'est que les gens disent précisément s'ils sont contre le fait d'être endormis au moment ultime. Parce qu'il y a un certain nombre de gens qui veulent, par conviction idéologique et pas forcément religieuse, affronter la mort et qui ne veulent en aucun cas qu'on la précipite. Ces gens-là pourraient avoir écrit avant d'être atteints d'Alzheimer : "Je ne veux pas de précipitation."

Visiteur : La frontière entre le laisser mourir et le faire mourir est déjà ténue en pratique, ou floue. Dire que l'on devrait accepter une "sédation terminale" mais que l'on doit maintenir l'interdiction de l'euthanasie ne brouille-t-il pas encore les repères ? L'intention n'est-elle pas que la mort advienne ?

C'est une très bonne question, très difficile. Soit vous assignez un sens très précis au mot "euthanasie", soit vous acceptez que sa définition est floue. Réduire l'euthanasie à l'intention ne me paraît plus aujourd'hui opératoire. Comme l'écrivait la philosophe Marta Spranzi dans une tribune publiée par Le Monde récemment, arrêter les traitements est souvent déjà une décision active. Donc, d'une certaine façon, euthanasique.

Cec : On parle beaucoup de "suicide assisté". Le rapport Sicard le promeut. Qu'en pensez-vous ?

J'ai cru comprendre qu'il disait qu'il fallait y réfléchir, mais pas qu'il fallait légiférer tout de suite. Je suis tout à fait d'accord.

Si jamais on va sur ce chemin-là, il faut que ce soit fait sous la responsabilité collective, donc médicale. Il faut que les médecins soient garants du fait que ça se passe bien, et non de façon cavalière au fin fond d'un parking ou d'un bâtiment préfabriqué. Avec en plus un accès sous conditions financières qui créerait une inégalité d'accès pour certains.

Sur cette question, le professeur Maurice Tubiana, dans sa tribune paru dans Le Monde il y a quelques jours, dit : je voudrais pouvoir avoir accès à quelque chose qui pourrait s'apparenter à l'euthanasie, qu'on pourrait appeler suicide assisté. Cela lui permettrait de mieux vivre.

Il dit : j'aimerais que la médecine puisse m'aider à ce moment-là. La question est : comment ? Je ne suis pas sûre qu'à ce moment-là, tendre un verre avec du barbiturique, même si les médecins sont garants que la dose est suffisante et que le patient ne souffrira pas, ce soit la meilleure idée.

Parce qu'il me semble qu'il y a une espèce de contradiction entre le fait d'aller suffisamment bien pour être encore capable de boire ce verre et de le demander, et d'attendre suffisamment longtemps pour être au stade terminal de sa vie.

La mission Sicard propose cette voie pour faire endosser la responsabilité du suicide au patient et non au médecin. Il me semble que si les gens ont suffisamment dit et écrit que c'était ça qu'ils voulaient, cela suffit pour faire endosser au demandeur la responsabilité de la décision.

Est-ce qu'on ne franchit pas un tabou en demandant au médecin d'accéder à la demande de mort du patient ?

Je suis assez d'accord avec le professeur Sicard pour dire que c'est l'injection létale avec mort immédiate qui transgresse un tabou. Ce n'est pas un tabou que de demander volontairement sa mort. Il y a tout un corpus de références philosophiques qui défend depuis des millénaires l'éthique de cette position : il n'est pas immoral de défendre l'idée qu'on a le droit de demander sa mort.

François Béguin et Cécile Prieur (chat modéré par)
Revenir en haut Aller en bas
http://handi-christ.forumactif.com
Admin

Admin


Féminin Messages : 24166

Docteur - Docteur Véronique Fournier Empty
MessageSujet: Re: Docteur Véronique Fournier   Docteur - Docteur Véronique Fournier Icon_minitime23.11.13 11:24


Confusion autour du terme ''euthanasie''




Véronique Fournier, médecin, directrice du premier centre français d'éthique clinique explique dans Le Figaro comment elle tente de dénouer les demandes de fin de vie des patients.

Après sa rencontre avec Vincent Humbert, elle estime que dans ce cas tout à fait exceptionnel, ce dernier réclamait un suicide assisté. Cependant, elle souligne que les demandes d'euthanasie recouvrent des situations très différentes, souvent source de confusion. Ainsi les choses sont-elles différentes si l'on est ou pas en fin de vie, si le patient souffre, etc... Elle rappelle qu'il existe une grande différence entre l'euthanasie active (injecter quelque chose qui précipite la mort) et l'euthanasie passive (débrancher une machine ou arrêter un traitement).

Au centre d'éthique clinique qu'elle dirige, elle a enregistré de la part des malades une demi-douzaine de demande d'euthanasie en un an. Ces demandes correspondent en fait à une volonté de rupture dans la prise en charge des patients. Il s'agit d'un appel,d'une demande d'écoute, d'une provocation "j'en ai assez de ce que vous me proposez, je veux passez à autre chose; vous ne l'entendez pas, alors je vous provoque en parlant d'euthanasie". Les patients demandent qu'on arrête des soins trop lourds, qu'on cesse l'acharnement thérapeutique mais ne réclament pas "une injection mortelle". Bien souvent la transition se fait en douceur vers les soins palliatifs.

Elle rappelle qu'aujourd'hui on est capable de réanimer et maintenir en vie presque indéfiniment et que de ce fait on ne maîtrise plus très bien la frontière entre le traitement de confort et l'acharnement thérapeutique.

Véronique Fournier estime qu"il y a trop de décalages à combler sur le terrain entre soignés et soignants pour qu'une loi puisse être adoptée dans la sérénité". Elle préconise, en revanche, l'adoption d'une charte qui définirait un certain nombre de conditions à respecter avant de provoquer un acte d'interruption de vie.




Libération (Eric Favereau) 26/01/04
Revenir en haut Aller en bas
http://handi-christ.forumactif.com
 
Docteur Véronique Fournier
Revenir en haut 
Page 1 sur 1

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
HANDICHRIST :: Médecine: début et fin de vie-
Sauter vers: