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| | Vincent H et Vincent L | |
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| Sujet: Vincent H et Vincent L 29.01.14 17:39 | |
| Vivre et mourir dans la dignité Publié le 17/01/2014
Par OLIVIER BERGER EUTHANASIE passive, active, acharnement thérapeutique, soins palliatifs, droit au laisser mourir, suicide assisté, tout se confond et se mélange douloureusement dans un débat qui ne cesse de remuer les entrailles des Français. Hier, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne s’est prononcé contre la décision d’euthanasie passive prise par les médecins de Vincent Lambert, en accord avec sa femme et une partie de sa famille. Les parents, une sœur et un demi-frère de Vincent Lambert avaient saisi la justice après l’annonce du docteur Éric Kariger, chef du service de médecine palliative du CHU de Reims, d’arrêter la nutrition et l’hydratation artificielles du patient, tétraplégique et en état de conscience minimal.
On est frappé par la quasi-homonymie de Vincent Lambert avec Vincent Humbert, dix ans plus tard. De l’histoire tragique de cet autre jeune homme de 20 ans, tétraplégique, quasi aveugle et muet. Au centre héliomarin de Berck-sur-Mer le 26 septembre 2003, Marie, la maman de Vincent Humbert, avait injecté une très forte dose de médicaments, plongeant son fils dans le coma. Trois jours plus tard, le docteur Frédéric Chaussoy injectait une dose mortelle de chlorure de potassium.
Les deux mis en examen pour « empoisonnement avec préméditation » (le médecin) et « administration de substances toxiques » (la mère) bénéficièrent d’un non-lieu général en 2006. Entre-temps, le débat était devenu national et en 2005, la loi Leonetti avait encadré le droit au laisser mourir. Alors qu’il s’exerçait en toute discrétion, en compagnie des familles, tous les jours, dans tous les hôpitaux de France.
Ce débat complexe vit toujours. Il y a quelques semaines, l’élue écologiste, Sandrine Rousseau, avait fait état dans nos colonnes de la décision de sa mère d’en finir plus vite avec sa maladie incurable. Une déclaration sensible et courageuse qui prolongeait l’avis favorable donné au suicide assisté par un panel de citoyens réuni à la demande du président de la République par le Comité consultatif national d’éthique (CCNE). Une loi sera bientôt à l’étude.
Les souffrances physique et psychiques doivent être mieux prises en compte. Un sondage IFOP pour l’association Pour le droit de mourir dans la dignité estime que 89 % des Français sont favorables au recours à l’euthanasie active pour les personnes en fin de vie qui en feraient la demande.
Quel cadre strict supplémentaire faut-il déterminer ? En 2003, Vincent Humbert avait fait écrire par une infirmière une lettre ouverte au président Jacques Chirac. Il concluait : « Vous avez le droit de grâce, moi je vous demande celui de mourir. »
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| Sujet: Re: Vincent H et Vincent L 06.09.14 15:04 | |
| L'un était pompier L'autre infirmier psychiatrique çà laisse pensif, non ? ils ont tous les deux forçément réfléchi à la fin de vie et à la mort
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| Sujet: Re: Vincent H et Vincent L 11.12.14 0:52 | |
| De Vincent Humbert à Lambert, revenir au sens de la vie Libération
Pierre LE COZ Professeur de philosophie à la faculté de médecine de Marseille, ancien vice président du Comité consultatif national d’éthique (CCNE) 29 juin 2014 à 18:06
TRIBUNE Survenue en 2003, l’affaire Vincent Humbert est longtemps restée l’archétype du drame de la fin de vie. Sa figure s’est effacée dix ans plus tard, par quelque mystère du hasard. Un autre Vincent, quasi homonymique, l’a remplacé sur la scène médiatique. Coïncidence un peu étrange tout de même… Vincent Lambert aurait-il attiré autant la curiosité des médias si son nom n’avait pas évoqué celui de Vincent Humbert ?
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Le système médiatique a porté à leur point d’incandescence les discordes familiales en les livrant en pâture à la délectation morbide du public. Et le poids des médias, dans le déroulement de cette histoire épouvantable, n’a pas fini de se faire sentir. On imagine déjà les caméras s’agglutiner autour des parents du jeune homme quand la décision de le «débrancher» sera définitivement entérinée par les autorités juridiques compétentes. Nos yeux et nos oreilles auront droit aux cris et aux scènes de détresse en direct, les parents imploreront la «grâce» du président pour sauver leur enfant. Pitié, terreur, complaisance, voyeurisme… gageons que tous les ressorts émotionnels seront exploités pour exciter la ferveur du public.
Sur le fond de l’affaire, nous renverrons dos à dos les partisans des soins palliatifs et ceux de l’euthanasie. Leurs positions respectives ne permettent pas de résoudre le cas de Vincent Lambert. Les raisons pour lesquelles ce dernier s’est retrouvé en soins palliatifs «fin de vie» en 2013 sont trop entachées de subjectivité : pourquoi le jeune homme n’était-il pas en fin de vie un an avant ou un an après ? Quel accident médical majeur s’est-il donc produit ? Les parents de Vincent, opposés à l’arrêt de soins, n’ont pas manqué de pointer cet élément d’arbitraire. Pour décréter que quelqu’un est entré dans la dernière phase de sa vie, il faut pouvoir se réclamer de détériorations objectives et d’événements pathologiques nouveaux. En réalité, Vincent Lambert peut être considéré comme un sujet lourdement handicapé qui ne relève pas d’une démarche palliative, à l’instar des 1 700 autres patients plongés dans un état analogue en France.
Un autre dispositif législatif nous aurait-il permis d’éviter ce scénario catastrophe ? Certains estiment qu’on n’en serait pas là avec une loi sur l’euthanasie. Or, étant donné que Vincent Lambert n’avait rien écrit, même si l’euthanasie était dépénalisée en France, elle ne pourrait être autorisée en ce cas précis. Il nous manquerait la preuve formelle par la signature du principal intéressé.
On apaiserait grandement les problèmes de la fin de vie en revenant aux sources de la philosophie des Lumières qui fonde la civilisation moderne. L’édification de notre éthique et de notre droit repose sur le pilier de la laïcité. Or, il est difficile d’ignorer que l’attitude des parents de Vincent Lambert leur est inspirée par leurs convictions religieuses. Sans doute chacun est-il libre de croire que la vie a une valeur absolue. Il importe toutefois que les effets de sa croyance se limitent à sa propre vie sans affecter celle d’autrui.
Nous sommes les héritiers d’un paradigme culturel qui a destitué la vie de son caractère sacré. Le XVIIIe siècle a, définitivement, tourné la page du «théologico-politique» ; les droits de l’homme se sont substitués aux devoirs envers Dieu. L’idée selon laquelle l’homme vient au monde en vertu d’un don de Dieu n’est plus une vérité mais une croyance qui ne regarde plus personne d’autre que celui qui la professe. Au Moyen Age, à l’image du Christ, chacun devait porter sa croix et le refus du «cadeau» divin par le suicide était passible d’une damnation éternelle. L’entrée dans la modernité a consacré l’effondrement de cette conception de la condition et du destin de l’homme. Vivre à l’époque moderne, c’est attribuer pour but à l’existence humaine des valeurs telles que la liberté et le bonheur terrestre. Saint-Just pouvait proclamer en 1794 : «Le bonheur est une idée neuve en Europe.» De nos jours, les commémorations en l’honneur des résistants de la Seconde Guerre mondiale déclinent le même credo : la vie oui, mais pas à n’importe quel prix.
Dans la mesure où la vision traditionaliste de la vie n’est plus prédominante en Occident, nous ne pouvons pas présumer que Vincent Lambert aurait pu accepter la vie végétative à laquelle il est aujourd’hui confiné. Il n’y a aucune légitimité à lui imposer de vivre selon les règles d’une religion intransigeante dont il ne semble pas avoir accepté les postulats. Notre société ne peut pas accepter qu’un de ses membres vive selon un idéal qui serait la récompense supraterrestre de souffrances endurées ici-bas. Ce que l’on est autorisé à postuler au regard de sa vie écoulée, c’est qu’il partageait la philosophie moderne de ses concitoyens. Vivre, tel qu’on le conçoit aujourd’hui, c’est développer des possibilités, participer à l’aventure de l’humanité, s’engager dans le monde pour y concrétiser ses valeurs. L’homme n’est pas fait pour exister en vain. Lorsqu’il ne parvient plus à découvrir, à imaginer et à créer des interactions avec les autres, sa vie perd en intérêt et en sa saveur.
Il serait hypocrite de dire que toute vie vaut toujours la peine d’être vécue, toutes choses égales par ailleurs. Même si le droit ne peut, ni ne doit, formaliser la dimension métaphysique de l’existence, il est permis de préférer des formes de vie à d’autres. Philosophe, médecin et résistant, Canguilhem définissait l’être humain comme un «être normatif». Exister au sens pleinement humain du terme, c’est inventer des normes, opposer l’idéal au réel, le sens à l’absurde, la liberté à la résignation. C’est la grandeur de l’homme que de ne jamais se contenter de survivre, et de toujours chercher des raisons d’exister. C’est sans doute la meilleure façon d’honorer la mémoire de Vincent Lambert que de le créditer de cette aspiration au sens de la vie et à la grandeur.
A paraître en octobre : «Le gouvernement des émotions. Comment résister aux manipulations. Albin Michel . Pierre LE COZ Professeur de philosophie à la faculté de médecine de Marseille, ancien vice président du Comité consultatif national d’éthique (CCNE)
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